Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 29 juin 2010, imprévision
Le refus de la théorie de l'imprévision dégagé par la célèbre jurisprudence « du canal de Craponne » semble depuis quelque temps nuancé par de nouveaux arrêts, dont celui du 29 juin 2010, rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation qui illustre sûrement une nouvelle étape dans l'évolution de cette jurisprudence par sa solution originale.
Les contrats sont par principe soumis à une force obligatoire d'exécution des obligations. Seulement, il existe certains tempéraments à cette règle. En effet, le droit peut tenir compte de manière exceptionnelle des difficultés pour le débiteur d'exécuter ses obligations. Deux alternatives d'atténuations de la force obligatoire peuvent être envisagées, l'insolvabilité d'une part et l'imprévision d'autre part. Ce second procédé soulève cependant de vifs débats au sein de la doctrine et d'importantes hésitations quant à sa réception dans le droit positif français.
Le contenu de la théorie de l'imprévision réside dans l'idée qu'une révision judiciaire puisse intervenir afin de rééquilibrer les obligations d'un contrat à exécution successive, qui se seraient profondément modifiées au cours du temps et auraient donc altéré le contenu consenti lors de la conclusion du contrat. Or cette théorie est en totale contradiction avec le principe d'intangibilité des conventions qui interdit l'altération des obligations par une intervention extérieure au contrat.
[...] Bien que ces observations soient légitimes, il est important de remarquer que la réception concrète de la théorie dans notre droit se fait timidement. Ces solutions consacrant pour partie l'imprévision ne se font qu'avec parcimonie et prudence, comme cet arrêt de la chambre commerciale de 2010 qui n'a pas été publié au bulletin et donc pouvant dénoter une intention des magistrats de limiter leur décision à ce cas d'espèce. Pourtant il convient d'analyser cette décision pour ce qu'elle représente au niveau de l'évolution de la réception de la théorie de l'imprévision dans le droit des obligations. [...]
[...] Cependant dans cette espèce, l'originalité réside notamment dans la sanction de la réception de l'imprévision. Ainsi bien qu'il est audacieux de la part des juges d'atténuer le principe posé par la jurisprudence du canal de Craponne c'est surtout le remède apporté à ce déséquilibre qui illustre la particularité de la solution. La Cour de cassation considère que l'imprévision emporte la caducité du contrat et non sa révision. La solution à ce déséquilibre est donc la caducité pour l'avenir afin de mettre un terme à l'obligation litigieuse pour la société de maintenance. [...]
[...] Une autre observation s'impose quant à cette solution de la chambre commerciale, celle de la prise en compte de la lésion comme lésion de la convention. Cet arrêt apparaît très original de par son fondement que de par l'admission de l'imprévision dans la jurisprudence. Il soulève de vives interrogations sur la sécurité contractuelle et sur la légitimité de la décision des juges. Enfin dans une seconde partie nous nous attacherons à l'intérêt de cet arrêt en ce sens qu'il illustre une certaine réception de la théorie l'imprévision et tend à relancer la réflexion sur une consécration de la théorie par le législateur (II). [...]
[...] Les contrats sont par principe soumis à une force obligatoire d'exécution des obligations. Seulement, il existe certains tempéraments à cette règle. En effet, le droit peut tenir compte de manière exceptionnelle des difficultés pour le débiteur d'exécuter ses obligations. Deux alternatives d'atténuations de la force obligatoire peuvent être envisagées, l'insolvabilité d'une part et l'imprévision d'autre part. Ce second procédé soulève cependant de vifs débats au sein de la doctrine et d'importantes hésitations quant à sa réception dans le droit positif français. [...]
[...] Il faut attendre l'arrêt de la chambre commerciale du 24 novembre 1998 pour constater une réelle contradiction avec la jurisprudence traditionnelle. Cet arrêt réimpose une obligation de renégocier au motif d'une exécution de bonne foi. Malgré ce constat de l'émergence d'un mouvement en faveur de la réception de l'imprévision, il est nécessaire d'insister sur la timidité de cette nouvelle position. Effectivement, l'arrêt étudier de la chambre commerciale illustre cette prudence, il n'a pas été publié et il se borne à admettre la caducité de la convention pour imprévision à défaut de la révision judiciaire. [...]
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