Légalité et légitimité sont deux notions bien distinctes qu'il est important de ne pas confondre. Ainsi, la légalité constitue en l'obéissance à un ordre constitutionnel positif, et est donc clairement définissable au niveau juridique, tandis que la légitimité repose sur la conformité du mode de gouvernement avec le sentiment populaire, ce qui est donc bien plus subjectif et impossible à fixer précisément.
Or, le régime de Vichy est basé sur ces deux notions et leurs interrelations, puisque il est un régime jaillissant de la défaite française face aux troupes allemandes : il clôt ainsi 70 ans de maintien de la Troisième République, la plus longue jusqu'à aujourd'hui. Instaurant un régime de collaboration avec le nazisme, il a été occulté pendant des années par l'Histoire.
Pourtant, ce régime autoritaire qui a gouverné la France pendant 4 ans, a-t-il été illégal et illégitime ? Autrement dit, les institutions de la Troisième République rendaient-elles possible un tel bouleversement, et celui-ci a-t-il été soutenu par un peuple dont on n'a retenu que la figure du Résistant ? Nous verrons que ce régime a tout d'abord semblé doté d'une légalité et d'une légitimité certes contestables, mais qu'au fil du temps, il a fini par perdre tout semblant de légalité et de légitimité.
[...] Son accession au pouvoir s'est faîte démocratiquement, et conformément aux institutions de la Troisième. La Chambre des Députés et le Sénat, réunies en Assemblée Nationale le 10 Juillet 1940 à Vichy, nouveau siège du gouvernement, votent une loi constitutionnelle visant à mettre fin à la Troisième République et à déléguer le pouvoir constituant au Chef du gouvernement Philippe Pétain. On peut donc conclure à la légalité formelle du régime de Vichy : en effet, la Constitution dudit régime n'est pas inconstitutionnelle vis-à-vis de la Troisième car c'est une loi votée selon les procédures de la Troisième République qui vient abroger sa propre Constitution, ce qui rend cette abrogation légale au sens positif du terme. [...]
[...] Nous verrons que ce régime a tout d'abord semblé doté d'une légalité et d'une légitimité certes contestables, mais qu'au fil du temps, il a fini par perdre tout semblant de légalité et de légitimité. I Lorsqu'il a été mis en place, le régime de Vichy était pourvu d'une légalité et d'une légitimité contestables, mais pourtant réelles Pour étudier la légalité du régime de Vichy, nous devons tout d'abord nous interroger sur la manière dont il a été mis en place, grâce à un bref rappel historique. [...]
[...] Deux évènements notamment vont alimenter une contestation populaire latente et de plus en plus activiste au travers de la Résistance : l'occupation en novembre 1942 de la zone libre concession faite par Hitler à la France soumise, symbolisant dès lors l'abandon des privilèges français ; la mise en place du STO, Service du Travail Obligatoire, réquisitionnant les hommes pour les envoyer travailler dans les usines allemandes marquent l'asservissement de la France à l'Allemagne et finissent de renverser l'opinion publique. Pour citer une nouvelle fois Jacques Chapsal, Vichy 1940 avait été accueilli avec soulagement, Vichy 1943-1944 devenait intolérable. Un régime qui n'est plus supporté par sa population est donc illégitime. Ainsi, si Vichy est devenu illégitime, il est clair que le soutien de la population s'est déporté sur un autre régime, nouveau possesseur de la légitimité, mais illégal puisque contraire au droit positif alors en vigueur en France. [...]
[...] Cependant, le fait que la Constitution de la Troisième n'empêche pas non plus ladite délégation, dont l'illégalité se fait sur un principe de bon sens et non de droit positif, on peut en conclure que, juridiquement parlant, le régime de Vichy est légal. Pourtant, est-il en conformité avec les attentes de la population ? Est-il légitime dans le sens où il est l'expression de la volonté générale ? C'est un des paradoxes majeurs de ce régime ; qui s'appuie sur une population tiraillée entre la volonté de continuer la guerre et celle de limiter les dégâts en se pliant aux volontés du vainqueur. [...]
[...] Dès le début du Régime de Vichy, le Général de Gaulle, sous- secrétaire d'Etat à la guerre, s'exile en Angleterre où il prononce, dès le 18 Juin 1940, son célèbre appel, où il affirme à la radio que Quoiqu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas. Il prend dès lors le parti de rejeter ce gouvernement qu'il considère comme factice et illégitime et d'organiser outre-Manche la résistance. Reconnu par le gouvernement britannique chef des Français libres, le 28 Juin 1940, il fonde, selon les mots d'Olivier Duhamel un contre-pouvoir qui saura conquérir progressivement légitimité puis légalité Le processus classique de formation du pouvoir politique est alors parfaitement respecté. [...]
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