Le juge et la loi en droit civil

Thèmes abordés

Juge, loi, droit civil, soumission du juge, émancipation du juge

Résumé du document

Les rapports entre le juge et la loi en droit civil sont le résultat d'un long et lent processus. D'un juge simple « bouche de la loi » se contentant d'appliquer la loi mécaniquement, comme le préconisait Montesquieu, nous sommes aujourd'hui face à un juge qui façonne la loi, qui la complète et va à son encontre.
Trois périodes peuvent être distinguées dans l'étude des relations entre le juge et la loi. De 1804 à 1880 on constate une glorification de l'œuvre napoléonienne avec un postulat selon lequel la loi contient tout. On considérait le code civil comme la loi par excellence, l'influence de la révolution française voyant dans la loi l'unique source du droit. Pour l'école de l'exégèse, dont Demolombe est l'un des représentants, la loi est complète, tout est dans la loi et tout doit pouvoir se déduire de la loi. Par conséquent, toute difficulté peut être résolue en se référant au code civil. Le juge est sous la loi, de même qu‘il n‘existe qu‘un juge interne et une loi interne. Dans la période qui va de 1880 à 1945, le juge va venir se placer à côté de la loi. Cette évolution n'est pas sans rapport avec la question sociale qui donne naissance au phénomène Magnaud ou encore à l'arrêt Teffaine de 1896.

Extraits

[...] Le juge et la loi en droit civil Les rapports entre le juge et la loi en droit civil sont le résultat d'un long et lent processus. D'un juge simple bouche de la loi se contentant d'appliquer la loi mécaniquement, comme le préconisait Montesquieu, nous sommes aujourd'hui face à un juge qui façonne la loi, qui la complète et va à son encontre. Trois périodes peuvent être distinguées dans l'étude des relations entre le juge et la loi. De 1804 à 1880 on constate une glorification de l'œuvre napoléonienne avec un postulat selon lequel la loi contient tout. [...]

[...] Enfin de nombreux rapports ont pour objet la recodification du droit civil. Ainsi on dénombre les rapports Catala, Terré ou encore celui préparé par la chancellerie. Ils prévoient tous le rapatriement à droit constant pour environ 90% dans le code civil. Malgré l'incertitude relative à ces rapports, une partie du rapport Catala a été consacrée. La loi du 17 juin 2008 a ainsi réformée les règles concernant la prescription. Conclusion : les juges sont émancipés mais cette émancipation est problématique. [...]

[...] Le juge se tient désormais à côté de la loi. Enfin de 1945 à nos jours, le juge est au-dessus de la loi. Les sources supra législatives vont prendre de l'ampleur, notamment depuis 1974 date de ratification de la convention européenne des droits de l'homme. Face aux sources européennes, les sources de droit dérivé du droit communautaire connaissent une montée en puissance. Se met alors en place un dialogue entre le juge interne et le juge européen. Cette enchevêtrement des normes trouve sa solution avec la pyramide de Kelsen qui prévoit la supériorité de la norme supérieure sur la norme inférieure. [...]

[...] La même procédure existe devant la cour européenne des droits de l'homme et la cour de justice de l'union européenne, par le biais d‘une question préjudicielle. Le juge interne qui ne sait pas comment statuer s'adresse alors à ces instances qui pourront l'éclairer. La première utilisation de cette procédure devant la cour de cassation a donné lieu à l'avis relative à la ligature des trompes. À l'opposé de l'inflation législative, le législateur ne prévoit parfois rien. Il ne légifère pas sur telle ou telle question. Dans une telle situation c'est au juge qu'il revient de dicter la règle applicable. [...]

[...] Les lois qui s'empilent rendent la législation inapplicable. Outre cette inflation législative, ce sont la qualité des normes qui se détériore. Les lois deviennent incompréhensibles. Cette surproduction des normes législatives posent des problèmes d'application dans le temps en même temps qu'il est parfois inconciliable avec l'ancienne législation dont toutes les dispositions n'ont pas été abrogées. En dépit de cette accumulation des textes, aujourd'hui la loi française n'envisage pas toutes les hypothèses. Le code civil ne peut plus prétendre à la complétude. [...]