La loi du 17 juin 2008 a profondément modifié un mode d'extinction des obligations, le régime de la prescription extinctive. Cette loi a tenté de simplifier la prescription en modifiant les durées légales de prescription, mais elle a aussi instauré, par l'intermédiaire du nouvel article 2254 du Code civil, la possibilité pour les parties d'aménager conventionnellement le régime de la prescription extinctive.
Cependant, l'article 26 de cette même loi prévoit que la réforme sera pleinement effective qu'à partir de 2013 afin de ne pas mettre à mal le principe de non-rétroactivité des lois modifiant les règles contractuelles. Il nous faudra donc avant tout développement revenir sur le régime actuel de la liberté contractuelle en matière de prescription.
Avant la réforme de 2008, il n'était pas, selon l'ancien article 2220 du Code civil, possible d'aménager conventionnellement la prescription. Cependant, la jurisprudence était constante depuis un arrêt du 1er février 1853 sur le fait qu'il était possible de réduire les délais de prescription. De plus un arrêt de 2002 avait décidé qu'il était possible d'ajouter une cause de suspension de la prescription. Voici les seules marges de manœuvre qui étaient offertes aux parties afin de modifier les règles de la prescription.
La réforme du 17 juin 2008 va consacrer légalement via l'article 2254 du Code civil ces possibilités et va même aller plus loin tout en imposant des limites. Cependant, cette libéralisation semble sur certains points aller à l'encontre de la simplification voulue par cette réforme. En effet il est difficile de vouloir simplifier un régime et à la fois de permettre à tous les contractants ou presque de créer leurs propres règles. C'est pourquoi l'on peut se demander si la possibilité d'aménager conventionnellement la prescription n'opère pas une complexification du régime alors que la loi voulait le simplifier ?
[...] II- Un régime complique le régime de la prescription L'article 2254 du Code civil dans sa nouvelle rédaction instaure une liberté contractuelle mais cette liberté crée un enchevêtrement de délais de prescription différent qui rendent la matière peut-être encore moins lisible qu'avant la réforme du 17 juin 2008 Mais avant d'aborder cela, il nous faut d'abord nous pencher sur les complexités liées au texte de l'article 2254 en lui-même Un texte non exempt de défaut La première difficulté que l'on peut souligner concerne le point de départ du délai de prescription. En effet l'article 2254 ne prévoit pas un point de départ spécifique en cas d'aménagement contractuel. Il faut donc revenir au droit commun. [...]
[...] Les parties peuvent donc, conventionnellement, réduire ou augmenter la durée de la prescription. La grande nouveauté est la possibilité de prévoir une prescription plus longue que celle prévue par le droit commun. Cette possibilité offre une liberté supplémentaire aux parties pour qu'ils puissent modeler leurs obligations afin de les adapter à leurs besoins. Le deuxième alinéa de ce même article dispose que les parties peuvent ajouter aux causes de suspension et d'interruption de la prescription. Cette possibilité permet donc aux parties de prévoir des cas supplémentaires de suspension ou d'interruption de la prescription. [...]
[...] Cependant, ces libertés connaissent un certain nombre de limitations. Des limitations nécessaires à l'équité et à la sécurité L'article 2254 prévoit en son troisième alinéa qu'il n'est pas possible d'aménager conventionnellement la prescription des actions en paiement ou répétition des salaires, arrérages de rente, pensions alimentaires, loyer, fermages, charges locatives, intérêts des sommes prêtées et, généralement, aux actions en paiement de tout ce qui est payable par années ou a des termes périodiques plus court A cela il faut ajouter les cas ou cette liberté ne ferait que déséquilibrer la situation. [...]
[...] C'est donc l'article 2224 qui va s'appliquer, ce dernier prévoit que la prescription débute à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. Ce point de départ est donc flottant, il n'est pas fixé par un élément objectif. Les praticiens se demandent donc s'il n'est pas possible de prévoir contractuellement ce point de départ. R. Dammann et A. Keszler (RLDS, mai 2009, p7) arguent que plusieurs points vont dans ce sens. Selon eux le fait que le point soit déterminé subjectivement devrait pouvoir permettre l'aménagement par les parties. [...]
[...] Enfin, le dernier argument serait la lettre de l'article 2232 du Code civil qui limite le report du délai de prescription à 20 ans. Ce texte pourrait selon eux justifier la possibilité de reporter conventionnellement le point de départ de la prescription. Ces questions sur le point de départ de la prescription seront progressivement effacées par la jurisprudence mais en attendant et comme le précise l'avocat A. Caston (dans une note publiée sur son site Internet) la prescription décennale était plus simple car le point de départ était fixe. [...]
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