Juge, gardien de la Constitution, France, contrôle de constitutionnalité, Conseil constitutionnel, régime démocratique
« En voulant donner un gardien aux pouvoirs publics, on leur donnerait un maître qui les enchaînerait pour les garder plus facilement », déclarait en 1795 Thibaudeau, député à la Convention nationale. Il exprime ainsi l'hostilité française, qui a longtemps perduré après la Révolution, à l'institution d'un gardien de la Constitution. Pourtant, aujourd'hui, le Conseil constitutionnel exerce bien ce rôle de gardien de la Constitution : alors comment le juge est-il devenu gardien de la Constitution en France ?
S'interroger sur les gardiens de la Constitution, c'est en fait s'interroger sur le contrôle de constitutionnalité, c'est-à-dire la vérification de la conformité du texte de la loi à la Constitution. Par ce contrôle, on garantit que la Constitution est respectée, on garantit les droits énoncés par la Constitution aux citoyens, d'où l'expression de « gardien de la Constitution ». L'idée d'un juge constitutionnel, émise au début du XXe siècle par Hans Kelsen, s'est peu à peu diffusée dans de nombreux pays européens. Ainsi, l'Autriche, pays de Kelsen, se dote d'une Cour constitutionnelle dès 1920. Le contrôle de constitutionnalité semble en effet être un élément fondamental dans un régime démocratique : comment garantir aux citoyens que leurs droits, consacrés par la Constitution, seront respectés, s'ils ne sont pas contrôlés et sanctionnés ?
[...] - Peu après la Révolution, Thibaudeau, au moment de la mise en place de la Constitution du directoire (an III, 1795), critique ainsi l'idée du jury constitutionnaire de Sieyès (qui ressemble beaucoup au Conseil Constitutionnel tel qu'on le connaît aujourd'hui) : Cette institution me parait contraire au but que l'on se propose et nuisible aux intérêts de mon pays Qui sanctionnerait le jury constitutionnaire s'il outrepassait ses fonctions ? S'il modifie la Constitution à son gré ? Reflète bien l'hostilité française post-révolutionnaire à un juge constitutionnel, gardien de la Constitution. [...]
[...] Des critiques et des débats persistants autour du Conseil Constitutionnel - Le juge constitutionnel s'est donc peu à peu enraciné en France à partir de 1958, acquérant de plus en plus d'influence, contrôlant de plus en plus de lois, sur la base du bloc de constitutionnalité (Constitution + préambule de 1946 + DDHC de 1789 + charte de l'environnement de 2005 + Principes Fondamentaux Reconnus par les Lois de la République) et non plus de la Constitution elle-même. - Juge constitutionnel enraciné mais toujours critiqué par certains, au cœur de nombreux débats : est-ce qu'il ne va pas au-delà de ses fonctions ? Ne tombe-t-on pas justement un peu dans un gouvernement des juges ? Le CC s'octroie des pouvoirs, alors que ce n'est pas une institution élue par le peuple. [...]
[...] On peut imaginer que le but des rédacteurs de la Constitution est alors de limiter le pouvoir du Parlement. Depuis sa création, le Conseil Constitutionnel a beaucoup évolué : par des révisions constitutionnelles ou des arrêts de jurisprudence, il a gagné en pouvoir, et s'est enraciné dans la conception française de la République. II/ Un juge constitutionnel désormais enraciné, mais encore sujet à controverse Le Conseil constitutionnel est l'application française de l'idée de Kelsen d'une institution juridictionnelle pour contrôler la constitutionnalité des lois. [...]
[...] Comparaison de deux textes juridiques = office du juge, fonction véritablement juridictionnelle Mais Kelsen ne donne pas de modèle unique de juridiction constitutionnelle, celle-ci doit s'adapter à un Etat et à une Constitution. ( Aujourd'hui en France, ce sont des juges constitutionnels qui vérifient la constitutionnalité des lois, même si la composition du Conseil constitutionnel peut sembler très politique (membres nommés par le Président, le Président du Sénat, et le Président de l'Assemblée nationale). Modèle de Kelsen s'est donc imposé. Mais la France a longtemps été très hostile à cette idée d'un contrôle de constitutionnalité fait par des juges. Pourquoi ? [...]
[...] Pour comprendre les raisons de cette mise à l'écart, il faut d'abord s'interroger sur les fondements doctrinaux d'une institution juridictionnelle comme contrôleur de la constitutionnalité des lois Nous verrons ensuite pourquoi, historiquement, la France a refusé l'institution d'un juge constitutionnel pendant des siècles Le contrôle constitutionnalité : un débat doctrinal - Savoir s'il faut mettre en place ou non un contrôle de constitutionnalité : grand débat doctrinal. Question de son utilité, mais aussi de sa forme possible. Comment mettre en place un contrôle de constitutionnalité pertinent ? - Carl Schmitt : le contrôle de constitutionnalité doit être effectué par une institution politique, car derrière le contrôle de la constitutionnalité de la législation il y a toujours des problèmes d'ordre politique qui se poseront. Il est impossible de dépolitiser les problèmes de droit public. [...]
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