La révision de la constitution : les paradoxes d'une évolution
Par Raymond FERRETTI
Maître de conférences de droit public à l'Université de Metz
Avec l'instauration du quinquennat, la Constitution a connu sa quinzième révision. Mais celle-ci se différencie assez nettement des autres puisque bien que mise en ?uvre dans le cadre de l'article 89, elle a débouché pour la première fois sur un référendum et non pas sur le Congrès. Ainsi, non seulement la révision se banalise mais de plus elle se normalise.
[...] Celui-ci devait adopter la loi constitutionnelle réformant le Conseil Supérieur de la Magistrature. Là encore, devant les risques de défection d'une partie importante de l'opposition le Président a du se résoudre à revenir sur sa décision. La convocation du Congrès fut annulée le 18 janvier 2000. Le Président peut donc voir sa décision contrée par le Parlement, mais une étape supplémentaire a été franchie dans la marginalisation présidentielle. B Une décision de plus en plus imposée au Président de la République En période de cohabitation, " l'impulsion ne vient plus du Président qui se trouve réduit à un combat d'arrière-garde, quand il n'est pas entraîné plus loin qu'il n'aurait voulu " ce constat de Benoît Jeanneau souligne l'évolution assez paradoxale de la fonction présidentielle en ce domaine. [...]
[...] Mais ce ne sont là que quelques paradoxes. Parmi ceux-ci deux doivent être soulignés. D'abord, on passe d'une révision exceptionnelle à une révision beaucoup plus ordinaire Ensuite, on passe d'une révision qui était imposée par le Président de la République à une révision qui est imposée au Président (II). I D'une révision exceptionnelle à une révision ordinaire : la banalisation de la révision Dans ses débuts la Ve République a peu révisé la Constitution et quand elle l'a fait c'est par le biais de procédures exceptionnelles. [...]
[...] Dans ces conditions, le référendum qui nécessairement aurait suivi se serait transformé en un échec pour le Président alors qu'en récupérant la réforme et en la portant à son compte il transformait le référendum, que cette fois- ci il avait décidé en une victoire. ? Désormais, la révision s'est banalisée non pas tant, en terme quantitatif, que dans son esprit. La révision n'est plus en effet cette procédure présidentielle qui permettait au chef de l'Etat d'en retirer les bénéfices politiques. Elle est devenue une procédure purement technique qui permet simplement d'opérer quelques modifications du texte constitutionnel. En cela elle s'est normalisée. [...]
[...] Lorsque le texte est adopté par les deux assemblées c'est le peuple qui ratifie la révision par référendum. Cependant le Président de la République a la possibilité de préférer à cette voie populaire, une voie parlementaire : celle du Congrès. D'après le texte constitutionnel cette voie parlementaire est l'exception, mais, "force est de constater que depuis 1963 une véritable coutume constitutionnelle s'est formée faisant du recours au Congrès la procédure de droit commun dans le cadre de l'article 89 " (24). Douze lois constitutionnelles sur treize ont été ainsi adoptées. [...]
[...] La première révision de la Constitution est intervenue en 1960, dans le cadre de l'article 85 de la Constitution. Cet article, qui d'ailleurs a disparu en 1995 mettait en place une procédure " dérogatoire Ce caractère était explicitement indiqué dès le début de l'article : " Par dérogation à la procédure prévue à l'article Il s'expliquait sans doute par le fait que cette procédure ne pouvait s'appliquer qu'à l'ancien Titre XII relatif à la Communauté française, cette union de type fédératif qui unissait la France et ses anciennes colonies. [...]
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