Droit de la famille, erreur, qualités essentielles, personne, divorce, nullité
Le 13 décembre 2005, la première chambre civile de la Cour de cassation rend un arrêt de rejet concernant la demande d'une femme de faire annuler son mariage en raison d'une liaison adultère qu'entretenait son mari avant leur union.
Le 11 décembre 1995, un couple se marie. Le soir même de son mariage, l'épouse découvre que son mari entretenait une liaison avec une femme mariée depuis plusieurs années.
Etant très pratiquante -son mari aussi- l'épouse avance qu'elle n'aurait pas consenti au mariage si elle avait été au courant de la liaison qu'entretenait son mari.
S'appuyant sur l'article 180 alinéa 2 du Code civil, qui dispose que : « S'il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage », la femme demande l'annulation de son mariage.
Le 20 décembre 2001, la Cour d'appel déboute la femme de sa demande. L'épouse forme alors un pourvoi en cassation.
Selon elle, l'erreur sur les qualités essentielles de la personne doit s'apprécier d'après des considérations religieuses ou philosophiques susceptibles de déterminer le consentement de l'autre partie.
La Cour d'appel, en refusant de prononcer la nullité du mariage au motif que « la liaison adultérine cachée [...] n'avait pas pu caractériser une erreur déterminante du consentement [de la femme] », a privé sa décision de base légale au regard de l'article 180 du Code civil.
De plus, en affirmant que la femme ne prouve pas que son mari ait eu l'intention de poursuivre sa relation adultérine après son mariage, sans chercher à savoir si les agissements de l'époux étaient contraires aux principes de loyauté et fidélité entre époux, la Cour n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 180 du Code civil.
Peut-on prononcer la nullité d'un mariage pour erreur sur les qualités essentielles de la personne, au motif que l'un des époux a dissimulé une liaison entretenue avant le mariage ?
Pour déclarer nul un mariage pour erreur sur les qualités essentielles de la personne, deux conditions s'imposent. D'une part, il faut que la qualité ayant entrainé l'action en nullité, soit considérée comme étant essentielle au commun des mortels.
D'autre part, l'erreur commise doit avoir été déterminante pour la personne concernée.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par l'épouse.
En l'espèce, l'époux ne nie pas avoir entretenu une liaison avec une femme mariée avant que lui-même ne se marie mais puisque rien ne prouve qu'il avait l'intention de poursuivre la relation, il n'y a pas lieu de parler d'erreur sur les qualités essentielles de la personne.
De plus, la femme ne prouve pas le rôle central exercé par ses convictions religieuses. En effet, elle ne prouve pas que si elle avait eu connaissance de la relation qu'avait entretenue son mari, elle n'aurait pas contracté mariage.
Pour que la nullité d'un mariage puisse être prononcée pour erreur sur les qualités essentielles de la personne, deux conditions sine qua non sont à remplir (I). Ceci n'étant pas le cas en l'espèce, la nullité ne pouvait être prononcée et la femme aurait plutôt du demander le divorce (II).
[...] ] tel est particulièrement le cas quand le mensonge prétendu aurait porté sur la vie sentimentale passée de la future épouse ». On comprend ainsi que le mensonge dénoncé par la femme, en l'espèce, n'est pas susceptible d'être considéré comme étant une erreur sur les qualités essentielles de la personne. D'autant plus qu'aucun élément ne prouve que le mari avait l'intention de poursuivre sa relation. La qualité sur laquelle porte l'erreur ne doit pas uniquement être objectivement essentielle, elle doit aussi l'être subjectivement à l'égard de la victime. [...]
[...] En effet, puisqu'il existe un devoir de fidélité entre les époux (article 212 du Code civil), le non respect de ce principe peut constituer une faute entraînant une demande de divorce de la part de l'époux trompé. Le divorce pour faute est inscrit à l'article 242 du Code civil résultant de la loi du 26 mai 2004 qui a pour objet de simplifier les procédures de divorce Il dispose que : « Le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. [...]
[...] Pour cela, deux solutions sont possibles : la demande en nullité ou la demande de divorce. Mais puisque la situation ne répond pas aux critères exigés afin de déclarer nul le mariage, le divorce semble la seule réelle issue. Pour engager une quelconque action en demande de divorce, lorsqu'elle a découvert la relation dissimulée de son mari, la femme aurait eu à prouver que son mari était dans l'intention de poursuivre sa liaison. La liaison serait donc devenue adultère et l'épouse aurait pu demander divorce pour faute. [...]
[...] Le 11 décembre 1995, un couple se marie. Le soir même de son mariage, l'épouse découvre que son mari entretenait une liaison avec une femme mariée depuis plusieurs années. Etant très pratiquante –son mari aussi- l'épouse avance qu'elle n'aurait pas consenti au mariage si elle avait été au courant de la liaison qu'entretenait son mari. S'appuyant sur l'article 180 alinéa 2 du Code civil, qui dispose que : « S'il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage », la femme demande l'annulation de son mariage. [...]
[...] Les deux critères nécessaires à la qualification d'une erreur comme étant «essentielle à la personne » L'erreur sur les qualités essentielles de la personne doit s'apprécier à deux points de vue : d'une part, la qualité doit être jugée comme étant « objectivement essentielle » et d'autre part, elle doit également être qualifiée de « subjectivement essentielle » L'indispensable désignation de la qualité mise en cause, comme étant « objectivement essentielle » Avant la loi du 11 juillet 1975 réformant le divorce, le droit français n'admettait comme cause de nullité que l' « erreur dans la personne » consacrée à l'article 180 du Code civil. La loi de 1975 a admis l' « erreur sur les qualités essentielles de la personne ». [...]
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