Préjudice spécifique de contamination
On sait depuis les années 1970 que le plasma sec transfusé aux hémophiles transmet des hépatites B et C (VHC), alors que l'albumine purifiée, produit de fractionnement pasteurisé, a les mêmes indications sans présenter les risques de transmission d'hépatites. Pourtant, le plasma sec n'a été interdit en France qu'en 1987, semble-t-il pour des raisons financières (rentabilisation des installations de dessiccation du plasma). On estime que 300 000 personnes en France ont été infectées par le VHC suite à une transfusion, et en 2006 ce chiffre a plus que doublé.
En l'espèce, dans l'arrêt que nous avons à commenter du 1er avril 2003, rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, Mme X subit une intervention chirurgicale en 1982 au cours de laquelle elle est transfusée par deux fois. En 1993 on lui diagnostique une hépatite C que des experts déclarent avoir pour origine les transfusions de 1982. La victime fait alors assigner le centre donneur (CDTS) en réparation de son préjudice corporel : il lui est fait droit en 1ère instance, ainsi qu'en appel (Metz, 7 septembre 2000). L'appelant forme alors un pourvoi, scindé en deux branches dont l'objectif principal est de contester la condamnation à réparer le préjudice personnel de contamination de la victime. Tout d'abord le pourvoi invoque le fait que la contamination par le virus de l'hépatite C ne constitue pas un préjudice spécifique de contamination au de l'article 1147 du Code civil et des articles 47-I et III de la loi du 31 décembre 1991 sur le VIH. De plus, le préjudice de contamination a un caractère personnel : il comprend l'ensemble des préjudices de caractère extrapatrimoniaux. Or, pour en avérer l'existence, la Cour d'appel s'appui sur un préjudice matériel et a donc mal appliqué les articles précités.
La question qui est donc posée à la Cour de cassation est de savoir comment la qualification du préjudice spécifique de contamination doit être appréciée, afin de concevoir si elle peut s'appliquer aux victimes de transfusions contaminées par le VHC.
En l'espèce, la Cour de cassation rejette le pourvoi le 1er avril 2003. Selon elle, les juges du fond ont constaté l'importance de la maladie, ainsi que ses conséquences et son évolution possible, et qu'au vu de ces constatations, ont bien jugé de l'existence d'un préjudice spécifique de contamination. Quant à la somme allouée pour la réparation du préjudice, c'est une considération de fait et reste donc de l'appréciation souveraine des juges du fond.
Ainsi, pour tenter de comprendre la réponse apporter par la Cour de cassation, nous étudierons dans un premier temps l'ouverture faire par la Cour du préjudice spécifique de contamination (I), puis dans un second temps nous verrons que cet arrêt réalise une avancé encore insuffisante dans la diminution des facteurs d'incertitude touchant à la réparation des dommages (II).
[...] L'appelant forme alors un pourvoi, scindé en deux branches dont l'objectif principal est de contester la condamnation à réparer le préjudice personnel de contamination de la victime. Tout d'abord le pourvoi invoque le fait que la contamination par le virus de l'hépatite C ne constitue pas un préjudice spécifique de contamination au de l'article 1147 du Code civil et des articles 47-I et III de la loi du 31 décembre 1991 sur le VIH. De plus, le préjudice de contamination a un caractère personnel : il comprend l'ensemble des préjudices de caractère extrapatrimoniaux. [...]
[...] L'idée du principe de l'automatisation du préjudice de contamination est expliquée par Viney, selon lui, elle consiste à regrouper les préjudices moraux soustraits aux recours des tiers payeurs, permettant ainsi une évaluation globale et relativement généreuse de la somme qui sera effectivement versée à la victime C'est donc l'aspect financier qui est ici visé. Le but final de la qualification du préjudice de contamination est la réparation de l'ensemble du préjudice des victimes. En effet, la particulière gravité de la contamination subie mérite des considérations spéciales. Le fait est que les victimes ne pensent pas toujours à demander réparation pour l'intégralité de leur préjudice, mais seulement aux quelques parties les plus évidentes. [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Cour de cassation, 1ère chambre civile, 1er avril 2003. On sait depuis les années 1970 que le plasma sec transfusé aux hémophiles transmet des hépatites B et C alors que l'albumine purifiée, produit de fractionnement pasteurisé, a les mêmes indications sans présenter les risques de transmission d'hépatites. Pourtant, le plasma sec n'a été interdit en France qu'en 1987, semble-t-il pour des raisons financières (rentabilisation des installations de dessiccation du plasma). On estime que personnes en France ont été infectées par le VHC suite à une transfusion, et en 2006 ce chiffre a plus que doublé. [...]
[...] Il s'agit de la réparation en raison des souffrances éprouvées du fait des traitements, on parle à cet égard de precium doloris Le préjudice spécifique inclus ainsi dès la phase de séropositivité tous les troubles subits du fait de la contamination par le virus : réduction de l'espérance de vie, incertitude quant à l'avenir, crainte d'éventuelles souffrances physiques et morales, isolement, perturbation de la vie familiale et sociale, préjudice sexuel, et le cas échéant le préjudice de procréation. Lorsque la maladie est déclarée, apparait de nouveaux préjudices : souffrance déclarée, préjudices d'agrément qui sont consécutifs. La jurisprudence a donc considéré que la contamination par le virus du sida laissait apparaitre des aspects inhabituels du préjudice moral du aux troubles de l'existence. [...]
[...] Les situations des malades contaminés par le VIH ou le VHS sont donc très proches dans leurs conditions d'existences, et c'est cette similitude qui à en l'espèce amené la Cour de cassation à appliquer le préjudice spécifique de contamination à cette victime du VHC. Ainsi, nous sommes amenés à nous demander si cette situation caractéristique du SIDA et de l'hépatite [pourrait se retrouver] dans d'autres cas où l'origine de la maladie n'est pas transfusionnelle, mais réside, par exemple, dans l'inhalation de poussières d'amiante ou le contact avec des produits cancérogènes ou l'ingestion d'aliments contaminés ou de médicaments défectueux (G. [...]
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