Complice, infraction, circonstances aggravantes, caution, emprunt de pénalité
« Auteur et complice sont cousus dans le même sac ». Si cette citation de Jean Carbonnier est désuète, la chambre criminelle du 7 septembre 2005 se positionne dans ce sens en remettant en cause le principe posé en droit positif.
Un gérant d'une société a demandé un prêt à une autre société. Le prêt fut dressé par un notaire dans lequel il a annexé un procès verbal d'assemblée générale extraordinaire de la société autorisant son gérant a souscrire l'emprunt daté du 30 octobre 2002, signé par le gérant ainsi que des procurations aux fin de caution signée par les associés. La société ayant consentie le prêt a assigné le frère du gérant, associé. Le frère conteste avoir signé en connaissance de cause la procurations aux fins de caution.
[...] Le magistrat instructeur a constaté l'extinction de l'action publique à l'égard du notaire, décédé au cours de l'information et du gérant complice en retenant la prescription puisque les faits avaient été commis le 10 novembre 1992, c'est-à-dire plus de trois ans avant le dépôt de la plainte par la partie civile. La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris confirme la position adoptée par l'ordonnance, dans un arrêt en date du 5 mai 2004, et elle affirme que les causes d'aggravation ou d'atténuation de la peine procédant de la personne de l'auteur de l'infraction sont sans effet sur le complice. [...]
[...] Ainsi, bien que le complice en l'espèce soit une personne privée, il encourt les peines applicables au faux commis par un notaire et non les peines applicables au faux commis par une personne privée, ce qui paraît aberrant à la lecture du texte de l'article 121-6 du Code pénal. Michel Veron explique que cette décision, qui concerne l'effet d'une circonstance mixte touchant à la fois à la personne de l'auteur principal et à la matérialité de l'acte poursuivi, confirme la jurisprudence antérieure qui a toujours eu tendance à en étendre l'effet au complice Alors que l'on pensait cette circonstance aggravante mixte disparue, la chambre criminelle l'a fait réapparaitre. L'usage des circonstances aggravantes mixtes va s'expliquer au regard de la prescription de l'action civile. [...]
[...] ) plus de trois ans avant le dépôt de la plainte par la partie civile La chambre de l'instruction, après avoir requalifié les faits rajoute que les causes d'aggravation ou d'atténuation de la peine procédant à la personne de l'auteur de l'infraction sont sans effet sur le complice C'est alors que la chambre criminelle censure cette position en affirmant le principe de l'emprunt de pénalité pour expliquer que l'article 414-4 du Code pénal punit de la réclusion criminelle le faux en écritures publiques ou authentiques commis par une personne chargée d'une mission de service public agissant dans l'exercice de sa mission ( . ) la prescription de l'action publique n'était pas acquise à l'égard du complice lors du dépôt de la plainte Ainsi, la chambre criminelle applique les peines applicables à l'auteur principal de l'infraction au complice dans le but de pouvoir condamner le complice. De ce fait, la chambre criminelle va aller dans le sens des victimes pour que celles ci obtiennent justice. [...]
[...] Cette position adoptée par la chambre criminelle remet en question le texte de l'article 121-6 du Code pénal. La chambre criminelle va alors revenir sur une notion abandonnée, le principe de l'emprunt de pénalité Le retour au principe de l'emprunt de pénalité Pour que la complicité d'un crime ou d'un délit soit applicable au sens de l'article 121-7 du Code pénal, il faut qu'un individu ait sciemment facilité la préparation par aide, assistance, dons, promesses, menaces, ordres, abus d'autorité ou de pouvoir. [...]
[...] Dès lors, cette solution s'explique par l'opportunisme de la situation. En choisissant d'appliquer l'emprunt de pénalité et les circonstances aggravantes mixtes, la chambre criminelle permet ainsi l'abolition de la prescription de l'action publique et de ce fait permet la poursuite du gérant. Yves Monnet, Gazette du Palais mars 2006 84, P Emmanuel Dreyer, Dalloz 2006, n°12 [iii] Emmanuel Dreyer, Dalloz 2006, n°12 Emmanuel Dreyer, Dalloz 2006, n°12 Michel Veron, Droit pénal 12, Décembre 2005, comm. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture