Commentaire de l'arrêt Derguini
Il s'agit du commentaire de l'arrêt Derguini en date du 9 mai 1984, intégralement rédigé et assorti d'une analyse juridique solide et précise. Le commentaire est complété de nombreuses références jurisprudentielles et doctrinales qui retracent la ligne juridique dans laquelle l'arrêt s'inscrit.
[...] Cependant, une telle difficulté est superficielle : en effet, aurait-on reproché à l'enfant une faute d'imprudence que la démonstration de la réalisation de la faute se serait pliée aux mêmes impératifs : il s'agit en tous les cas de déterminer l'étalon, le standard de l'enfant normalement prudent et diligent, référence abstraite qui ne saurait varier au gré de la nature passive ou active de la faute poursuivie. Ceci explique que la Cour de cassation, afin d'exempter partiellement l'enfant de sa faute, se réfère d'emblée à son jeune âge. Car son comportement « aurait dû conduire à une exonération totale »1 Cass. Ass. [...]
[...] A cette appréciation in concreto, qui semble objectiver la faute de l'automobiliste, s'ajoute une faute plus subjective, en ce qu'elle est appréciée in abstracto et permet, en filigrane, de comparer ce qui a été et ce qui aurait dû être. Autrement dit, la Cour soulève une question implicite: quels auraient été les agissements d'un automobiliste raisonnable placé dans la même situation? Aurait-il fait montre d'une prudence plus aiguë, prudence qui fait défaut en l'espèce à l'automobiliste en tant qu'il a méconnu « les panneaux routiers » indiquant la « possibilité de la présence d'enfants »? [...]
[...] Pour Stéphanie Porchy-Simon, dans son ouvrage Droit des obligations, il s'agit d'une solution sévère qui semble faire de la victime un coupable qui doit supporter le poids de sa faute et de sa culpabilité, malgré son âge. Pour atténuer cette rigueur jurisprudentielle, le législateur est intervenu en L'intervention a posteriori du législateur Afin de protéger et d'indemniser les victimes non conductrices de véhicules terrestres à moteur, la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation réserve un sort privilégié aux mineurs de moins de seize ans, dès lors considérés comme des victimes particulières. Alors, la loi n'offre aucune exonération possible du responsable, exception faite de la faute intentionnelle. [...]
[...] Pourtant, le parallèle avec la loi Badinter du 5 juillet 1985 est impossible en l'espèce, dans la mesure où la solution commentée intervient un an avant sa promulgation. Dès lors, le seul droit commun de la responsabilité civile peut en l'espèce rendre compte de la faute retenue à l'encontre de l'enfant: en effet, le droit de la responsabilité civile, par la généralité des dispositions de l'article 1382 du Code civil, n'était nullement de hiérarchie entre les fautes, évoquant laconiquement « Tout fait quelconque de l'homme ». [...]
[...] 2ème juin 1980, D. 1981.I.R.323), à l'instar de l'espèce. Partant, aucune faute ne pouvait être commise par une personne physique qui avait causé un dommage dans un état d'inconscience. L'arrêt semble ici rompre avec cette solution en annihilant les solutions antérieures à la loi du 3 janvier 1968 qui institue une indemnisation à laquelle ont droit les victimes des agissements de personnes sous l'empire d'un trouble mental. Serait-ce à dire que l'enfant qui a rebroussé chemin en l'espèce est assimilé à une personne atteinte de démence ? [...]
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