cour de cassation, chambre commerciale, 18 juin 2002, opération de recapitalisation, coup d'accordéon
L'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 18 juin 2002 est relatif une fois encore à l'opération de recapitalisation nommé coup d'accordéon, confirmant des solutions acquises mais apportant une importante innovation en ce qu'il admet la licéité de cette pratique malgré l'absence du droit préférentiel de souscription.
En l'espèce, une société (L'Amy) endettée décide, dans le cadre d'une procédure de règlement amiable régie par la loi du 1er mars 1984, de sa restructuration et de sa reprise par une autre société (KLG). Un protocole d'accord a été conclu le 4 juillet 1994 entre les actionnaires majoritaires de la première société, les banques créancières et la seconde société. L'assemblée générale extraordinaire des actionnaires décide de réduire le capital social à zéro, d'annuler les actions existantes et d'augmenter ledit capital, avec suppression du droit préférentiel de souscription au profit de la seconde société du même secteur, la société KLG. Or, s'estimant exclus de manière illégitime, certains actionnaires minoritaires, directement et par l'intermédiaire de l'association ADAM, ont alors assigné la société l'Amy afin qu'elle soit condamnée à réparer le préjudice subi du fait de cette exclusion.
[...] La cour de cassation y a précédemment répondu à deux reprises sans y avoir répondu favorablement. Dans la décision du 10 octobre 2000, elle estime que l'intérêt commun des associés n'est pas atteint par la réduction de capital litigieuse et qui ne faisait que sanctionner leur obligation de contribuer aux pertes sociales proportionnellement à leurs apports. En l'espèce, la cour de cassation distingue implicitement l'intérêt commun des associés de l'intérêt social en observant que « la cour d'appel n'a pas déduit l'absence d'atteinte à l'intérêt commun des associés de considérations relatives au seul intérêt social » mais se garde de préciser l'entendue et l'application de cette notion. [...]
[...] L'opération peut être facultative ou quasi obligatoire. Dans la première hypothèse, il est tout de même le plus souvent imposé par les investisseurs. Dans la seconde hypothèse, l'augmentation de capital s'impose lorsque la réduction de capital a pour effet de le réduire au-dessous du minimum légal (SA et SCA) ou lorsqu'une réduction de capital à zéro est imposée par l'importance des pertes. En l'espèce, la société l'Amy est une SA et donc soumis à l'application de l'article L.224-2 précité. Néanmoins, cette opération conduit en fait à rendre de moindre valeur ou sans aucune valeur la participation des actionnaires, voire à les exclure totalement de la société. [...]
[...] Dans l'arrêt Usinor, la cour de cassation érige une condition de validité de l'opération « coup d'accordéon », par le faite que la réduction du capital de la société soit suivie d'une augmentation. Or, les anciens associés pouvaient bénéficier de cette augmentation dans le cadre de leur droit préférentiel de souscription, il n'était pas interdit de considérer ce droit comme un élément essentiel de la validité de l'opération. D'ailleurs, une décision rendue par l'ancienne commission des opérations de bourse considérait que le maintien du droit préférentiel de souscription était une condition « garante du respect de l'intangibilité du droit de propriété édicté par l'article 545 du code civil ». [...]
[...] Viandier qualifie cette distinction de « minimaliste ». L'opération de coup d'accordéon préserve selon la cour de cassation les intérêts de la société comme ceux de ses actionnaires. Sur ce point, la cour de cassation observe que nulle atteinte n'y a été porté car tous les actionnaires ont subi le même sort : tous, minoritaires et majoritaires ont perdu la qualité d'actionnaires. Par voie de conséquence, l'égalité des actionnaires a été respectée. Le respect de l'intérêt commun a eut pour effet d'exclure l'abus de majorité. [...]
[...] La suppression du droit préférentiel de souscription et l'absence d'atteinte de l'augmentation des engagements des actionnaires. Du point de vue de la licéité de l'opération de coup d'accordéon au regard de l'interdiction d'augmenter l'engagement des actionnaires sauf consentement voté à l'unanimité, conforme à l'article L225-96 et 1836 du code civil, engagerait de nombreuses opinions contradictoires sur l'assimilation de cette interdiction comme un droit de veto pour l'ensemble des actionnaires. L'arrêt d'espèce n'en fait guère allusion sauf que le moyen étant “nouveau et mélange de faite et de droit”, ce même moyen ayant été auparavant expressément écarté par la décision de 1994 et celle de 2000 lorsque la décision litigieuse n'avait pas impute des dettes aux actionnaires au-delà de leur montant de leurs souscriptions au sein du capital social. [...]
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