Sénat, IIIe République, Constitution de 1875, Sénat républicain, bicamérisme équilibré
Le 2 septembre 1870, la défaite de Napoléon III à Sedan marque la fin du Second Empire ; deux jours plus tard, les républicains organisent dans Paris un gouvernement provisoire « de la défense nationale », faisant ainsi entrer la France dans la IIIe République. Les institutions définitives de ce régime ne sont fixées que cinq ans plus tard, une fois les troubles extérieurs éloignés, par une série de lois organiques datées des 24, 25 février et 16 juillet 18751. Cette Constitution, la treizième depuis le tournant révolutionnaire de 1789, tente de répondre à la nécessité d'unifier les groupes politiques divergents qui divisent la nation ; le poids des monarchistes, en effet, demeure incontournable dans la formation des majorités politiques, et la crainte, d'autre part, de voir cette République naissante dégénérer une fois de plus en autocratie personnelle, à l'occasion d'un nouveau 18 brumaire ou d'un nouveau 2 décembre, est grande. Les monarchistes, eux-mêmes divisés entre légitimistes et orléanistes, acceptent donc la proclamation de la République par souci de réalisme politique ; Constitution dont ils contribuent d‘ailleurs, en tant que représentants majoritaires à la Chambre des Députés, à la rédaction.
[...] L'institution du Sénat, chambre haute du Parlement, se trouve être une des expressions les plus claires de cette coloration politique des constituants : élue par les représentants communaux indépendamment de l'importance de leur population, cette seconde chambre a vocation à favoriser la représentation des petites communes rurales, considérées - à juste titre, eu égard aux faits historiques - comme plus fidèles à la tradition et à l'ordre établi que les grandes villes, véritables chaudrons révolutionnaires. Pourtant, la IIIe République, la plus longue jusqu'à nos jours (1970/75-1946), se révèlera être le lieu de l'enracinement profond des idées républicaines, démocratiques, si communément admises actuellement ; notamment, la constitution du Sénat évolue au fil des années pour devenir plus largement républicaine. La question se pose alors de voir comment, d'un Sénat en théorie construit pour être favorable à la réaction, la pratique politique fera une institution réellement démocratique et républicaine. [...]
[...] Un mode d'élection en théorie favorable à la réaction > Le Sénat est constitué de 300 membres, disposant d'un mandat de 9 ans, renouvelables par tiers tous les 3 ans membres sont élus inamovibles (pairies à vie) à la majorité absolue par le Sénat lui-même et la Chambre des Députés (loi du 24 février 1875, article = signe d'une constitution aristocratique. > Les sénateurs sont élus à la majorité absolue par les députés, les conseillers généraux et les délégués des conseils municipaux ; chaque commune dispose du même nombre de ces électeurs quelle que soit sa population = les petites communes rurales, conservatrices, sont surreprésentées par rapport aux grandes villes, foyers révolutionnaires.1 > La première élection (30 janvier 1876) semble confirmer l'efficacité de ce découpage électoral : les conservateurs (i.e. les monarchistes et bonapartistes) obtiennent une majorité (peu consistante cependant). [...]
[...] > La valse des gouvernements conséquence directe de la dégénérescence du système en régime d'assemblée, va caractériser toute la IIIe République ainsi que la IVe, et appeler la nécessité d'une rationalisation du parlementarisme sous la Ve République. Le Sénat retrouvera un statut de chambre haute classique i.e. moins puissant que la Chambre des Députés. 1. BERNSTEIN, Serge et MILZA, Pierre, op. [...]
[...] Un bicamérisme équilibré, un Sénat puissant > Le Sénat et la Chambre des Députés sont conçus comme deux chambres d'égale importance : une théorie constitutionnelle relativement inédite. Le Sénat détient donc un pouvoir important. > Le Sénat concurremment avec la Chambre des Députés, l'initiative et la confection des lois. (loi du 24 février 1875, article 82) : compétence législative très étendue de la chambre haute. Seule limite à l'égalité des deux chambres : les députés étudient en priorité les lois de finance. > Les ministres sont solidairement responsables devant les chambres de la politique générale du Gouvernement, et individuellement de leurs actes personnels. [...]
[...] > Les républicains, en conflit avec le Président de la République Mac- Mahon (monarchiste), profitent de ce pouvoir inattendu au Sénat pour tenter de le renverser (crise du 16 mai 1877). Après le premier renouvellement en 1879, le Sénat passe aux mains des républicains, et Mac-Mahon, privé de majorité, préfère démissionner le 30 janvier. > Les républicains utilisent donc l'outil prévu par les conservateurs pour consolider leur pouvoir : le Sénat joue son rôle dans la création des grandes lois républicaines p. [...]
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