Discours natalistes, famille élargie, syndrome « Tanguy», famille patriarcale, mariages arrangés, syndrome de l'enfant-roi, éclatement de la cellule familiale., manque d'autorité paternelle
En Europe, et plus particulièrement en 1968, la famille fut fortement contestée : beaucoup d'intellectuels connus poussèrent alors les jeunes à « secouer leurs chaînes » en expliquant que l'institution familiale était fondamentalement réactionnaire et répressive, ce que prouvait d'ailleurs la devise du régime de Vichy, « Travail, Famille, Patrie ». Pourtant, trois décennies plus tard, la famille est la « valeur » la plus prisée des français. Il serait fort imprudent d'en déduire que la famille actuelle joue toujours le même rôle social qu'auparavant et, plus encore, qu'elle a toujours le même statut institutionnel
[...] En effet, il n'empêche que la famille n'a pas davantage échappé aux bouleversements de l'histoire que les autres institutions sociales, au point d'ailleurs que l'on peut se demander si derrière la permanence trompeuse du mot famille ne se cachent pas désormais des modèles familiaux irréductibles les uns aux autres et donc des familles qui jouent en faveur de l'ordre social et d'autres qui compliquent singulièrement la tâche des dirigeants politiques. Après avoir d'abord montré ce qui oppose fondamentalement la famille traditionnelle et la famille moderne, nous tenterons d'analyser les formes d'un surprenant renversement de situation: alors que la famille, pendant des siècles, avait été en mesure de soutenir la société, aujourd'hui, c'est souvent à la société de pallier les carences de la famille. Néanmoins, comme nous le verrons, la société ne peut pas désespérer des familles qui restent des partenaires obligés de l'Etat. I. [...]
[...] Ainsi, ce qui vaut pour la France vaut pour tous les pays occidentaux: c'est d'abord au sein de la famille que l'enfant se socialise et toute défaillance des parents a nécessairement des conséquences que la société doit ensuite essayer de gérer. Ainsi, les enseignants, de plus en plus confrontés à l'incivilité des enfants, quand ce n'est pas à leur violence, dénoncent le laxisme et la démission des parents. Les juges, les assistantes sociales, les éducateurs judiciaires sont également obligés de rappeler aux parents l'existence des devoirs élémentaires et des lois. [...]
[...] Ce n'est pas sans raison que le manque d'autorité paternelle est parfois dénoncé dans les médias lors de délits impliquant des mineurs. Même les pères attentifs et responsables, de peur d'apparaître répressifs et de troubler le bonheur familial, préfèrent parfois être les amis de leurs propres enfants, ce que montrent à l'envi les séries télévisuelles les plus normatives. Il serait pourtant totalement vain d'accabler les familles et dangereux de ne plus les considérer comme des partenaires précieux de l'Etat: et, de fait, bien que la continuité entre la famille et la société globale n'aille plus de soi, les dirigeants politiques occidentaux ont bien compris qu'ils ne pouvaient faire l'économie d'une politique familiale intelligente et adaptée. [...]
[...] La famille n'a pas fini de muter. Etant donné l'implosion des familles (la façade est restée en place mais à l'intérieur, pour reprendre le titre d'un essai d'Evelyne Sullerot, c'est le grand remue-ménage»), nos dirigeants politiques se doivent d'être particulièrement vigilants: c'est une gageure que de vouloir durablement concilier l'instabilité des familles et la stabilité de la société. Les enjeux sont tellement évidents que tout débat parlementaire concernant la famille déchaîne systématiquement les passions. Le conservatisme est nécessairement inefficace dans la mesure où il revient à ignorer l'irrévocable évolution des mœurs. [...]
[...] Devoirs à la maison il y a d'ailleurs comme une contradiction dans les termes: le temps familial celui de la fin de journée ou du week- end, n'est-il pas désormais un temps où on peut enfin échapper aux contraintes sociales? On comprend, dans ces conditions, que les grands enfants eux-mêmes, à la surprise des générations anciennes, diffèrent exagérément leur départ définitif du foyer parental. Autrefois lieu de dressage» social la famille est devenue à la fois un espace de liberté et un cocon, un lieu qu'on aimerait se représenter hors de la société, comme tous les lieux utopiques. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture