Privilège de procédure contrat en cours mandat d'avocat honoraires
Le privilège de la procédure, institué par l'article L. 621-32 avant la réforme de 2005, profite aux créances postérieures au jugement d'ouverture d'une procédure collective. Dès lors, on comprend que le contentieux soit important en la matière, les créanciers, notamment ceux disposant de créances résultant de prestations réalisées antérieurement et postérieurement au jugement, essayant de prolonger au maximum leur mission afin de bénéficier de ces dispositions.
En l'espèce, une société civile professionnelle (SCP) d'avocat est désignée par mandat aux fins d'assister une autre société mise en redressement judiciaire. Par la suite, le redressement est converti en liquidation aboutissant à la dissolution de la société. La SCP saisit le bâtonnier de l'Ordre des avocats d'une demande de recouvrement des honoraires, estimant que le liquidateur lui en était redevable au titre de l'article L. 621-32 du C.com. L'irrecevabilité de la demande étant confirmée en appel, la SCP se pourvoit en cassation, soutenant qu'elle est en mesure de bénéficier du « privilège de procédure » en ce que sa mission s'est nécessairement poursuivie postérieurement à la liquidation, jusqu'à ce que la débitrice cesse d'exercer toute prérogative, toute activité, jusqu'au dépôt de l'état définitif des créances. La SCP avance deux autres arguments : le jugement d'ouverture de la liquidation ayant eu lieu le 28 janvier 1999, les honoraires se rapportant à l'assistance de la société lors d'une audience du 8 octobre 1999 devraient bénéficier de l'article L. 621-32, et, en outre, la société en liquidation étant seule débitrice, on ne pouvait l'accuser (la SCP) de vouloir faire supporter à la masse des créanciers les frais d'honoraires.
Le mandat d'un avocat de défendre les intérêts d'une société initialement mise en redressement judiciaire prend-il fin avec la mort officielle de la société, c'est-à-dire le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, ou avec la cessation concrète de ses activités, permettant à une partie des honoraires de bénéficier du « privilège de procédure » de l'article L. 621-32 du C.com ?
Dans son arrêt du 19 mai 2004, la Chambre commerciale de la Cour de cassation préfère la première option, interprétant strictement l'article L. 621-32 du C.com (I) et affirmant une montée en puissance de la prise en compte de l'intérêt de l'ensemble des créanciers (II).
[...] Plan de commentaire : Com mai 2004 Le privilège de la procédure, institué par l'article L. 621-32 avant la réforme de 2005, profite aux créances postérieures au jugement d'ouverture d'une procédure collective. Dès lors, on comprend que le contentieux soit important en la matière, les créanciers, notamment ceux disposant de créances résultant de prestations réalisées antérieurement et postérieurement au jugement, essayant de prolonger au maximum leur mission afin de bénéficier de ces dispositions. En l'espèce, une société civile professionnelle (SCP) d'avocat est désignée par mandat aux fins d'assister une autre société mise en redressement judiciaire. [...]
[...] 621-32 du C.com. Si la Cour de cassation se permet, dans son arrêt du 19 mai 2004, une certaine liberté en posant des conditions à l'application de l'article L. 621-32, elle le fait dans le respect de l'esprit de ce texte. Le législateur a ici recherché à encourager les créanciers à soutenir financièrement les entreprises en difficulté en leur accordant un régime de faveur ou à récompenser ceux qui ont agi ainsi (dans le cadre de la liquidation notamment). Ce régime de faveur n'est pas des moindres : les créances postérieures auront pour assiette l'ensemble des biens mobiliers et immobiliers du débiteur et leurs titulaires disposeront d'un droit de préférence sur le prix de vente de ces biens. [...]
[...] 621-32 du C.com ? Dans son arrêt du 19 mai 2004, la Chambre commerciale de la Cour de cassation préfère la première option, interprétant strictement l'article L. 621-32 du C.com et affirmant une montée en puissance de la prise en compte de l'intérêt de l'ensemble des créanciers (II). Une solution interprétant strictement l'article L. 621-32 du C.com. L'insuffisance d'un simple parallélisme entre le prolongement des activités du mandataire et de la société débitrice. Le rejet de calquer la longévité du mandat de l'avocat sur celle des prérogatives de la société. [...]
[...] 621-32 du C.com permet de ne pas alourdir le passif de la société débitrice en liquidation et, par là-même, de laisser une potentielle « part du gâteau » plus importante à l'ensemble des créanciers. Cet arrêt affiche un objectif pleinement assumé. Dans l'arrêt précédemment commenté (Com octobre 2001), cette idée apparaissait en filigrane et elle est désormais clairement assumée (« il n'incombait pas aux créanciers de la procédure de supporter les honoraires de l'avocat chargé d'assister le débiteur en liquidation »). [...]
[...] Dans les faits, la SCP avait continué de défendre les intérêts de la société débitrice ultérieurement au jugement d'ouverture. Une preuve convaincante est avancée : la SCP a assisté la débitrice lors d'une instance en date du 8 octobre 1999, soit huit mois après l'ouverture de la liquidation judiciaire. La Cour de cassation ne semble pas prendre en compte ces éléments factuels, préférant restreindre le champ d'application de l'article L. 621-32 du C.com en posant, entre autre, des conditions formelles. Le risque d'une telle solution : décourager les avocats de défendre les sociétés en redressement judiciaire. [...]
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