La séparation des pouvoirs, mythe constitutionnel ? Dissertation de droit constitutionnel sur la séparation des pouvoirs
Déjà évoqué par Locke dans son Traité sur le gouvernement civil, 1690, la théorie de la séparation des pouvoirs a été établie, en France, dans les ?uvres de Montesquieu (particulièrement L'Esprit des Lois en 1748). Peu de théories constitutionnelles ont eu autant d'audience.
Nous verrons que si la signification et le but de la séparation des pouvoirs continuent d'être régulièrement invoqués par une classification des régimes (I), leur application ne cesse d'être démentie dans les faits (II) et peut même être à l'origine de blocages institutionnels graves.
[...] Aujourd'hui, le régime parlementaire bipartiste concentre tous les pouvoirs entre les mains du Cabinet, c'est-à-dire du comité dirigeant du parti vainqueur des élections qui, en principe, dispose de la majorité absolue aux Communes. Le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ne sont pas par exemple séparés. Il faut d'ailleurs être député pour pouvoir prétendre être ministre. S'agissant d'un des régimes les plus libéraux du monde, il faut bien admettre sur son libéralisme tient à d'autres causes qu'à la séparation des pouvoirs. B. [...]
[...] De plus, la théorie de la séparation des pouvoirs a pris, en France, une signification particulière, que le Conseil constitutionnel a qualifiée dans une décision du 23 janvier 1987 de conception française de la séparation des pouvoirs L'idée principale est que le dialogue doit permettre le fonctionnement régulier des pouvoirs publics. La collaboration se traduit par l'existence de moyens d'actions réciproques. L'exécutif a le droit de dissolution sur l'Assemblée législative ; le législatif peut mettre en jeu la responsabilité gouvernementale par l'interpellation ou la censure. C'est donc à la théorie que l'on doit les appellations toujours employées d'exécutif pour l'organe présidentiel ou les organes gouvernementaux et de législatif pour le ou les organes parlementaires. [...]
[...] C'est ainsi, par exemple, le Président se voit refuser l'initiative législative et ne peut donc déposer de projets de lois. En toute logique, ses ministres ne devraient pas non plus pouvoir intervenir dans la procédure d'élaboration de la loi. Mais c'est là oublier que le Président est élu pour réaliser un programme et que celui-ci doit être réalisé aussi par la voie législative, qui est indispensable. D'où la nécessité de recourir à des subterfuges divers, qui tendent toujours à tourner les dispositions constitutionnelles. [...]
[...] Ce vieillissement de la théorie s'explique par l'apparition des partis modernes L'inadaptation de la théorie tient pour beaucoup à ce qu'elle a été élaborée dans un temps où les partis n'existaient pas encore, tout au moins sous leur forme moderne. Les principaux problèmes posés par le pouvoir étaient d'ordre institutionnel, ils concernaient les différents organes, leurs compétences et leurs rapports, et la théorie pouvait apporter entre eux un équilibre souhaitable. Actuellement ce sont les partis qui animent la vie politique, à laquelle les institutions ne fournissent qu'un cadre formel. [...]
[...] Ainsi c'est plus une interdépendance entre les pouvoirs qui existe aujourd'hui qu'une totale séparation des pouvoirs : - l'exécutif participe à la confection de la loi par les projets qu'il dépose devant le Parlement et il a un important pouvoir réglementaire ; de plus, c'est lui qui édicte les contraventions - le pouvoir exécutif peut empiéter sur le judiciaire. Par exemple, il dispose de la police et peut refuser de la mettre à la disposition d'un plaideur qui a gagné son procès et souhaite faire exécuter la décision obtenue. Conclusion La séparation des pouvoirs est bien un mythe constitutionnel absolu si on la comprend comme une isolation (étanche) des pouvoirs. [...]
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