préjudice moral, indemnisation, réputation, société commerciale, activité concurrentielle
Le préjudice moral qui atteint la personne dans son affection, dans son honneur ou dans sa réputation est indemnisable. Par un arrêt du 15 mai 2012, la Cour de cassation tranche sur la question de l'indemnisation du préjudice moral subi par une société commerciale, et délimite ainsi l'étendue de la notion de réparation d'un préjudice moral.
En effet, en l'espèce, deux gérants d'une société ont cédé la totalité des parts de cette société à un tiers agissant pour le compte d'une autre société. Une convention de cession incluant une clause de non-concurrence avait été prévue. La société qui a acheté les parts reproche à la société qui avait cédé les parts une activité concurrentielle alors qu'une clause l'interdisait; elle a donc assigné la société cédante en vue d'obtenir des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice, que l'on suppose économique, mais aussi moral.
[...] B.Un principe réitéré par la Cour de cassation. Bien que la décision ait l'air nouvelle, elle ne constitue pas un revirement de jurisprudence ou une décision totalement nouvelle. Cet arrêt du 15 mai 2012 s'inscrit en effet dans le cadre de décisions ayant déjà reconnu que les personnes morales, à la manière des personnes physiques, peuvent invoquer un préjudice moral et être indemnisées. Un arrêt du 11 janvier 2005 de la Chambre commerciale de la Cour de cassation avait retenu qu'un société mère avait subi un préjudice moral du fait de la rupture des concours bancaires dont bénéficiait une autre société. [...]
[...] Le préjudice subi par cette inexécution doit donc être réparé. Bien que l'article 1147 doit appliqué strictement par la Cour de cassation, il n'en va pas de même pour les autres fondements de la décision, à savoir, les articles 1382 et 1383 du Code civil. B. Des fondements appliqués traditionnellement aux personnes physiques et étendus aux personnes morales. La décision de la Cour de cassation s'appuie également sur l'article 1382 du Code civil, qui dispose que "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer." Il convient d'observer que l'article 1382 est traditionnellement appliqué aux personnes physiques; la jurisprudence est très claire sur ce point. [...]
[...] Cette décision consacre nettement le principe, qui se trouve affirmé avec plus de vigueur qu'au sein de la jurisprudence antérieure. Nous pouvons supposer qu'il sera appliqué postérieurement, ce qui constitue une bonne opportunité pour les sociétés commerciales, qui pourront obtenir des indemnités en cas de violation d'un contrat pour réparer le préjudice économique subi, mais elles pourront également invoquer un préjudice moral en vue d'obtenir des dommages-intérêts supplémentaires. Les intérêts pécuniaires sont nettement dégagés par cette jurisprudence de la Cour de cassation, qui pourra peut- être être sujette à controverses. [...]
[...] Une étendue du principe de réparation du préjudice moral appliqué traditionnellement aux personnes physiques aux personnes morales. La Cour de cassation,afin d'étendre la réparation du préjudice moral aux personnes morales, fait une application stricte de l'article 1147 du Code civil puis étend l'application des articles 1382 et 1383 du Code civil, qui s'appliquent traditionnellement aux personnes physiques, aux personnes morales A. Une application stricte de l'article 1147 du Code civil. L'article 1147 du Code civil, qui dispose que "Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part." est appliqué strictement par la Cour de cassation; en effet, en l'espèce, la société qui a cédé la totalité de ses parts à une autre société, s'était engagée, par convention de cession incluant une clause de non-concurrence, à ne pas faire de concurrence déloyale à la société qui a acquis ces parts. [...]
[...] Pour une personne physique, le préjudice moral peut correspondre à une atteinte à ses sentiments,mais pour une personne morale, notamment une société, le préjudice moral ne peut évidemment pas répondre à cette définition. Il s'agit en fait d'une atteinte à son image ou à sa réputation. En l'espèce, la concurrence déloyale subie par la société qui a acquis les parts cause un préjudice économique : des indemnités sont accordées par la Cour d'appel qui avait eu à statuer sur l'affaire le 12 juillet 2010; la Cour d'appel n'avait en revanche pas admis une indemnité au titre du préjudice moral que la société a subi du fait de la violation de la clause de non-concurrence. [...]
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