Des monarchies aux empires, du régime présidentiel avorté au parlementarisme absolu, le laboratoire constitutionnel français a souvent échoué à trouver des institutions viables et durables. S'il a fallu un siècle à la France pour se doter d'un régime légitime, en l'occurrence la République, cent ans supplémentaires lui furent nécessaires pour qu'elle invente un régime complexe mais efficace : la Ve République.
La Constitution de 1958 est née sous l'impulsion du général de Gaulle, qui déclarait déjà dans son fameux discours à Bayeux son opposition ouverte aux institutions de la IVe République. Souhaitant instaurer un pouvoir exécutif fort afin de stabiliser le système institutionnel français, Charles de Gaulle profita du problème algérien pour revenir sur le devant de la scène politique du pays et imposer ses points de vue.
Le parlementarisme rationalisé fut adopté comme solution à l'instabilité gouvernementale qui caractérisa les deux précédents régimes politiques en France.
[...] Une révocation possible à tout moment dans le cas du fait majoritaire L'histoire de la Vième République a longtemps été marquée par le fait majoritaire, dans laquelle le Président disposait d'une majorité qui lui était fidèle à l'Assemblée Nationale. Dans ces conditions, il lui a été possible de révoquer le Premier Ministre lorsqu'il le souhaitait, ce qui se faisait rarement, étant donné la proximité des deux hommes. La pratique a ainsi montré que, parfois, les chefs de l'Etat et du Gouvernement s'étaient accordés sur le futur départ de ce dernier. [...]
[...] La dernière élection présidentielle, à l'abstention et au vote protestataire inégalé, a réactivé cette vieille volonté de modifier des institutions jugées inadaptées. Or, une VIième République résoudrait-elle les problèmes de représentation ainsi que celui de la cohabitation ? En réalité, il semblerait que par delà l'ingénierie constitutionnelle, c'est la pratique des acteurs, qu'ils soient des hommes politiques ou de simples citoyens, qui doit être remise en question Bibliographie : CARCASSONNE Guy, La Constitution, Essais, Le Seuil, Paris CHAGNOLLAUD Dominique, Droit Constitutionnel contemporain, Armand Collin, 3ème Edition, Paris CHAGNOLLAUD Dominique, QUERMONNE Jean-Louis, Le Gouvernement de la France sous la Vième République, Dalloz, 4ème Edition, Paris DUHAMEL Olivier, Droit Constitutionnel, le pouvoir politique en France, le Seuil Paris, réédité en 1999. [...]
[...] Pourtant, en réalité, ni l'article ni aucune disposition de la Constitution ne confère ce pouvoir de révocation au Président. Devant le Comité Consultatif constitutionnel lors de l'élaboration de la Constitution en 1958, le général de Gaulle avait apaisé les craintes d'un parlementaire, Paul Reynaud, en assurant que le Premier Ministre ne pouvait être révoqué par le chef de l'Etat. En fait, la pratique constitutionnelle offre deux cas dans lesquels la démission résulte d'une demande du président de la République. Un premier, où on juge que la tâche du gouvernement a été accomplie (exemple : en 1962, Michel Debré qui considère qu' une étape décisive a été franchie Un second, où le Président juge que la politique du gouvernement (et notamment de celle de son chef) n'est pas satisfaisante, bien qu'on soit dans le fait majoritaire (la révocation des ministres étant beaucoup plus ardue en cas de cohabitation). [...]
[...] Tout membre peut aussi être révoqué par une décision conjointe du Premier Ministre et du Président. En réalité, l'article 8 souligne la prééminence du pouvoir présidentiel, avec certains ministres qui doivent quitter le gouvernement par décision du président. Ainsi est consacrée leur responsabilité devant le chef de l'Etat. Ce fut le cas par exemple avec Jacques Soustelle en 1960, qui était partisan de l'Algérie française, ce qui déplut fortement au général de Gaulle. Ainsi, un ministre peut être poussé et influencé à démissionner si nécessaire. [...]
[...] Tel est le sens de l'article 8 de la Constitution, qui stipule que Le Président de la République nomme le Premier Ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement. Sur la proposition du Premier Ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions Par conséquent, il serait intéressant de s'interroger sur la signification et sur la pratique politique de cet article depuis cinquante ans. L'article 8 véhicule-t-il l'idée d'« une monarchie républicaine en France, avec un gouvernement qui ne serait qu'un cabinet présidentiel? [...]
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