La déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen de 1789 affirme dans son article 17 que « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ». Elle précise d'ailleurs dans son article 2 que la propriété a un caractère « imprescriptible ». Ainsi, le droit de propriété serait un droit sacré et inviolable, d'autant plus que c'est un principe à valeur constitutionnelle. La violation d'un tel droit entrainerait donc des sanctions assez strictes puisque le droit de propriété est un droit absolu. Mais qu'en est-il pour les relations de voisinages, lorsque l'un des voisins empiète sur la propriété de l'autre ? C'est justement ce que nous verrons dans cet arrêt.
Dans l'affaire examinée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, le 10 novembre 2009, le propriétaire d'un immeuble, M.X, est victime d'un empiètement en sous-sol à la suite d'une construction réalisée sur le fonds voisin, dont la société du Cours Lafayette est propriétaire. En effet, lors de la réalisation de travaux de terrassement et de reprise en sous œuvre, exécutés par la société Bazin, sous traitante de la société Courteix, des tirants d'ancrage ont été installés dans la propriété de M.X, à son insu. D'ailleurs, une expertise judiciaire avait estimé que le retrait des tirants était irréalisable et risquait de provoquer de graves désordres, de sorte que le propriétaire ne pouvait obtenir qu'une simple indemnisation, mais pas leur suppression.
Le propriétaire des fonds empiétés, M.X, assigne le propriétaire de l'immeuble avoisinant sur lequel des travaux de terrassement et de reprise en sous-œuvre avaient été entrepris, ainsi que les entreprises qui avaient exécuté les travaux, le contrôleur technique et leurs assureurs, en indemnisation devant la juridiction de première instance. Le demandeur, M.X, interjette appel de la décision rendue en première instance et demande cette fois la suppression des tirants d'ancrage empiétant sur sa propriété. La Cour d'appel de Lyon, par une décision du 24 juin 2008, déboute M.X de sa demande en suppression des tirants d'ancrage situés dans le tréfonds de sa propriété et des maçonneries construites en sous sol, justifiant sa décision par le fait qu'une telle sanction était irréalisable et risquait de créer des graves désordres. Elle affirme que M.X ne pouvait prétendre qu'à une indemnisation pour la neutralisation. Plusieurs pourvois en cassation sont formés contre cette décision, dont le pourvoi principal formé par M.X, faisant grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en suppression des tirants d'ancrage.
La question posée à la Cour de cassation dans cette affaire était donc de savoir quelle est la sanction encourue par l'auteur d'un empiétement en sous-sol de la propriété privée d'un tiers, sans le consentement préalable de ce dernier?
La Cour de cassation, par une décision de sa troisième chambre civile en date du 10 novembre 2009, casse et annule la décision de la Cour d'appel de Lyon sur le fondement de l'article 545 du Code civile. Elle affirme que « Le propriétaire d'un fonds sur lequel la construction d'un autre propriétaire empiète est fondé à en obtenir la démolition ». Ainsi, la sanction encourue pour un empiétement de propriété par une construction avoisinante est la suppression de la construction violant le droit de propriété.
[...] En effet, si l'avant-projet de réforme du livre II du Code civil élaboré par l'Association Capitant est adopté alors la solution traditionnelle sera atténué en cas d'empiétement minime, c'est-à-dire de moins de trente centimètres, et non intentionnel puisque le propriétaire victime de cet empiétement ne pourrait « en exiger la suppression que dans le délai de deux ans de la connaissance de celui-ci, sans pouvoir agir plus de dix-ans après l'achèvement des travaux » comme il est affirmé dans l'article 539 du Projet de réforme du droit des biens. Ainsi, passé ce délai le propriétaire victime de l'empiétement et le constructeur pourront seulement solliciter en justice le transfert de la propriété à l'auteur de l'empiétement en contrepartie d'une indemnisation de la victime. Ce qui constituerait donc la fin du recours systématique à la destruction de l'empiétement et sa substitution par le versement d'indemnité et le transfert de propriété. [...]
[...] Or la décision de fixer des tirants d'ancrage de manière à empiéter sur la propriété voisine, a été prise par la société s'occupant des travaux de construction, c'est-à-dire la société Bazin. Mais en prenant la décision automatique de sanctionner l'empiétement par sa destruction, c'est le propriétaire des fonds sur lesquels un immeuble était en construction qui est directement sanctionné alors qu'il n'a pas commis de faute. Il aurait fallut engager la faute de la société s'occupant des travaux. Nous savons maintenant que la démolition de l'empiétement est une sanction stricte et que l'usage de la faute dans une telle situation aurait été plus efficace. [...]
[...] Mais une telle sanction est elle légitime ? Ne peut-on pas procéder autrement ? C'est ce que nous verrons dans notre seconde partie. La destruction des constructions : sanction de tout empiétement sur la propriété d'autrui Nous savons que la sanction d'un empiétement sur la propriété d'autrui est sa destruction mais n'est ce pas une sanction sévère et démesurée ? Malgré le fait que cette décision paraisse sévère, elle est automatiquement appliquée par la Cour de cassation La suppression d'un empiétement sur la propriété voisine, une sanction sévère et démesurée : La troisième chambre civile de la Cour de cassation sanctionne donc l'empiétement de tirants d'ancrage dans la propriété avoisinante, durant la construction d'un édifice sur une propriété par la destruction, la suppression de la construction litigieuse. [...]
[...] En effet, en prenant une telle décision la Cour de cassation est aveuglée par la volonté ne pas autorisé l'expropriation de propriété d'autrui dans le cadre d'un empiétement de la dite propriété. Ce qui fait que cette dernière ne prend pas en compte les réalités économiques de la situation notamment pour le propriétaire de fonds, qui désirait construire un immeuble sur sa propriété, en ne prenant pas en compte le rapport de l'expertise judiciaire, qui affirmait l'impossibilité de la démolition. Ainsi, il n'y aurait pas d'équité puisque la Cour de cassation favorise d'instinct le propriétaire lésé dans une telle situation. La démolition de l'empiétement semble donc sévère et démesurée comme sanction. [...]
[...] Mais n'est ce pas une sanction sévère et démesurée ? En effet, nous savons que l'empiétement qu'il ya eu dans la propriété de M.X est un empiétement des tréfonds, c'est-à-dire des sous sol, donc qui n'est pas visible. De plus, nous savons que lorsqu'un immeuble est en construction il est fréquent de poser des tirants d'ancrage pénétrant assez profondément dans le terrain voisin pour retenir des ouvrages de soutènement d'une importante hauteur mais lorsque l'immeuble est construit, ces tirants sont généralement supprimés. [...]
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