Au visa de l'art 2037 Cciv, la Cour censure les juges du fond au motif que « la caution n'est déchargée qu'à concurrence de la valeur des droits pouvant lui être transmis par subrogation et dont elle a été privée par le fait du créancier. »
Cette solution, même si elle n'est pas nouvelle, invite à analyser les critères, certes classiques, de mise en oeuvre de l'art 2037 Cciv (I) avant d'étudier le rôle du principe de proportionnalité en la matière (II)...
[...] Pourtant la jurisprudence a toujours refusé aux cautions le bénéfice de l'exception de subrogation en l'absence de préjudice (Com 21 juillet 1964), ce que la majorité des approuvent (P.Simler, P.Malaurie et L.Aynès) mais que certains regrettent, considérant que cette exigence opère un rapprochement inopportun avec la responsabilité civile (MM Cabrillac et Mouly) Cependant les juges maintiennent leur position, ce qui conduit à s'interroger sur ce en quoi doit consister ce préjudice. L'art 2037 Cciv vise uniquement l'hypothèse où la caution est privée de son recours subrogatoire contre le débiteur. Ainsi en l'espèce, le créancier qui n'inscrit pas une sûreté fait perdre à la caution la possibilité d'être subrogée, après paiement, dans ses droits, ce qui lui permettrait de faire valoir l'existence de garanties à l'encontre du débiteur. [...]
[...] Le créancier forme alors un pourvoi en cassation que la Cour accueille par un arrêt de censure. La question qui se pose à la Haute Juridiction est alors celle de déterminer dans quelle mesure le fait du créancier, dont le caractère préjudiciable pose le problème de la charge de la preuve, libère la caution de son obligation. Au visa de l'art 2037 Cciv, la Cour censure les juges du fond au motif que la caution n'est déchargée qu'à concurrence de la valeur des droits pouvant lui être transmis par subrogation et dont elle a été privée par le fait du créancier. [...]
[...] L'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 décembre 1998 apporte d'utiles précisions sur plusieurs aspects du texte. En l'espèce, le remboursement d'un prêt consenti à une société est garanti par une caution solidaire qui s'engage à hauteur de l'emprunt, soit 1.400 .000F. La société fait ensuite l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, et la caution actionnée en paiement invoque le bénéfice de l'art 2037 Cciv. Elle fait valoir à cette fin que le créancier a négligé d'inscrire le nantissement de fonds de commerce que le débiteur lui avait consenti. [...]
[...] Car en définitive, la sanction indirectement affligée au créancier par le biais de la décharge de la caution, est à rapprocher de celle d'un manquement à ce devoir de bonne foi. Il est alors possible de considérer que l'on rejoint avec cet argument les auteurs qui trouvent dans la responsabilité civile le fondement du mécanisme de l'art 2037 Cciv. D'ailleurs cette voie semble celle sur laquelle s'est engagée la Cour de cassation par un arrêt Civ 1ère 16 juillet 1998, dans lequel elle sanctionne également un manquement à l'obligation de bonne foi du créancier, mais sur le terrain de la responsabilité contractuelle cette fois. [...]
[...] La Haute juridiction rappelle alors que le principe de proportionnalité doit jouer et que la décharge ne vaut qu'à hauteur de la valeur des droits perdus. Cette solution n'est pas nouvelle puisque déjà admise par un arrêt Req 8 mai 1850 et confirmée depuis (par un exemple Civ 1ére 27 février 1987 ou Com 9 mai 1994), néanmoins un rappel à l'ordre des juges du fond paraît avoir été nécessaire face à une tendance à favoriser la solution qui bénéficie à la caution. [...]
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