responsabilité, commettant, du, fait, préposé, cassation, 25, février, 2000
En disposant que les maîtres et commettants sont responsables des dommages causés par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils sont employés, l'article 1384 alinéa 5 du Code civil détermine la responsabilité du commettant du fait de son préposé. Mais ce fait peut-il toujours engager la responsabilité personnelle du préposé? La question s'est posée à la suite d'un épandage d'herbicides réalisé par hélicoptère et qui a causé un dommage au propriétaire d'un terrain voisin des commanditaires de l'opération. Le pilote de l'hélicoptère contestait le fait que sa responsabilité soit retenue alors qu'il avait agi dans les limites de la mission qui lui avait été impartie par son commettant. Il considérait que cette circonstance devait exclure sa responsabilité au profit de celle du seul commettant. L'Assemblée plénière lui a donné raison, instituant une véritable immunité au profit du préposé qui n'a pas excédé les limites de sa mission. Cette reconnaissance a entraîné une évolution dans la nature juridique de la responsabilité du commettant du fait de son préposé.
À l'origine, la responsabilité du commettant a été conçue comme une simple garantie de la solvabilité du préposé au profit de la victime. Il était alors tout à fait possible de laisser subsister à côté de la responsabilité du commettant celle du préposé dans la mesure où il demeurait le débiteur principal de l'indemnisation. À ce titre pesait sur lui une lourde responsabilité: non seulement la victime pouvait choisir d'agir uniquement contre lui sans qu'il puisse appeler en garantie son commettant (sauf à démontrer la faute personnelle de celui-ci), mais si elle se retournait contre le commettant, celui-ci pouvait exercer un recours contre lui après avoir indemnisé la victime.
Des critiques se sont alors élevées faisant valoir qu'il était injuste de rendre responsable le préposé des dommages causés alors qu'il travaille pour le compte, avec les moyens et sous l'autorité de son commettant. La doctrine considère illégitime de faire supporter au préposé les conséquences d'éventuels défauts d'organisation de l'entreprise qui ne lui sont pourtant pas imputables. Sensible à ces critiques, l'assemblée plénière de la Cour de cassation, dans l'arrêt du 25 février 2000, a transformé la responsabilité du commettant du fait de son préposé en une garantie profitant également au préposé. Elle refuse d'engager la responsabilité du préposé, au moins lorsqu'il n'a pas commis de faute caractérisée.
[...] En revanche, le commettant peut toujours engager la responsabilité contractuelle de son préposé s'il démontre une « faute lourde équipollente au dol ) ou exercer son recours contre le préposé qui n'a pas agi dans les limites de sa mission. La responsabilité du commettant est devenue exclusive. Elle intervient en cas de dommage causé par le préposé qui est resté dans les limites de la mission qui lui a été impartie par le commettant. Cette responsabilité du commettant est même alourdie puisqu'elle est engagée même si le fait du préposé n'est pas susceptible d'engager la responsabilité personnelle du préposé. [...]
[...] On a proposé comme exemple le cas du préposé, gardien d'un entrepôt qui volerait les objets confiés à sa surveillance. Dans cette situation, on retrouvera les règles habituelles de la responsabilité du commettant du fait de son préposé: le cumul de responsabilités et, puisqu'il est responsable, la possibilité pour la victime de poursuivre directement le préposé ou pour le commettant actionné, d'exercer un recours contre celui-ci. La responsabilité du préposé est aujourd'hui déterminée par référence à la faute commise en outrepassant les limites de sa mission. [...]
[...] 1'·,9 novembre 2004). La jurisprudence postérieure a introduit une certaine incertitude quant au caractère intentionnel de la faute pénale. Certaines décisions admettent la condamnation d'un préposé qui a commis une infraction non intentionnelle (Crim juin 2005) alors que d'autres l'excluent (Crim mars 2006). La chambre sociale de la Cour de cassation a franchi un nouveau pas dans une décision du 21 juin 2006. Selon elle, le salarié peut voir sa responsabilité engagée à l'égard des tiers même en l'absence d'une condamnation pénale. [...]
[...] Cela ne veut pas dire que le commettant ne sera pas responsable du fait de son préposé mais seulement que les tiers ne peuvent plus agir directement contre celui-ci. Mais alors, si le préposé n'outrepasse pas les limites de sa mission, la victime n'a plus qu'un seul débiteur, le commettant. Ceci n'est possible que si on admet un changement dans le fondement de la responsabilité du commettant. Désormais la responsabilité du commettant a pour objet de garantir le préposé lui-même pour les actes accomplis dans le cadre de ses fonctions et non plus de garantir la victime contre l'insolvabilité de celui-ci. [...]
[...] Le pilote de l'hélicoptère contestait le fait que sa responsabilité soit retenue alors qu'il avait agi dans les limites de la mission qui lui avait été impartie par son commettant. Il considérait que cette circonstance devait exclure sa responsabilité au profit de celle du seul commettant. L'Assemblée plénière lui a donné raison, instituant une véritable immunité au profit du préposé qui n'a pas excédé les limites de sa mission. Cette reconnaissance a entraîné une évolution dans la nature juridique de la responsabilité du commettant du fait de son préposé. [...]
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