Commentaire de Décision, QPC, Conseil Constitutionnel, 17 décembre 2010, M. Kamel D, protection subsidiaire, dignité de la personne humaine
La protection subsidiaire est accordée à toute personne […] exposée dans son pays à […] la peine de mort [ainsi qu'à] la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants (…) .
Alors que le requérant est éligible à cette protection prévue à l'article L. 712-1 du
Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), il se la voit refuser compte tenu de « son activité sur le territoire constitutive d'une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'État » (exception prévue à l'article 712-2 du même code).
À l'occasion d'un recours devant une juridiction administrative, le demandeur soulève une QPC portant sur la conformité de l'article L. 712-2 du CESEDA à l'article 66-1 de la Constitution, relatif à l'interdiction de la peine de mort. Le Conseil d'État transmet cette QPC au Conseil Constitutionnel.
[...] Cela reviendrait à réaliser un contrôle de la conventionnalité des lois, dévolue aux juges judiciaire et administratif depuis les décisions Jacques Vabres et Nicolo. Le Conseil constitutionnel ne peut pas saisir la CJUE directement. Il se contente de renvoyer informellement la charge du contrôle à la CJUE de Strasbourg : il n'appartient qu'au juge de l'Union Européenne, saisi le cas échéant à titre préjudiciel, de contrôler le respect par cette directive des droits fondamentaux garantis à l'article 6 du Traité sur l'Union Européenne Dès lors il s'adresse au juge judiciaire, qui pourra poser une question préjudicielle à la CJUE car la question d droit est déterminante dans la solution au litige. [...]
[...] L'invocation du principe de la dignité humaine de la CEDH Ce droit est reconnu par l'article 3 de la Conv.EDH aux personnes qui, dans leur pays, risqueraient la mort, la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme interprète cet article non seulement comme une abstention des États mais aussi une obligation positive : condamnation de la France, pour violation de l'article 3 par ricochet (arrêt Daoudi c/France, 2009). [...]
[...] 712-2 du CESEDA à l'article 66-1 de la Constitution, relatif à l'interdiction de la peine de mort. Le Conseil d'État transmet cette QPC au Conseil Constitutionnel. Pour le requérant, cette disposition est contraire la Constitution, ainsi qu'au principe de dignité de la personne humaine, en ce qu'elle permet de déroger dans certains cas à la protection subsidiaire d'une personne. Après avoir relevé que le texte invoqué constitue la transposition effective d'une directive européenne, le conseil Constitutionnel se déclare incompétent et rend un non lieu à statuer . [...]
[...] Commentaire de la Décision n°2010-79 QPC du 17 décembre 2010 M. Kamel D. [Transposition d'une directive] La protection subsidiaire est accordée à toute personne [ ] exposée dans son pays à [ ] la peine de mort [ainsi qu'à] la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ( ) . Alors que le requérant est éligible à cette protection prévue à l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), il se la voit refuser compte tenu de son activité sur le territoire constitu[tive d']une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'État (exception prévue à l'article 7122 du même code). [...]
[...] C'est ce qui est déterminant dans la compétence du juge constitutionnel. Transition : Ainsi, les dispositions litigieuses du CESADA relèvent pour le Conseil constitutionnel du droit de l'Union Européenne. Or, il refuse de procéder au contrôle de conventionnalité entre une loi et le droit de l'Union Européenne ; donc il se déclare incompétent au profit de la CJUE. II] L'incompétence du Conseil Constitutionnel D'autre part, pour le Conseil Constitutionnel, la QPC transcendant le droit national elle n'est même plus constitutionnelle mais conventionnelle, et relève dès lors de la compétence de la CJUE L'absence d'atteinte à l'identité constitutionnelle de la France le droit évoqué ne concerne pas l'identité constitutionnelle de la France puisque n'est pas m[is] en cause d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France Dans la hiérarchie des normes, la Constitution se place au dessus des traités internationaux et le Conseil rappelle qu'il en est ainsi des normes de l'Union Européenne. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture