Crée par la Constitution du 4 octobre 1958, le Conseil Constitutionnel avait à ses origines une compétence certes « prestigieuse » ( contrôle de la conformité des lois à la Constitution, garant de la légalité des élections et référendums), mais volontairement « limitée » par les Constituants qui craignaient une éventuelle dérive vers un gouvernement des juges.
Faisant fi de ces limites à une époque la saisine n'était alors ouverte qu'aux plus hautes autorités de l'État, le Conseil constitutionnel a progressivement développé une jurisprudence « extensive » imprégnant d'autant plus en profondeur le tissu juridique Français que ses décisions s'imposent : d'une part en vertu de l'article 62 alinéa 2 « aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administrative et juridictionnelles », d'autre part en raison du fait que le champ de compétence du conseil constitutionnel s'est considérablement élargi avec la « reconnaissance » du fameux « bloc de constitutionnalité » ( décision fondamentale CC « liberté d'association », 1971).
L'ouverture de la saisine du conseil à partir de 1974 a ainsi permis aux députés et sénateurs dits « de l'opposition » d'influencer plus nettement les débats lors du vote d'une loi polémique, et la décision que nous allons maintenant commenter en est une excellente illustration.
Il s'agissait en l'espèce d'une triple saisine réalisée par les députés Socialistes et Communistes au mois de décembre 1981, dans les conditions prévues par l'article 61 alinéa 2 de la Constitution, et à l'occasion du vote de la loi « renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes ».
Cette loi était par excellence extrêmement polémique et « politique », car elle « édictait principalement des dispositions tendant à une répression plus sévère des actes de violence les plus graves envers les personnes et les biens », qui par conséquent, pour les auteurs de la saisine « serait contraire à des principes ou à des règles de valeur constitutionnelle, à savoir le principe de la légalité des délits et des peines, le principe selon lequel la loi ne doit établir que des peines « strictement et évidemment nécessaires », le principe de l'individualisation des peines, le droit de grève et le droit syndical ».
Il était alors demandé au Conseil Constitutionnel de censurer une grande partie des articles de la loi au motif d'une violation du principe de légalité, des principes corolaires précités, d'une violation des droits de la défense, d'une fragilisation des droits de la personne au procès face à la partie civile. (Cela revenait donc comme le Professeur Jean Rivero l'a écrit dans un article consacré à cette décision, à demander au Conseil de prendre parti dans le débat politique.)
[...] n'introduit aucun élément d'incertitude dans la définition des infractions. » Cette approche conforte donc en soit le travail du législateur et traduit indirectement le respect du Conseil pour la séparation des pouvoirs mais peut aussi signifier une volonté d'imposer sa propre interprétation juridique. Concernant le caractère « strictement et évidemment nécessaire » il rappelle ensuite qu'il s'agit de l'un des fondements du principe de légalité mais assez « humblement » dénie sa compétence en la matière et ne fait que renvoyer au législateur le soin d'apprécier l'opportunité d'estimer le caractère nécessaire des dites peines : 13èmement « il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer sa propre appréciation à celle du législateur en ce qui concerne la nécessité des peines attachées aux infractions définies par celui-ci » Concernant l'individualisation des peines, il s'agit peut être du point le plus « confus » du raisonnement du Conseil. [...]
[...] Ainsi, la décision « Sécurité et Liberté » des 19 et 20 Janvier 1981 a été l'occasion parfaite pour le Conseil de confirmer cette jurisprudence en validant dans les faits la « procédure » législative malgré l'opposition des auteurs de la saisine qui reprochaient aux membres de la commission mixte paritaire d'avoir manipulés le contenu des règlements d'assemblée. Le Conseil en profite donc pour préciser que les règlements d'assemblées n'ont pas valeur constitutionnelle et donc ne sauraient avoir faussé les travaux. Mais outre cette confirmation du principe de légalité pénale, le Conseil Constitutionnel va surtout saisir l'occasion offerte par la décision des 19 et 20 Janvier 1981 pour consolider la valeur de certains principes soulevés en parallèle du principe de légalité pénale et qui à plus d'un titre peuvent être considérés comme faisant partie du principe. [...]
[...] Le choix d'un contrôle stricte des articles de lois mais permet paradoxalement au Conseil d'adroitement imposer son interprétation juridique du principe, et ainsi asseoir son influence en matière de protection des libertés fondamentales. Après avoir confirmé la compétence législative en validant la procédure d'adoption de la loi sécurité , le Conseil « subdivise » méthodiquement le principe de légalité en un ensemble de sous-principes corolaires : Tout d'abord et c'est l'un des caractères essentiels de la décision, le Conseil déduit que conformément à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, les lois et surtout le législateur doivent définir les incriminations et les peines en termes « clairs et précis ». [...]
[...] On se souvient qu'en Mars 2003, la loi pour la sécurité intérieure a été l'occasion pour le Conseil de faire le point sur la conciliation entre liberté personnelle et ordre public. Cette décision est ainsi venue dissiper toutes les zones d'ombres qui pouvaient subsister à ce sujet. On peut à ce sujet préciser que le Conseil a exercé un contrôle de proportionnalité sur les dispositions critiquées par les parlementaires qui autorisaient, dans certaines circonstances, trois types différents de fouilles de véhicules. [...]
[...] Il s'agissait en l'espèce d'une triple saisine réalisée par les députés Socialistes et Communistes au mois de décembre 1981, dans les conditions prévues par l'article 61 alinéa 2 de la Constitution, et à l'occasion du vote de la loi « renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes ». Cette loi était par excellence extrêmement polémique et « politique », car elle « édictait principalement des dispositions tendant à une répression plus sévère des actes de violence les plus graves envers les personnes et les biens », qui par conséquent, pour les auteurs de la saisine « serait contraire à des principes ou à des règles de valeur constitutionnelle, à savoir le principe de la légalité des délits et des peines, le principe selon lequel la loi ne doit établir que des peines « strictement et évidemment nécessaires », le principe de l'individualisation des peines, le droit de grève et le droit syndical ». [...]
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