Confronté à un cas d'espèce dans lequel un jeune handicapé mental, Joël W., placé dans le Centre d'aide par le travail de Sornac a mis le feu à une forêt appartenant aux consorts Blieck, le juge judiciaire a du se prononcer sur cette question. Les consorts Blieck en effet, ont demandé à l'Association des centres éducatifs du Limousin qui gère le centre de Sornac, et à son assureur, réparation de leur préjudice.
Dans un arrêt du 23 mars 1989, la Cour d'Appel de Limoges avait condamné l'association et son assureur à réparer par des dommages et intérêts le préjudice subi par les consorts Blieck en vertu de l'article 1384 alinéa 1 du Code civil. Ils furent donc jugés responsables pour le fait de Joël W.
L'association et son assureur forment donc un pourvoi en cassation puisqu'en aucun cas la Cour d'Appel ne pouvait appliquer cet article sachant qu'il ne fait pas mention d'un tel cas de responsabilité du fait d'autrui. Pour les consorts Blieck néanmoins, l'article 1384 alinéa n'en était pas pour autant à écarter du fondement de la responsabilité de l'association. En effet, on pouvait alors se demander si l'association qui avait à sa charge Joël W., handicapé mental, était responsable du fait de celui-ci au titre de l'alinéa 1er de l'article 1384 du Code civil.
Ici, l'Assemblée plénière opère donc un revirement de jurisprudence, car elle admet la responsabilité du fait d'autrui comme elle l'avait fait en 1896 en établissant un principe général pour le fait des choses avec l'arrêt Teffaine.
[...] La confirmation d'un régime de responsabilité de plein droit En reconnaissant la responsabilité de l'association et de son assureur pour le dommage causé par Joël WEEVAUTERS sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil, par l'arrêt BLIECK, l'Assemblée plénière met en place un régime de responsabilité de plein droit et écarte alors toute considération de faute pour la mise en oeuvre de celle-ci comme l'avait fait auparavant le Conseil d'État. Pourtant, l'Assemblée plénière s'était montrée ici très prudente. En effet, elle s'était contentée de suivre les conclusions de l'avocat général sur cette question contrairement à la Cour d'Appel de Limoges qui s'était explicitement prononcée en faveur d'une présomption de responsabilité comme concernant le gardien de la chose et donc elle avait voulu calquer le régime de responsabilité du fait des choses de 1384 alinéa 1er. [...]
[...] En fait, il est plus probable que la Cour de cassation ait voulu se borner à écarter le caractère limitatif de l'article 1384 alinéa 1er dans certaines conditions précises plutôt que d'énoncer un principe général de responsabilité du fait d'autrui. L'Assemblée plénière admet donc un régime de responsabilité du fait d'autrui basé sur l'alinéa 1er de 1384, mais sans portée générale puisqu'elle se réfère aux circonstances particulières de l'espèce. Il faut donc étudier dans quelles conditions sera mise en place cette nouvelle responsabilité du fait d'autrui. [...]
[...] La Cour de cassation s'est juste bornée à dire que la réunion de ces circonstances justifiait en l'espèce l'application de 1384 alinéa 1er. Elle a donc laissé à la jurisprudence postérieure le soin de fixer le domaine de cet article et d'en fixer le régime. Concernant le domaine de cette nouvelle responsabilité, l'examen de la jurisprudence révèle qu'elle est fondée sur le contrôle du mode de vie des personnes dont l'état nécessite une surveillance particulière (en l'espèce il s'agissait d'un malade mental) et sur le contrôle de son activité (en référence au modèle patronal de responsabilité). [...]
[...] Longtemps on a conçu de manière limitative ces cas de responsabilité du fait d'autrui. En effet, le Code civil dispose à l'article 1384 alinéa 4 le cas des père et mère responsables pour le fait de leur enfant mineur, à l'alinéa 5 le cas des maîtres pour le fait de leurs domestiques et des commettants pour le fait de leurs préposés, et enfin l'alinéa 6 le cas des instituteurs et des artisans pour le fait de leurs élèves et apprentis. [...]
[...] Mais en 1997 avec l'arrêt BERTRAND relatif aux causes d'exonération de la responsabilité parentale fondée sur l'article 1384 alinéa 4 de Code civil, on assiste à une harmonisation puisque les père et mère ne peuvent plus s'exonérer par la preuve de l'absence de faute d'éducation ou de surveillance : la responsabilité parentale est désormais de plein droit. C'est donc logiquement que l'Assemblée plénière abandonne l'idée de faute pour mettre en oeuvre la responsabilité du fait d'autrui fondée su l'article 1384 alinéa 1er. [...]
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