Charte constitutionnelle, 4 juin 1814, compromis libéraux, Révolution, Restauration
Après les défaites de Napoléon, à Leipzig notamment, les puissances alliées arrivent à Paris le 31 mars 1814. Ils s'engagent à reconnaître et garantir « la Constitution que la nation française se donnera » et invitent donc le Sénat à désigner un gouvernement provisoire pour préparer cette constitution. Celui-ci est mis en place en avril 1814, avec Talleyrand, le président du Sénat, à sa tête. Un premier projet rédigé très vite : il constitue surtout un inventaire des acquis révolutionnaires et impériaux. Il a toutefois pour originalité de concilier souveraineté nationale et système monarchique. Le roi est, dans ce projet, l'appelé de la Nation. Le dernier article soumet même la constitution à l'acceptation populaire. Mais le prétendant au trône, le comte de Provence et frère de Louis XVI, devenu Louis XVIII à la mort de celui-ci, s'oppose à ce projet, exigeant qu'il prenne la forme d'une concession royale. Il avait déjà, par ses déclarations de Hamm (1793) et de Vérone (1795), marqué sa volonté de retour à l'Ancien Régime dans son intégralité, position qu'il garda jusqu'en 1804, acceptant alors une amnistie générale et le maintien des biens nationaux à leurs propriétaires. Ses réserves sur le projet constitutionnel sont rendues publiques par la déclaration de Saint-Ouen, le 2 mai 1814. Louis XVIII annonce alors la mise en place d'une commission ayant pour but de réaliser un nouveau texte constitutionnel. Ainsi, des « hommes sages pris dans le premier corps de l'Etat » se réunissent « pour travailler à cet important ouvrage ». En effet, le roi fait élaborer par trois de ses proches (Dambray, l'abbé de Montesquiou, et Ferrand) un nouveau projet qui devra être soumis à la commission, composée de neuf membres du Sénat, de neuf membres du corps législatif, et de trois représentants du roi : Beugnot, Ferrand et Montesquiou. Dambray, lui, préside cette commission consultative tandis que le roi conserve la prérogative. Le texte est prêt le 28 mai ; il est formé de 76 articles précédés d'un préambule rédigé par le comte Beugnot, ministre de l'intérieur du gouvernement provisoire, en exposant les motifs et objectifs. Puis, après avoir été présentée aux chambres, acceptée avec facilité par le Sénat et avec un peu de réticence par les députés qui y voient une limitation de leur pouvoir, elle est proclamée le 4 juin.
[...] Le préambule de la Charte de 1814 affirme donc bien la nécessité que représente le retour à la monarchie, ou, pour aller dans le sens du texte, la continuité de celle-ci puisqu'elle n'a connu qu'une simple parenthèse. Cependant, et sans doute pour éviter de trop rapides et violents soulèvements, la Charte, dès son préambule, permet quelques compromis de tendance libérale, comme une contrepartie de la monarchie, bien que ceux-ci ne semblent pas tous très clairs. II. De nécessaires compromis libéraux Bien que le régime veuille nier la période révolutionnaire et impériale, on trouve dès le préambule de la Charte de 1814 certains compromis pour allier la monarchie aux idées libérales héritées et consacrées durant celle-ci. [...]
[...] La volonté est marquée dans cette constitution libre et monarchique de réconcilier des concepts qui paraissent antagonistes. En ce sens, le préambule laisse percevoir une forte affirmation du caractère monarchique du nouveau régime à mettre en place Toutefois, des compromis sont nécessaires et le roi doit se résigner à des contreparties plus libérales, bien que limitées ou vagues(II). I. Une forte affirmation du caractère monarchique de la Restauration L'objet du texte est avant tout de marquer institutionnellement le retour des Bourbons et à la monarchie en France. [...]
[...] La négation de cette coupure révolutionnaire apparaît clairement par le vocabulaire employé dans le Préambule de la Charte. Le vocabulaire de la Révolution est remplacé par celui de l'ancien régime : c'est l'utilisation du nous de majesté qui guide le texte qui, d'autre part, n'est pas une Constitution mais une Charte ce qui, en même temps, nie la souveraineté de la Nation, d'autant plus qu'elle est octroyée De même, les citoyens redeviennent des sujets terme qui montre en même temps une certaine subordination dont ils doivent faire preuve quant au roi. [...]
[...] Le préambule inscrit le retour à la souveraineté royale, avec cette charte, comme une nécessité. Il inscrit ce texte comme un besoin réel notamment pour répondre aux besoins de paix et de sécurité, qui sont de grandes obligations sollicitées par l'état actuel du royaume En effet, jusque là, la France était en guerre, tant intérieure qu'extérieure, et les défaites de Napoléon à Waterloo et à Leipzig n'arrangent pas la situation française. Les Français sont donc demandeurs de sûreté, de sécurité, et surtout de paix. [...]
[...] Les individus ont vu leurs droits être reconnus, certes, mais, dans leurs intérêts et surtout dans ceux de la royauté, ils ne doivent pas mettre cette dernière en danger pour tenter de les affirmer davantage. D'ailleurs, l'apport des Lumières, bien qu'accepté, ne semble pas être considéré d'un bon œil par les rédacteurs de la charte, dans la mesure où le préambule présente ceux-ci comme ayant amené de graves altérations Le mouvement intellectuel, culturel et philosophique qui a dominé au XVIIIème siècle aurait aveuglé les individus, principalement sur le fait qu'ils aient écarté la royauté, d'autant plus qu'ils l'ont fait violemment, sans état de conscience. [...]
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