Responsabilité solidaire loueur du fonds de commerce, liquidateur judiciaire
La recevabilité de l'action en responsabilité solidaire du loueur de fonds de commerce exercée par le liquidateur avait fait l'objet d'une controverse jurisprudentielle dans la jurisprudence antérieure, la Cour de cassation se prononce clairement en faveur d'une protection accrue des droits des créanciers dans l'arrêt rendu le 9 novembre 2004.
Un loueur de fonds de commerce avait donné en location-gérance un fonds de commerce de café restaurant par acte du 14 janvier 1989 à un locataire-gérant. Le locataire-gérant a été mis en redressement puis liquidation judiciaire le 29 septembre et 8 décembre 1989. Le liquidateur a demandé la condamnation du loueur du fonds de commerce sur le fondement de l'article L 144-7 du Code de commerce.
La Cour d'appel de Bordeaux en date du 15 mai 2001 a déclaré irrecevable la demande du liquidateur concernant la condamnation du loueur au paiement des dettes contractées par le locataire-gérant à l'occasion de l'exploitation du fonds de commerce. Le liquidateur a alors formé un pourvoi en cassation, il invoque un moyen subdivisé en deux branches.
D'une part, le liquidateur invoque une violation par la cour d'appel des articles L 144-7 et L 621-39 du Code de commerce. Il considère qu'il est recevable à exercer l'action tendant à voir le loueur du fonds de commerce à payer le passif de la liquidation résultant des dettes contractées à l'occasion de l'exploitation du fonds par le locataire gérant dès lors qu'il s'agit d'une action exercée au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers du locataire-gérant en liquidation judiciaire.
[...] Par conséquent, le liquidateur ne peut exercer ce type d'action. La solution rendue par la chambre commerciale de la cour de cassation vient en substance délimiter de manière stricte le champ des actions qui peuvent être intentées par le liquidateur dans le cadre de la liquidation judiciaire Cette délimitation prend la forme d'un revirement de jurisprudence qui tend à harmoniser une position jurisprudentielle qui était jusqu'alors incertaine, s'accordant ainsi avec les attentes de la doctrine et l'exigence d'une protection accrue des droits des créanciers (II). [...]
[...] Néanmoins, la solution posée dans l'arrêt du 9 novembre 2004 comporte un intérêt important puisqu'elle s'inscrit dans un contexte jurisprudentiel incertain né d'un arrêt rendu le 8 juillet 2003 par la chambre commerciale. La réitération ferme du principe selon lequel le liquidateur dans le cadre de la liquidation judiciaire ne peut agir que dans l'intérêt collectif des créanciers, un tel intérêt ne s'entendant pas de l'intérêt d'un groupe, ainsi que l'application stricte des conditions posées par l'article L 144-7, conduit la cour de cassation dans l'arrêt du 9 novembre 2004 a effectuer un revirement de jurisprudence. [...]
[...] Or dans le cadre de la liquidation judiciaire du débiteur, ce type de créanciers ne constitue pas tous les créanciers dans leur ensemble puisqu'il faut tenir compte également des créanciers qui détiendraient une créance dont l'origine serait étrangère à l'exploitation du fonds. Dès lors, la cour de cassation retient une conception stricte de la notion « d'intérêt collectif des créanciers » car l'intérêt d'un groupe de créanciers n'est pas suffisant à caractériser « l'intérêt collectif ». Elle précise bien que l'intérêt d'un groupe de créanciers équivaut à un intérêt personnel, peu importe que les créanciers soient plusieurs. [...]
[...] Ce revirement tend à clarifier la position de la cour de cassation concernant la recevabilité de l'action en responsabilité solidaire du loueur de fonds de commerce exercée par le représentant des créanciers. II) Une position jurisprudentielle harmonisée en accord avec les attentes de la doctrine et la protection des droits des créanciers : La position de la cour de cassation dans l'arrêt du 9 novembre 2004 vient clarifier un point de droit qui avait fait l'objet d'une solution différente et controversée dans sa jurisprudence antérieure. [...]
[...] En effet, en 1993 la Cour de cassation avait rendu un arrêt qui était le premier d'une longue série qui avait analysé le monopole légal conféré au représentant des créanciers pour agir au nom et dans l'intérêt des collectif des créanciers comme la vocation de ce dernier à n'agir que « dans l'intérêt de tous et non dans l'intérêt personnel d'un créancier ou d'un groupe de créanciers » (Com mars 1993). Cette jurisprudence avait d'ailleurs été réitérée dans un arrêt plus récent en date du 7 janvier 2003 par lequel la Cour de cassation, au nom du caractère essentiellement collectif de la mission de défense des intérêts des créanciers du représentant des créanciers ou du liquidateur avait refusé au mandataire tout pouvoir d'agir dans l'intérêt exclusif d'un créancier. Le mandataire avait été condamné civilement pour avoir tenté de sauver de l'extinction la créance non déclarée d'une banque (Com janvier 2003). [...]
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