Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 28 juin 2011, intérêt collectif des créanciers
Dans un arrêt rendu le 28 juin 2011 par la Chambre commerciale, la Cour de cassation a affirmé l'opposabilité de la déclaration d'insaisissabilité frappant un immeuble dont est propriétaire le débiteur à l'égard du liquidateur judiciaire dans les conditions définies par le Code de commerce.
En l'espèce, un couple marié sous le régime de la communauté est propriétaire d'un immeuble sur lequel l'époux a effectué une déclaration d'insaisissabilité le 30 avril 2005. Ce même époux est mis en liquidation judiciaire le 2 mai 2006, un liquidateur judiciaire ayant auparavant été désigné. Le juge-commissaire a autorisé, par une ordonnance du 19 juin 2007, le liquidateur judiciaire à poursuivre la vente aux enchères de l'immeuble en question.
Par un jugement du 27 novembre 2008, le tribunal a déclaré nulle et sans effet l'ordonnance. Le liquidateur interjette appel le 17 décembre 2008, de même que le ministère public le 25 février 2009. Un pourvoi en cassation est ensuite formé.
[...] Par conséquent, il invite à s'interroger sur la légitimité d'une telle protection dont bénéficie le débiteur s'agissant de l'immeuble visée par une telle mesure d'insaisissabilité à l'égard des créanciers antérieurs à la publication d'une telle déclaration mais également s'agissant de l'impact sur l'autorité dont sont revêtus les organes de la procédure collective. L'insaisissabilité frappant un immeuble appartenant au débiteur constitue-t-elle une dérogation absolue au principe de dessaisissement du débiteur mis en liquidation judiciaire ? La solution retenue par la Cour de Cassation nécessite de déterminer si la déclaration d'insaisissabilité qui exclut le droit de poursuite des créanciers sur l'immeuble qui en fait l'objet constitue une atteinte réelle au dessaisissement du débiteur dans le cadre de la liquidation judiciaire et ainsi, confère à l'insaisissabilité une efficacité réelle pour le débiteur qui s'en prévaut vis-à-vis du liquidateur représentant les intérêts des créanciers, la notion d'intérêt collectif étant précisée par la Cour de Cassation dans son arrêt. [...]
[...] La décision de la Cour de Cassation reste fidèle à l'esprit de la loi qui est d'assurer le minimum vital au débiteur, d'où la nécessité de donner une réelle force à la déclaration d'insaisissabilité. La mise en valeur de cette disposition par la Haute juridiction est justifiée par le fait que le débiteur est une personne physique donc poursuivi sur son patrimoine personne ce qui justifie, du fait de sa plus grand vulnérabilité, qu'il dispose de la garantie de conserver la partie essentielle de son patrimoine, à savoir le logement. [...]
[...] Droit commercial L'intérêt collectif des créanciers Commentaire d'arrêt : Cass. Com juin 2011 Dans un arrêt rendu le 28 juin 2011 par la Chambre commerciale, la Cour de cassation a affirmé l'opposabilité de la déclaration d'insaisissabilité frappant un immeuble dont est propriétaire le débiteur à l'égard du liquidateur judiciaire dans les conditions définies par le Code de commerce. En l'espèce, un couple marié sous le régime de la communauté est propriétaire d'un immeuble sur lequel l'époux a effectué une déclaration d'insaisissabilité le 30 avril 2005. [...]
[...] L'atteinte relative au principe de dessaisissement du débiteur L'attribution d'une portée réelle à l'insaisissabilité La justification délicate de l'existence de l'insaisissabilité Suite à la loi de 2003 qui a instauré l'insaisissabilité, la doctrine remettait en question la portée réelle de la déclaration d'insaisissabilité au regard du principe de dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire consacré par l'article L. 641-0 du code de commerce. Selon une théorie développée par certains auteurs, les créanciers extraprofessionnels du débiteur pouvaient provoquer la vente de l'immeuble afin d'obtenir paiement de leur créance. D'autres, au contraire, défendaient une position proche de celle mise en exergue dans l'arrêt étudié. L'aspect dérogatoire de la déclaration d'insaisissabilité L'arrêt du 28 juin 2011 consacre le caractère dérogatoire de l'article L. [...]
[...] Ainsi, au-delà du caractère contestable de la justification de la solution, on constate une égalité au moins apparente du traitement des créanciers qui voient leur droit de gage réduit. L'ambigüité de la notion d'intérêt collectif des créanciers La notion d'intérêt collectif est donc mis à mal par cet arrêt. En effet, alors que la jurisprudence antérieure de la Cour de Cassation avait compris l'intérêt collectif des créanciers comme la somme des intérêts individuels, l'arrêt vient contredire cette position en empêchant le liquidateur de satisfaire une partie des créanciers, à savoir ceux dont la créance est née antérieurement à la déclaration d'insaisissabilité. [...]
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