L'article 16, qui attribue au président d'importants pouvoirs en temps de crise, n'est pas dépourvu d'ambiguïtés : les conditions de sa mise en œuvre sont strictes mais les compétences qu'il octroie au président ne trouvent pas vraiment de limites, ce qui, en démocratie, donne toujours lieu à la critique. L'unique application qui en a été faite, en 1961 à la suite du « putsch des généraux » à Alger, n'a pas totalement dissipé les interrogations suscitées par cette procédure
[...] Pourquoi l'article 16 ? Elément fondamental de la pensée gaullienne, la possibilité constitutionnelle de faire face à une crise grave trouve son origine dans l'analyse faite par de Gaulle de la défaite de la France en juin 1940. Dans son discours de Bayeux, le 16 juin 1946, il affirmait, s'il devait arriver que la Patrie fût en péril le chef de l'Etat devait dans ce cas avoir les mains libres pour permettre à la France et à ses institutions de sortir de la crise. [...]
[...] C'est la raison pour laquelle la suppression de cet article a longtemps été une des revendications de l'opposition. Certains ont pu croire, avant la cohabitation, qu'un président face à une majorité contraire et hostile recoure à l'article 16 pour refuser de s'effacer, en prétextant une menace sur les institutions. Une autre crainte touche à la révision constitutionnelle. L'article 89 n'exclut la révision qu'en cas d'atteinte à l'intégrité du territoire, alors que l'article 16 évoque une menace et répond à d'autres types de circonstances. [...]
[...] La durée d'application du régime de l'article 16 ne connaît pas de limites effectives. Son caractère temporaire est rappelé par la Constitution, mais de façon imprécise : les pouvoirs publics constitutionnels doivent retrouver dans les moindres délais, les moyens d'accomplir leur mission Mais aucun mécanisme ne permet de contrôler cette obligation : ni le Conseil d'Etat d'après l'arrêt Rubin de Servens du 2 mars 1962, ni le Conseil Constitutionnel. Le Parlement, dont une éventuelle motion de censure ne serait de toutes façons pas recevable (précédent de Gaulle), ne peut non plus atteindre directement le président. [...]
[...] L'article 16 de la Constitution de 1958 est d'une toute autre nature. Les conséquences qu'entraînent sa mise en œuvre sont d'une ampleur telle que l'on a pu dire au moment de l'élaboration de la Constitution que cet article, à lui tout seul, définissait une Constitution au sein même de la Constitution Des conditions rigoureuses . Les conditions de fond. La Constitution exige pour la mise en œuvre de l'article 16 plusieurs conditions de fond : Il faut nécessairement que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics soit interrompu. [...]
[...] Cependant, François Mitterrand a soumis la question des pouvoirs de crise au comité consultatif qu'il a désigné en 1992 pour réviser la Constitution : ce dernier à proposé de donner au Conseil Constitutionnel la possibilité de mettre fin au régime d'exception. Mais Mitterrand, compte tenu du degré de maturité de la démocratie française a préféré, dans un projet soumis aux Assemblées, en mars 1993, proposer l'abrogation pure et simple de l'article 16, adopté naguère dans des circonstances historiques très particulières Le projet n'a pas été adopté. [...]
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