Qualification, clause, alsacienne, cassation, 17 novembre 2010
En l'espèce, les époux X et Y se sont mariés sous le régime de la communauté universelle, leur contrat de mariage comprenant une clause stipulant qu'en cas de dissolution de la communauté pour une autre cause que celle du décès de l'un des époux, une clause de reprise des biens apportés par l'un des époux ou advenus à titre personnel pendant la durée du régime. Le jugement de divorce des époux a été prononcé le 12 mars 2002 aux torts exclusifs de l'épouse. Lors des opérations de partage et de liquidation de la communauté, l'ex époux a demandé le report des effets du divorce, en ce qui concerne les biens des époux a la date de leur séparation de fait, et l'ex épouse s'est prévalue de la clause de report pour un immeuble qu'elle avait reçu par donation au cours du mariage, pour moitié indivise en nue propriété.
La CA ayant fait droit a la demande de l'ex épouse en lui accordant le bénéfice de la clause de report, et ayant rejeté la demande de report, des effets du divorce a la séparation de fait, par l'ex époux. Celui-ci forme un pourvoi sur les moyens tirés, d'une part d'un manque de base légale au regard de l'article 262-1 CC en ce que les effets du divorce peuvent être reportés à la date où les époux ont cessé de cohabiter et de collaborer, la cessation de la cohabitation faisant présumer la cessation de la collaboration, et que la seule circonstance que son ex épouse se soit porter, postérieurement a la cessation de cohabitation, coemprunteur pour un prêt qu'il a consenti ne suffit pas a caractériser une collaboration.
D'autre part, sur le moyen tiré de la violation des articles 1134 et 267 CC, en ce que ce dernier texte dispose que lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'un des époux, celui-ci perd de plein droit toutes les donations et tous les avantages matrimoniaux que son conjoint lui avait consentis. Ainsi, une clause de reprise des apports consentis entre les époux est un avantage matrimonial, dont l'époux a qui le divorce est exclusivement imputable ne peut se prévaloir.
[...] Car si elle consent a l'écarter lorsqu'existe des relations patrimoniales résultant de la volonté commune des époux, en revanche, elle souligne que ces relations patrimoniales doivent être distinctes des obligations résultant du mariage, c'est a dire des dispositions du régime primaire, ainsi que des obligations résultant du régime matrimonial. Ainsi, cette collaboration des époux ne peut pas trouver son fondement dans des obligations alimentaires, des pensions, etc. mais seulement dans des obligations consentis par les deux époux. Il faut en quelque sorte la preuve d'une obligation solidaire voulant communément. [...]
[...] Pour contrecarrer la contrainte de cette indivision, notamment dans les cas où les époux avaient des biens que l'article 1405 alinéa 1er CC qualifie de propre dans le cadre du régime légal, la clause de reprise des apports a pour objectif de ne pas soumettre a l'indivision ces biens en question. L'époux s'est prévalu du caractère d'avantage matrimonial de ce type de clause au moyen de son pourvoi pour que justement le bénéfice de cet avantage soit retiré a son épouse, le divorce ayant été prononcé a ses torts exclusifs, l'ancien article 267 CC en disposant ainsi. De cette manière, le bien immeuble que l'épouse avait reçu en donation par moitié indivise en nue propriété tomberait en communauté, et la dissolution du régime par moitié indivise s'appliquerait. [...]
[...] La clause visée n'a donc pour but de que de restreindre l'application de cet avantage au moment de la dissolution du mariage. Ce ne peut donc pas être un avantage matrimonial. C'est en ce sens que s'est prononcé le législateur, dans la loi du 23 juin 2006, en visant implicitement ce type de clause, par insertion d'un alinéa 3 a l'article 265 CC qui dispose que « toutefois, si le contrat de mariage le prévoit, les époux pourront toujours reprendre les biens qu'ils auront apportés a la communauté ». [...]
[...] La Cass avait admis depuis longtemps que la cessation de cohabitation faisait présumé celle de collaboration. Cette solution était protectrice de l'époux qui avait, comme en l'espèce, acquis des biens, notamment immobilier, postérieurement a la séparation de fait, en ce qu'il n'avait a prouver que la cessation de cohabitation. Il incombait en revanche au conjoint d'apporter la preuve d'une collaboration post séparation de fait. Ainsi, cette présomption lui octroyait le bénéfice du report des effets du divorce a la date de la séparation, et de cette manière le bien acquis lui resté personnel. [...]
[...] Deux questions se posent : d'une part celle de savoir si la présomption de collaboration en cas de cessation de la cohabitation peut être renversée par la seule circonstance que les époux se soient porté coemprunteurs, postérieurement a cette séparation de fait ? D'autre part, celle de savoir si une clause de reprise des apports stipulés dans un contrat de mariage peut s'analyser comme un avantage matrimonial consenti entre époux ? La Cass répond a l'affirmative a la première question et rejette le pourvoi au motif que « l'existence de relations patrimoniales résultant de la volonté commune des époux, allant au-delà des obligations découlant du mariage ou du régime matrimonial, caractérise le maintien de la collaboration des époux ». [...]
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