Loteries commerciales, quasi contrat
« En raison de ce vague de la notion [...] on a eu tendance à expliquer par les quasi-contrats ce que l'on était embarrassé d'expliquer autrement ». Par cette citation, nous pouvons saisir ce que pensait Eugène Gaudemet du quasi-contrat au début du XXe siècle. Force est de constater que cet arrêt fait passer le professeur pour un visionnaire. La Cour de cassation a certes mis fin à une grande incertitude jurisprudentielle concernant les loteries commerciales, mais a également provoqué un changement important du droit des obligations en rendant le 6 septembre 2002 un arrêt si novateur. Les faits sont toujours les mêmes dans ce vaste contentieux à la mode qu'est celui des loteries commerciales. Un client d'une société de vente par correspondance, le demandeur au pourvoi, se réjouit d'avoir gagné suite à la réception de deux documents le désignant de façon nominative et répétitive comme étant le gagnant de la somme de 105 750F. Après lecture et relecture du document publicitaire, il semble que la seule condition préfigurant à l'attribution de ce gain est l'envoi d'un bon de validation. Ce maigre labeur sera effectué sans rechigner. Pourtant, malgré le respect de toutes les directives de la publicité, notre déçu, M Bossa, ne reçoit jamais son dû. Il va donc assigner la société de vente par correspondance en paiement du gain promis. L'association de consommateur « UFC Que Choisir ? » se joint à l'instance en réclamant 100 000F de dommages et intérêts pour le préjudice subit par l'ensemble des consommateurs. Malheureusement, les juges du fond ne l'ont pas entendu de cette oreille et n'ont pas considéré que la société devait payer le gain promis. Ils ont préféré actionner la responsabilité délictuelle du défendeur au pourvoi. Naturellement, le dédommagement est loin des attentes des demandeurs car ils n'obtiendront respectivement que cinq mille francs et un franc. Nos désillusionnés vont alors former un pourvoi pour défaut de base légale. La question qui s'est alors posée au juge de la cour de cassation était de savoir s'il y avait un fondement juridique sur lequel les sociétés organisatrices de loteries commerciales pouvaient être condamnés. Le premier moyen, qui concernait l'association de défense des consommateurs, va être rejeté par les juges de la Cour de cassation qui ont considéré que l'évaluation du préjudice subi par l'ensemble des consommateurs français relevait de l'appréciation souveraine des juges du fond. L'on aurait pu penser que la cour ferait de même pour M Bossa. Pourtant, contre toute attente, elle soulève d'elle-même un moyen de pur droit pour casser l'arrêt de la cour de Paris rendu le 23 octobre 1998 et n'examine même pas celui du demandeur. Au visa de l'article 1371 du Code civil, la chambre mixte de la Cour de cassation, considère que la cour d'appel a violé le texte sus-cité car ce dernier permet de déduire que « l'organisateur d'une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa s'oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer ». Autrement dit, la Cour de cassation vient de créer un quasi-contrat qui transforme le créateur d'illusion en un débiteur d'une obligation du montant de cette même illusion !
[...] C'est pour cette raison que les juges ont pensé à se placer sur la responsabilité contractuelle (12 juin 2001). L'idée était que la société qui a annoncé un gain sans mettre en valeur l'aléa inhérent à celui-ci, constituait une offre. Le destinataire, qui renvoyait le bulletin de participation, acceptait l'offre qui lui était faite. On considérait qu'il y avait eu une rencontre de volontés, et donc qu'un contrat s'était formé entre la société expéditrice et le client. Cette solution a au moins l'avantage d'être dissuasive puisque la société se voyait alors condamnée à offrir le gain promis. [...]
[...] La seule chose dont on peut à peu près être sûr, c'est que les juges ont une volonté de faire cesser ces pratiques frauduleuses. Encore faut-il trouver un fondement juridique. Dans un premier temps, on a pensé à faire appel à la sacro-sainte responsabilité délictuelle. (Arrêt du 19 octobre 1999). La cour a considéré comme fautive la société qui tente d'induire en erreur le consommateur moyen. Effectivement, la solution peut sembler juste car elle vient compenser le préjudice purement moral qui est né de la déception d'avoir cru gagner. [...]
[...] Pour résoudre ces difficultés de classement, le quasi-contrat est une aubaine. C'est peut-être même trop facile d'avoir une catégorie fourre-tout N'allons-nous pas vers un régime vague et peu cohérent ? N'est-ce pas plutôt une solution providentielle qu'une vrai réponse de fond. Il n'en reste pas moins vrai que si la Cour de cassation continue sur la voie qu'elle vient d'entrouvrir, nous pouvons nous apprêter à vivre une véritable révolution du droit des obligations. Commentaire de l'arrêt de la chambre mixte de la cour de cassation du 6 septembre 2002 Idée annonce de plan : La Cour de cassation opère un revirement en s'éloignant des fondements traditionnel. [...]
[...] En revanche, cet arrêt permet réellement de relancer la notion de quasi- contrat en se remémorant une définition qui n'était plus usitée depuis des siècles On peut supposer que l'adoption d'une définition si large va avoir des conséquences importantes sur le droit des obligations La réminiscence des historiques obligations quasi-contractuelles Nous l'avons vu précédemment, la notion de quasi-contrat qui est développée par la Cour de cassation ne correspond pas à la théorie unanimement admise. Il n'y a pas de déplacement de valeur, pas plus que de volonté de rétablir une situation déséquilibrée, et encore moins d'acte désintéressé. La Cour de cassation a plutôt fait revivre une conception authentique du quasi-contrat. [...]
[...] Les faits sont toujours les mêmes dans ce vaste contentieux à la mode qu'est celui des loteries commerciales. Un client d'une société de vente par correspondance, le demandeur au pourvoi, se réjouit d'avoir gagné suite à la réception de deux documents le désignant de façon nominative et répétitive comme étant le gagnant de la somme de 105 750F. Après lecture et relecture du document publicitaire, il semble que la seule condition préfigurant à l'attribution de ce gain est l'envoi d'un bon de validation. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture