Liquidation judiciaire cession fonds de commerce séquestre
Le séquestre conventionnel n'emporte pas transfert de la chose consignée d'un patrimoine à un autre. Dans l'hypothèse de la vente d'un fonds de commerce, si la chose, en l'occurrence le prix de vente, est indisponible, elle est destinée à intégrer le patrimoine de l'acquéreur, sauf opposition de certains créanciers qui pourront se servir sur la somme. Mais le mécanisme ne remet absolument pas en cause le contrat de vente en lui-même, au contraire, elle fait partie du processus. Dès lors, que faire si, pendant la période d'immobilisation des fonds, le vendeur fait l'objet d'une procédure collective ? Qu'advient-il des fonds ? Dans l'optique de mettre fin à une jurisprudence qui estimait que la distribution du prix de vente ne pouvait être soumise aux règles des procédures collectives, une loi du 26 juillet 2005 intervint pour modifier l'article R. 622-19 du C.com et rendre caduque les procédures de distribution du prix de vente ne faisant pas suite à une procédure d'exécution ayant produit des effets attributifs avant le jugement et en cour au jour de ce jugement. Certains auteurs estimèrent que ces dispositions ne concernaient pas les séquestres conventionnels et la position fut suivie par une partie des juges du fonds. L'ordonnance du 18 décembre 2008 mis fin au débat en éclaircissant l'article L. 622-21 du même code auquel l'article précité renvoie. Mais, malgré cette intervention positive du législateur, la situation restait floue concernant les procédures ouvertes entre les dates d'application de ces deux textes.
En l'espèce, par un jugement du 14 décembre 2006, une société, ayant préalablement cédé son fonds de commerce à une autre et l'ordre des avocats s'étant constitué séquestre d'une partie du prix de cession, est mise en liquidation judiciaire. Le liquidateur exige les fonds objet du séquestre, ce à quoi s'oppose l'ordre des avocats. Les juges du fonds faisant droit à sa demande et condamnant l'ordre à restitution des fonds, ce dernier se pourvoit en cassation, soutenant, d'une part, que le prix de vente objet du séquestre conventionnel n'est pas entré dans le patrimoine de la société en liquidation en ce qu'il était investi d'un mandat irrévocable d'effectuer les paiements et, d'autre part, que la caducité de l'article R. 622-19 du C.com ne saurait viser l'hypothèse du séquestre conventionnel en ce qu'il a été décidé amiablement par les parties et que son mécanisme a été consolidé avant l'ouverture de la procédure collective (idée : du coup, c'est comme si l'on avait un effet attributif avant le jugement d'ouverture).
En application de l'article R 622-19 du C.com, la liquidation d'une société ayant cédé son fonds de commerce, pendant le délai de séquestration du prix de vente, donne-t-il lieu à la remise des fonds, par le séquestre conventionnel, au liquidateur judiciaire ?
[...] 622-19 du C.com à la lumière de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ce qui aura pour conséquence d'engendrer la caducité de l'ensemble des procédures de distribution en cours dès ouverture de la procédure collective du vendeur (II). Une solution interprétant l'article R. 622-19 du C.com à la lumière de l'ordonnance du 18 décembre 2008 Ambiguïté du droit applicable aux procédures ouvertes entre l'application de la loi de 2005 et celle de l'ordonnance de 2008 : une marge pour la thèse du séquestre conventionnel investi d'un mandat irrévocable ? [...]
[...] Dans cette optique, il en va du principe fondamental du traitement égalitaire des créanciers. La survie de la mission du séquestre malgré l'ouverture de la liquidation judiciaire aurait en effet permis de protéger les fonds consignés au détriment des autres créanciers. Cela aurait eu pour effet de chambouler l'ordonnancement des créanciers. Une solution oeuvrant pour la sécurité juridique. La Cour de cassation adopte ici une solution qui favorise la sécurité juridique grâce à une « continuité des solutions » (D. 2010.Actu obs. [...]
[...] Il s'agirait en effet simplement d'appliquer l'article R. 622-19 dans sa version déjà applicable en l'espèce, le terme de procédure étant pris dans son sens large et incluant celles qui résultent d'une convention. Une solution engendrant la caducité de l'ensemble des procédures de distribution en cours dès ouverture de la procédure collective du vendeur. Une solution conforme à un traitement égalitaire des créanciers (antérieurs à l'ouverture de la procédure collective). En raison de l'importance de l'opération que constitue la vente d'un fonds de commerce, le législateur est intervenu pour l'encadrer. [...]
[...] En effet, que la mission des séquestres conventionnels recevant le prix de cession d'un fonds de commerce soit régie par l'article R. 622-19 du C.com appliqué avant ou après la modification de l'article L. 622-21 par l'ordonnance de 2008, elle prendra fin automatiquement par l'ouverture de la liquidation du vendeur. En outre, on assiste, avec cette solution, à une simplification du régime tenant à une indifférence quant à l'origine des procédures de distribution de fonds. La disparition de la distinction entre la procédure conventionnelle et la procédure judiciaire participe en effet à une meilleure lisibilité du droit. [...]
[...] L'article R. 622-19 du C.com fait entrer les procédures de distribution dans le domaine de la caducité à la double condition qu'elles soient en cours et ne fasse pas suite à une procédure d'exécution ayant produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture, « conformément au II de l'article L.622-21 ». Ces dispositions semblent claires : il n'y a pas de distinction expresse entre les différentes procédures de distribution du prix de vente d'un meuble. En outre, comme le fait remarquer l'avocat général, Mme Bonhomme, dans ses observations, « ce texte a remplacé l'article 65-1 du décret du 27 décembre 1985 qui disposait : « Les procédures d'ordre en cours lors du prononcé du jugement d'ouverture sont interrompues » ». [...]
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