Commentaire d'arrêt Civ 1ère, 25 juin 1996 en droit de la famille, droit des successions
La question qui se posait à la Haute juridiction était donc de savoir si l'article 760 du Code civil relatif à la limitation des droits successoraux des enfants adultérins était conforme aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme d'une part, et à l'article 2 Convention de New York d'autre part.
I - L'inapplicabilité de la Convention de New York à un enfant majeur
II - L'inapplicabilité des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme
[...] L'interprétation de la Cour de cassation est en rupture avec la Cour européenne des droits de l'homme. En effet, à plusieurs reprises, la Cour européenne a condamné certaines législations anciennes contenant de telles discriminations entre enfants naturels et enfants légitimes en matière successorale sur le fondement de l'article 8 de la Convention. A cet égard, il y a lieu de rappeler l'arrêt Marckx du 13 juin 1979 condamnant la législation belge de l'époque pour établir une infériorité successorale de l'enfant naturel, l'arrêt Inze du 28 octobre 1987 condamnant la législation autrichienne pour réserver l'attribution préférentielle sur certains biens à la famille légitime. [...]
[...] En rejetant l'application de la Convention de New York, le Cour de cassation condamne donc une conception large de la notion " enfant Il faut toutefois reconnaître que l'objet même de la Convention ne se prêtait guère à cette extension. L'art. 1er de cette convention limite en effet elle-même son champ d'application disposant qu' " au sens de la présente convention, un enfant s'entend de tout être humain, âgé de moins de dix-huit ans La Cour de cassation a donc donné sur ce point une réponse négative qui s'imposait. Cette Convention interesserait uniquement les enfants mineurs. [...]
[...] Le 1er février 2000, la Cour européenne des droits de l'homme condamna la France. Elle a estime qu'il " n'y a pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre le but poursuivi par le Gouvernement, à savoir la protection de la famille traditionnelle, et les moyens employés, soit l'instauration d'une différence de traitement entre enfants adultérins et enfants légitimes ou naturels, quant à la succession de leur auteur " En effet, au regard de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, une distinction est discriminatoire si " elle manque de justification objective et raisonnable " c'est-à-dire si elle ne poursuit pas " un but légitime " ou s'il n'y a pas de " rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé " (Arrêt Inze). [...]
[...] Mazurek n'a pas manqué d'invoquer cette jurisprudence européenne à l'appui de son pourvoi. Dans ce contexte, de nombreux auteurs avaient souligné qu'en cas de recours devant la Cour européenne la législation française serait condamnée. Une position condamnée par la doctrine et la Cour européenne des droits de l'homme Avant d'avoir été porté sur le terrain de la conformité aux conventions internationales, l'article 760 du code civil avait suscité en droit interne de nombreuses controverses au sein de la doctrine. Certains l'approuvaient, d'autres, plus nombreux, le condamnaient. [...]
[...] Ne serait-il donc pas préférable d'avoir une interprétation plus large de la notion d'enfant ? La Convention de New York proclame des droits qui appartiennent à l'enfant dès sa naissance mais qui ne seront parfois mis en oeuvre qu'à l'âge adulte, comme c'est le plus souvent le cas pour la vocation successorale. Or n'est-ce pas en en fonction de la naissance que la filiation sera qualifiée de naturelle, simple ou adultérine ? Si c'est le cas, la discrimination prendrait alors bien naissance au moment de l'enfance. [...]
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