Au-delà des conditions ordinaires nécessaires pour tout contrat (consentement, capacité, …), il y a deux éléments qui sont indispensables à l'existence même d'une vente : la chose et le prix. À défaut de paiement de prix, le contrat ne peut pas recevoir la qualification de vente. La détermination du prix est encadrée par le Code civil aux articles 1591 et 1592, ce dernier disposant qu' « il peut cependant être laissé à l'arbitrage d'un tiers ; si le tiers ne veut pas ou ne peut pas faire l'estimation, il n'y a point vente ».
L'article 1843-4 correspond à l'hypothèse de la cession de droits sociaux imposés par la loi. Mais même lorsque les parties ont recours volontairement à ce mécanisme, il n'est pas opportun de le claquer sur celui de l'article 1592 du Code civil, celui-ci pouvant s'appliquer quelque soit l'objet alors que l'article 1843-4 ne peut se voir appliqué que dans un cas particulier.
Il est donc intéressant de remarquer que le législateur a voulu créer une spécialité de l'article 1592 du Code civil dans le domaine de la cession de droits sociaux, donc certains aspects sont identiques par essence, mais il n'empêche que le mécanisme de l'article 1583-4 a une certaine spécificité que la jurisprudence n'a pas toujours conserver.
Dans quelles mesures l'expert de l'article 1592 du Code civil et celui de l'article 1843-4 peuvent-ils intervenir dans la fixation du prix ?
[...] En effet, l'expert doit être désigné dès le contrat et ce, par des modalités. Ainsi, l'expert sera désigné sans intervention nouvelle des parties. Donc, rien n'interdit aux parties de stipuler qu'il appartiendra au juge du tribunal de nommer l'expert. Mais sans cette stipulation expresse, le juge ne fera rien. En vertu de l'arrêt de la 1re Chambre civile du 16 mai 1984, faute d'accord entre les parties, la désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur d'un bien ne peut être assimilée à la nomination d'un expert de l'article 1592 du Code Civil. [...]
[...] La vente est considérée comme parfaite, au moment de la désignation du tiers pour l'article 1592 du Code Civil et au moment de l'évaluation du prix par le tiers pour l'article 1843-4 du Code Civil. Sur ce point, l'article 1843-4 est plus contraignant que l'article 1592. En effet, la chose est déterminée et le prix est déterminable, donc au sens de l'article 1583 du Code Civil, il y a vente. A partir du moment où il y a vente, l'estimation faite par le tiers s'impose aux parties, aux cocontractants, et cela que l'expert ait été désigné dans le cadre de l'article 1592 du Code Civil ou dans celui de l'article 1583-3. [...]
[...] La nullité absolue de cette sanction est critiquée par certains auteurs qui trouveraient plus approprié de sanctionner l'indétermination du prix par une nullité relative car seuls des intérêts privés sont en jeu. La nullité de l'indétermination du prix se trouve justifier par le fait que la vente se trouve privée de l'un de ses éléments essentiels. Sans prix, il n'y a pas vente. Pour déterminer le prix, l'expert n'est pas tenu par ce que les parties ont pu dire, ou prévoir. Une fois qu'elles s'en remettent à l'expert, l'expert détermine le prix, seul. [...]
[...] Pour que l'expert ait la réelle qualité d'un tiers, il ne faut pas qu'il soit sous l'indépendance de l'une des parties. Dans l'article 1592 du Code Civil, le législateur réserve la possibilité au tiers de ne pas procéder à l'expertise, s'il ne veut pas ou ne peut pas. En cas d'indétermination du prix, la vente sera considérée comme nulle, d'une nullité absolue et un nouvel accord entre les parties sera nécessaire pour que la vente ait lieu. Mais la pratique laisse la possibilité aux parties de prévoir, dès le contrat, un tiers de substitution si le 1er tiers ne procède pas à la détermination du prix. [...]
[...] Une jurisprudence acquise (Com février 2004), permet d'engager la responsabilité de l'expert ayant commis l'erreur grossière. En effet, en droit commun du mandat, le mandataire doit répondre des fautes qu'il commet. Mais la démonstration de l'existence d'une erreur grossière n'est pas nécessaire pour engager la responsabilité de l'expert. Une partie de la doctrine aimerait que l'article 1843-4 du Code Civil puisse s'aligner sur cette sanction. Mais compte tenu du rapprochement de l'article 1843-4 à l'article 1592, cette évolution semble probable. [...]
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