Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 23 septembre 2003, faute grave, agent commercial, rupture de contrat
Voila un arrêt rendu par la Chambre commercial de la Cour de cassation du 23 septembre 2003, se prononçant sur une notion fondamentale, qui est la faute grave de l'agent commercial. Plus précisément, elle affirme la nécessité d'établir un lien de causalité direct entre la faute grave et la rupture du contrat, pour que celle-ci soit justifiée et exempte de toute indemnité de cessation.
En l'espèce, il s'agissait, de deux agents commerciaux (MY et M X) qui avaient assigné leur mandant (société Eurelco) en justice en vue d'obtenir une indemnité compensatrice du préjudice subit suite à la rupture de leur contrat par ce dernier. Une demande reconventionnelle a été formée en vue d'obtenir une résiliation judiciaire aux torts des agents commerciaux et le versement de dommages et intérêts, du solde débiteur de leur compte et d'un trop perçu de commissions.
Les juges de la Cour d'appel ont rejeté cette demande et condamné la société Eurelco à payer 10 000 euros à titre de dommages et intérêts et des indemnités de préavis. Cette décision est motivée par le refus de la part des juges du fond de caractériser la faute grave ainsi que de prendre en compte les initiatives prises par les agents commerciaux dans la rupture du contrat, en raison de leur intervention postérieurement à la consommation effective de la rupture.
[...] Un pourvoi a été formé devant la chambre commerciale de la cour de cassation, s'appuyant sur l'article 132-12 du code de commerce indiquant la remise an cause de l'indemnité de cessation dans le cas ou la rupture a été causée par une faute grave de l'agent ou par l'initiative de celui-ci. Les deux moyens invoqués ont soulevé l'existence d'une faute grave et une prise d'initiative des agents, en raison de leur absence aux sièges et aux réunions, ainsi que l'attitude de règlement de compte qu'ils avaient adoptés et du fait qu'ils étaient entrés en contact avec la concurrence à l'insu de leur mandat. [...]
[...] Cette définition s'explique par le type de contrat passé entre l'agent commercial et le mandant, qui est un contrat d'intérêt commun. L'objet de ce contrat est de maintenir, voire développer une part de marché dont la valeur est commune au mandant et au mandataire . Cependant, la faute grave répond à une définition plus subtile et qui peut varier d'une juridiction à l'autre. En effet, dans une décision de la cour de cassation du 30 novembre 2004, il a été jugé que le manquement de l'agent commercial à son devoir d'information et à son devoir de loyauté envers son mandant était constitutif d'une faute grave, alors que dans une affaire du 13 mai 2003, la cour d'appel de Rennes a déclaré que le refus de l'agent commercial de communiquer à son mandant l'inventaire de son stock de produits et de se rendre à un rendez-vous fixé par le mandant n'était pas constitutif d'une faute grave. [...]
[...] Un critère temporel déterminant à l'appréciation complexe de la faute grave synonyme de protection de l'agent. La cour de cassation s'intéresse à la faute grave qui est difficile à cerner mais déterminante au régime protecteur des agents commerciaux Une faute grave qu'elle ne va pas caractériser en l'espèce, en raison de son absence au moment de la consommation effective de la rupture Une notion de faute grave complexe, fondamentale au régime protecteur de l'agent commercial. La cour de cassation dans cet arrêt se trouve confronté à deux moyens qui ont pour objet principal, la détermination de l'existence d'une faute grave des agents commerciaux. [...]
[...] La réparation consiste, en une indemnité que les juges de la cour de cassation refusent de proportionner à la faute commise par les agents commerciaux Cette décision révèle plus généralement une confusion entre deux notions celle de la faute grave et de l'initiative l'impossibilité d'une indemnité proportionnée à la faute des agents La cour de cassation décide de casser l'arrêt en se fondant sur les articles L 134-12 et L134-13 disposant d'une obligation pour le mandant de verser une indemnité compensatrice du préjudice subit, au bénéfice du mandataire. Cette indemnité se calcul en se fondant généralement sur le remboursement de deux ans de commission qu'aurait dû percevoir l'agent. [...]
[...] L'absence de lien de causalité entre la faute grave des agents et la rupture. La cour de cassation décide donc de confirmer la décision des juges du fond indiquant que les agents « ont commis des fautes, mais qui ne revêtent pas le caractère de gravité, de nature à leur faire perdre tout droit à réparation ». L'absence au siège et aux réunions, l'attitude de règlement de comptes et les contacts avec la concurrence sont considérés comme des fautes qui ne sont pas suffisamment grave, pour supprimer le droit à indemnité des agents commerciaux. [...]
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