Régime, primaire, association, conjugale, charges, mariage, cassation, 23 juin 1970
Dès le XVI ème siècle, le juriste Antoine Loysel désignait le mariage sous le célèbre apophtegme « Boire, manger, coucher ensemble, c'est mariage ce me semble ». Par cette sentence, il annonçait déjà les fondements juridique du mariage repris dans le statut primaire du code civil.
Encore aujourd'hui, le code civil prévoit diverses prescriptions alimentaires implicites comme l'obligation de contribution aux charges du ménage à l'article 214 ou encore le devoir d'assistance entre époux à l'article 212. C'est précisément l'application et la confusion de ces deux textes légaux qui posèrent difficultés dans cet arrêt de principe rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 23 juin 1970.
La requérante, en procédure de divorce avec son époux, demandait le versement d'une pension alimentaire au titre de la contribution aux charges du ménage prévue par l'article 214 du code civil. Le mari de la requérante, soit le défendeur, refusait de s'exécuter estimant que cette dernière n'était pas dans le besoin comme en dispose l'article 212 du code civil. La requérante assigna donc son mari en justice au motif que ce dernier refusait de contribuer aux charges du mariage.
Par un arrêts du 26 juin 1968, la Cour d'appel de Rennes débouta la requérante de sa demande au motif « qu'il n'était pas possible de dire que la demanderesse était dans le besoin ».
Cette dernière forma alors un pourvoi en cassation, comme le prévoit l'article 366-5 du code de procédure civile1., sur le moyen selon lequel non seulement l'attribution d'une pension alimentaire au titre de la contribution aux charges du ménage prévue à l'article 214 du code civil n'était pas conditionnée par la nécessité du conjoint d'être le « besoin » mais, de plus, que le calcul de cette annone devait nécessairement se faire « selon les facultés » respectives des parties au litige.
La Cour de cassation devait donc établir si la contribution aux charges du ménage, et son corollaire à savoir l'octroie d'une pension alimentaire, était subordonnée à un état de besoin de l'un des époux. De manière secondaire, il fallait également trancher la question quand à savoir s'il fallait prendre en compte l'étendu des ressources de chaque partie pour le calcul de la pension alimentaire (et donc, plus généralement pour la contribution aux charges du mariage).
Au visa de l'article 214 du code civil, la première chambre civile de la Cour de cassation fit droit à la demande de la requérante en indiquant dans un attendu de principe que « chacun des époux » était « tenu de contribuer aux charges du ménage « selon ses facultés », même si son conjoint n'est pas dans le besoin ».
[...] Dès lors, il importe peu de savoir à quelle hauteur exacte participe financièrement chacun des époux pour les contributions aux charges du mariage. Les époux, s'ils ne font pas de contrat de mariage, sont tenus de participer aux charges du mariage selon « leurs facultés ». Ils peuvent également convenir d'une répartition de ces charges dans le contrat de mariage13. Article 214 du code civil « Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ». [...]
[...] Au final, il apparaît bien difficile de savoir sur quelle fondement sont dues ces fameuses charges alimentaires puisque tant l'article 212 que 214 du code civil permette d'en justifier le paiement semble t-il. Il faut donc savoir si l'on rattache le paiement de la charge alimentaire à l'article 212 du code civil ou bien alors à l'article 214? C'est le dilemme que devait trancher la Cour d'appel de Rennes. Pour sa défense, son choix n'est pas tellement illogique. La pension alimentaire est pension « versée à titre d'aliments, c'est à dire en exécution d'une obligation alimentaire ( . [...]
[...] « L'impôt sur le revenu constitue la charge directe des revenus personnels des époux, étrangère aux besoins de la vie familiale, et ne figure pas au nombre des charges du mariage auxquelles les deux époux doivent contribuer » Civ 1ère février Si cette distinction semble claire, elle reste néanmoins ambiguë puisque la contribution aux charges du mariage recouvre également les dépenses alimentaires ce qui explique la méprise de la Cour d'appel de Rennes. Le corollaire: l'application incorrecte du régime des pensions alimentaires La distinction entre le devoir de secours et la contribution aux charges du mariage n'est pas évidente nous l'avons vu et cela pose d'autant plus problème pour savoir sur quel fondement doivent être attribuer les pensions alimentaires. Doivent-elles l'être au titre du devoir de secours existant entre chaque époux ou bien en raison de la contribution aux charges du mariage partagée entre les couples mariés ? [...]
[...] Le devoirs de secours possède un caractère alimentaire marqué, l'époux qui se voit opposer ce devoir par son conjoint « dans le besoin » doit simplement s'assurer qu'il puisse vivre au sens strict du terme. Ce devoir de secours apparaît donc lorsque l'époux, en état d'impécuniosité, ne peut subvenir par lui-même à ses besoins vitaux. Le devoir de participation aux charges du mariage ne fait pas l'objet d'une définition claire. Il s'agit d'une notion-cadre que le Législateur a volontairement voulu imprécis pour permettre au préteur d'y intégrer un nombre important de dépense nécessaire à la vie maritale. [...]
[...] La première relève de la mise en oeuvre forcée de la contribution aux charges du mariages par le juge. En effet, le régime de recouvrement par exécution forcée est calqué sur le modèle du paiement de la pension alimentaire (Loi n° 73-5 du 2 janvier 1973 relative au paiement direct de la pension alimentaire). Difficile de ne pas voir une relation implicite entre pension alimentaire et pension due pour contribution aux charges du mariage. Il est tentant d'y voir une même et unique pension. Seconde observation qui tient de la terminologie pure. [...]
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