Commentaire d'arrêt, Chambre Commerciale, Cour de Cassation, 29 juin 2010, conditions de validité, clause limitative de responsabilité
En l'espèce, les faits sont simples. Une société qui voulait se doter d'un logiciel de production et de gestion commerciale conclut un contrat de licence avec une société informatique. Le logiciel définitif n'étant pas encore au point, une solution temporaire fut mise en place : non seulement elle entraîna de nombreuses difficultés avec le passage à l'an 2000, mais la société informatique ne livra jamais la version définitive du logiciel. Le licencié cessa alors de régler ses redevances. Assigné en paiement de celles-ci, le licencié sollicita l'anéantissement de la convention assorti de dommages et intérêts.
[...] Ce qui inspire des sentiments mêlés : si l'on se satisfait de l'évocation de la contradiction il ne paraît pas que le manquement à l'obligation puisse être sans conséquences, pour peu qu'il soit précisément défini I. La contradiction de la portée de l'obligation essentielle Pour A. Le fondement de la contradiction. En affirmant seule est réputée non écrite la clause limitative de réparation qui contredit la portée de l'obligation essentielle souscrite par le débiteur la décision évoque par évidence le premier des arrêts Chronopost (Cass. com oct. 1996). [...]
[...] La consécration de la faute lourde, distincte du manquement à une obligation essentielle. La Cour de cassation semble prête à ignorer totalement le manquement à l'obligation essentielle. Ainsi, alors même qu'il était en l'espèce avéré, et cependant que le demandeur au pourvoi l'invitait à en déduire l'inapplication de la clause, la Haute juridiction affirme, solennelle et restrictive que seule est réputée non écrite la clause limitative de réparation qui contredit la portée de l'obligation essentielle souscrite par le débiteur Et d'ajouter, afin de répondre à l'argumentation prétendant que le manquement à une telle obligation équivallait à une faute lourde, que cette dernière ne peut résulter du seul manquement à une obligation contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du comportement du débiteur L'affirmation selon laquelle le manquement à l'obligation essentielle ne constitue pas une faute lourde n'est pas nouvelle(Cass. [...]
[...] La messe n'était pourtant pas dite : la cour de renvoi refusa de se convertir à la religion de la chambre commerciale (CA Paris nov. 2008). Tout en admettant que le défaut de livraison du logiciel constituait un manquement à l'obligation essentielle, elle estima que la clause limitative de réparation, librement négociée et acceptée par le licencié, n'avait pas pour effet de décharger par avance le concédant du manquement à une obligation essentielle lui incombant ou de vider de toute substance cette obligation, mais seulement de fixer un plafond d'indemnisation, lequel n'était pas dérisoire. [...]
[...] Reste que l'indépendance de la faute lourde et de l'obligation essentielle n'est rien moins qu'évidente. La généalogie atteste de ce que l'obligation essentielle n'est pas autre chose qu'un avatar de la faute lourde. Il est donc d'autant plus difficile de comprendre pourquoi le manquement à l'obligation essentielle ne conduirait pas aux mêmes conséquences que la faute lourde, d'autant que ces notions servent une unique finalité. Strictement entendu comme un comportement contradictoire du contrat, le manquement à l'obligation essentielle doit nécessairement déboucher, si ce n'est sur la nullité de la clause, au moins sur son inapplication c'est-à-dire sur une fin de non-recevoir opposée à celui qui se prévaut de la clause limitative de responsabilité. [...]
[...] Ainsi, si la faute lourde permet de faire échec aux différentes clauses du contrat, il n'en est pas de même pour le manquement à une obligation essentielle qui se retrouve alors bien peu considérée. Faut-il déduire du mépris affiché par l'arrêt commenté à l'endroit du manquement à l'obligation essentielle que celui-ci n'aurait désormais plus jamais pouvoir de figer les clauses d'indemnisation ? Une telle solution serait excessive. B. Une solution quelque peu critiquable, a nuancer. L'obligation essentielle est certes une notion vaporeuse et incertaine. Elle est trop souvent opportunément découverte par un juge désireux de protéger une partie supposément faible des effets d'une clause prétendument excessive. [...]
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