Commentaire de deux arrêts, Première Chambre civile, Cour de cassation, 22 février 1978, 13 décembre 1983
Remarquable par sa durée, l'affaire « Poussin » se distingue également par le fait qu'elle est l'objet de deux arrêts rendus par la Première Chambre civile de la Cour de cassation, les 22 février 1978 et 13 décembre 1983. La jurisprudence qui en résulte présente elle aussi un intérêt puisqu'elle vient enrichir la matière relative au vice du consentement dans un contrat, en particulier le concept de l'erreur. En effet, les arrêts susnommés sont respectivement amenés à traiter de l'erreur du vendeur sur les qualités substantielles de la chose vendue et du régime juridique de cette erreur.
En l'espèce, un couple, les époux Saint-Arroman, est propriétaire d'une œuvre d'art, à savoir un tableau. Un expert attribue l'œuvre non pas à Nicolas Poussin, contrairement à ce que le couple pensait, mais à l'école de Carrache. Convaincu par l'expert, le couple décide de vendre ce tableau. Acheté par la Réunion des musées nationaux, celle-ci présente le tableau comme pouvant être l'œuvre original de Nicolas Poussin. Le couple demande alors la nullité de la vente pour erreur sur la qualité sur la qualité substantielle de la chose vendue.
[...] - Là où la loi ne distingue pas, on ne doit pas distinguer - Apport de précision par rapport à la jurisprudence antérieure : la Cour de cassation, dans un arrêt du 25 janvier 1965, ne s'était pas prononcée sur l'erreur commise par le vendeur de la grange renfermant les fresques catalanes. - En l'occurrence, l'erreur du vendeur porte sur l'authenticité de l'œuvre d'art. L'erreur du vendeur sur les qualités substantielles de la chose objet du contrat - Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, à travers l'arrêt du 28 janvier 1913 : l'erreur doit être considérée comme portant sur la substance de la chose lorsqu'elle est de telle nature que, sans elle, l'une des parties n'aurait pas contracté - On note deux conceptions de la substance de la chose : objective (exemple des chandeliers de Pothier) et subjective. [...]
[...] TD 4 Commentaire des arrêts Cass., 1ère civ février 1978 et 13 décembre 1983 Remarquable par sa durée, l'affaire Poussin se distingue également par le fait qu'elle est l'objet de deux arrêts rendus par la Première Chambre civile de la Cour de cassation, les 22 février 1978 et 13 décembre 1983. La jurisprudence qui en résulte présente elle aussi un intérêt puisqu'elle vient enrichir la matière relative au vice du consentement dans un contrat, en particulier le concept de l'erreur. [...]
[...] - Dans le cas de la vente du tableau, il y a bien eu erreur au moment de la vente : le couple était convaincu de ne pas vendre un tableau de Poussin, l'expert ayant certifié qu'il n'était pas de Poussin et le catalogue de la vente aux enchères ne laissant planer aucun doute sur le sujet. - Cependant, postérieurement à la vente, la Réunion des musées nationaux le présente, par divers articles écrits, comme pouvant être l'œuvre de Poussin, il subsiste donc un doute après la vente. - Par l'existence de ce doute, la conviction du couple est donc erronée au moment de la vente. - Contrairement à l'affaire Fragonard (Cass. Civ. [...]
[...] Le 13 décembre 1983, La Cour de cassation fait droit à leur demande en cassant l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens. Afin de rejeter la demande du couple, la cour d'appel de Paris soulève le moyen qu'il ne peut y avoir erreur étant donné qu'il n'est pas prouvé que le tableau soit une œuvre authentique de Poussin. Quant à la cour d'appel d'Amiens, elle rejette la demande des époux en invoquant le fait que les époux se sont servis d'éléments d'appréciation postérieurs à la vente afin de prouver leur erreur au moment de la vente. [...]
[...] Gulphe écrit : on ne peut exclure l'admissibilité de preuves postérieures à la conclusion du contrat dès lors qu'elles établissent la réalité de l'erreur à ce moment là - A noter que cet élément peut être dangereux pour le commerce de tableaux. Il y a insécurité juridique : la possibilité de se servir d'élément d'appréciation postérieur à la vente peut, à tout moment, annuler la vente pour erreur sur la qualité substantielle. Il faut soit être sûr de l'authenticité de l'œuvre, ce qui est rare, soit introduire une clause d'aléas (Cass. Civ. 1re mars 1987). [...]
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