Droit des contrats, acceptation d'une offre, valeur du silence, difficulté de preuve, consentement, conditions de l'acceptation d'une offre
Un adage du droit français affirme qu'on lie les boeufs par les cornes et les Hommes par la parole. En effet, « qui ne dit mot consent » est une maxime loin d'être consacrée par la jurisprudence française du droit des contrats comme le démontre cet arrêt de la chambre civile de la Cour de cassation en date du 25 mai 1870.
Il s'agissait d'une banque qui était chargée de recueillir des souscriptions pour le placement d'actions d'une société de raffinerie. La banque avait porté sur la liste des souscripteurs l'un de ses clients à qui elle avait adressé une lettre pour lui informé du débit qui sera effectué sur son compte ; la lettre lui précisa que ce débit serait effectué dans le but de réaliser le versement de vingt actions que le client avait soit disant souscrites. Cependant, le client avait laissé la lettre sans réponse. La société de raffinerie - qui n'avait pas reçu le versement des actions - assigne en justice la banque et son client - qui aurait accepté le statut d'actionnaire - devant le tribunal de commerce de la Seine. Le 19 mai 1866, la juridiction de premier degré a rendu un jugement déboutant la société de raffinerie de sa demande en estimant que « s'il est vrai que des pourparlers aient eu lieu au sujet des souscriptions, ils n'ont point amené d'engagement de ce défendeur ». C'est pourquoi la société de raffinerie a fait appel de la décision devant la Cour d'appel de Paris qui a rendu un arrêt infirmatif le 18 janvier 1869 en estimant que la lettre envoyée par la banque au client indiquait à ce dernier, qu'il figurait au sein de la liste des souscripteurs d'actions de la société de raffinerie, qu'il avait été débité du premier versement, et que son silence a valu comme acceptation. Le client ayant soit disant accepté le statut d'actionnaire de la société de raffinerie se pourvoit devant la Cour de cassation en estimant que son silence ne valait pas acceptation des souscriptions pour le placement d'actions de la société de raffinerie. Les juges de la Haute Juridiction ont donc été amenés à se prononcer sur la question suivante : dans quelle mesure le silence du client de la banque n'a pas permis de former valablement le contrat de vente d'actions de la société de raffinerie ?
[...] Commentaire de l'arrêt : Cass. Civ mai 1870 Un adage du droit français affirme qu'on lie les bœufs par les cornes et les Hommes par la parole. En effet, qui ne dit mot consent est une maxime loin d'être consacrée par la jurisprudence française du droit des contrats comme le démontre cet arrêt de la chambre civile de la Cour de cassation en date du 25 mai 1870. Il s'agissait d'une banque qui était chargée de recueillir des souscriptions pour le placement d'actions d'une société de raffinerie. [...]
[...] C'est pourquoi, le silence est également créateur d'insécurité juridique. II Le silence créateur d'insécurité juridique Le silence comme moyen d'expression du consentement à un contrat peut engendrer une situation délicate pour un cocontractant puisqu'il peut se voir imposer sa qualité de cocontractant Cependant, des décisions jurisprudentielles postérieures à l'arrêt de 1870 sont venues valider le silence comme moyen d'expression du consentement et ce afin de laisser une marge au principe de la liberté contractuelle. Une position contractuelle subie et non choisie Le silence comme moyen d'expression du consentement à un contrat induit nécessairement un déséquilibre entre les parties. [...]
[...] Cet arrêt retint que le silence valait acceptation de l'offre et ce, afin de ne pas entraver les échanges entre agents économiques. Ce silence est néanmoins encadré car il nécessite la reconduction du même contrat exécuté par les deux parties pendant une période longue. Aussi, l'arrêt de la Cour d'appel de Montpellier en date du 23 février 1978 appelle à la vigilance des clients des banques puisqu'il affirme le silence gardé plus de trois ans par le titulaire d'un compte [ ] vaut approbation des éléments de ce compte et exclut la restitution de la somme Il s'agit également de créer de la sécurité juridique en laissant au client un délai de trois ans pour réfuter les éléments erronés de son compte et également l'impossibilité de revenir sur une position contractuelle soit avec l'établissement bancaire soit avec une tierce personne. [...]
[...] Ce dernier n'a aucun acte matériel témoignant de son refus de souscrire. C'est la raison pour laquelle, la Cour de cassation en visant l'article 1108 du Code civil qui dispose qu'une convention est valide si figure le consentement de la partie qui s'oblige [ ] affirme que le silence ne peut suffire pour rendre compte du consentement d'une partie à un contrat. Le silence est considéré par la Cour de cassation comme une expression de volonté trop creuse et n'ayant pas assez de force pour rendre compte du consentement de la partie qui s'oblige. [...]
[...] Elle ne peut donc prouver le consentement de ce dernier à la souscription d'actions de la société de raffinerie. La phrase du doyen Carbonnier la volonté tacite se matérialise dans une attitude, tandis que le silence n'a aucune extériorité illustre ce problème de preuve. Par ailleurs, la suffisance est également évoquée par la Cour de cassation ; la banque ne dispose que de sa lettre envoyée à son client indiquant les opérations bancaires qui allaient se produire sur son compte pour prouver l'existence d'un contrat avec celui-ci. [...]
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