autorité de la chose jugée, bien immobilier, protection des droits du demandeur, arrêt Cesareo, droit de préférence
Depuis le véritable coup de tonnerre juridique provoqué par l'arrêt Cesareo rendu par l'assemblée plénière le 7 juillet 2006, la jurisprudence n'a eu de cesse d'élargir encore et toujours la définition de l'autorité de la chose jugée au détriment du demandeur à l'instance. Mais quelles sont les limites de cette immixtion prétorienne dans les droits de la défense ? L'arrêt rendu par la 2ème chambre civile le 26 mai 2011 apporte une réponse salutaire à ce problème.
En l'espèce, le bénéficiaire d'un pacte de préférence portant sur l'acquisition d'un immeuble accepte l'offre d'acquisition faite par le propriétaire. Mais une société venant aux droits du propriétaire s'oppose à ce transfert de propriété et assigne le bénéficiaire en déclaration de la déchéance de son droit de préférence.
[...] En effet, après avoir rappelé ''qu'il incomb[ait] au demandeur de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur la même cause'', la Cour d'appel en avait conclu que l'action tendant à ''voir constater la perfection de la vente'' et celle ayant pour but le ''paiement des loyers de l'immeuble échus depuis l'entrée en jouissance'' du bénéficiaire procédaient de la même cause. Or, en l'espèce, la Cour de cassation retient logiquement que les objets des demandes successivement formées par le demandeur dans chacun des procès sont très différents. Lors du premier procès, celui-ci demande la reconnaissance de son droit de propriété tandis que dans le deuxième, la demande porte sur le paiement des loyers découlant de la reconnaissance de sa qualité de propriétaire depuis l'acceptation du pacte de préférence. [...]
[...] L'arrêt d'espèce ramène fort heureusement la place des parties et du juge à leurs proportions initiales qui faisaient son intérêt dans le cadre d'une bonne administration de la justice. Cet recherche d'équilibre est une réponse à au conflit permanent entre la tempérance et la profondeur que nécessite un bon jugement et l'impératif de célérité de la justice afin de contrer l'encombrement des tribunaux. L'utilisation du principe de la concentration des moyens apparaît ainsi comme un instrument améliorant les processus de gestion de sa charge de travail par le juge en responsabilisant les parties. [...]
[...] Suite à cela, le bénéficiaire désormais propriétaire ouvre un deuxième procès dans le but de récupérer de la société le montant des loyers que cette dernière a perçu depuis l'entrée en jouissance de ce dernier. La Cour d'appel rejette la demande du propriétaire en retenant le principe de concentration des moyens, au motif que le demandeur aurait dû dès la première instance du précédent procès exiger le paiement des sommes dues selon lui faute de quoi sa demande se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt déclarant la vente parfaite. [...]
[...] Mais pour ne pas tomber dans l'excès inverse, la Cour de cassation annonce très solennellement dans son attendu de principe le plus simple et rigoureux est de s'en tenir rigoureusement à la lettre du Code qui prévoit sagement les choses. [...]
[...] Ce dernier avait consacré le principe de concentration des moyens, soit le fait qu'un demandeur doit formuler tous les moyens en soutient à sa demande dès la première instance. Si ce dernier apporte des nouveaux moyens dans des étapes ultérieures du procès, ces derniers ne peuvent être de nature à écarter l'autorité de la chose jugée. La voie d'action se referme donc sur la demande initiale. Cette lecture de l'article 1351 du Code civil qui subordonne l'autorité de la chose jugée au triptyque des identités d'objet, de cause et de parties est tout à fait cohérente et respectueuse du droit. [...]
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