Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 13 janvier 1993, action paulienne, fraude
Dans cette affaire, un homme a vendu à sa concubine le 22 septembre 1984 à un prix inférieur au marché un appartement constituant leur résidence, acquis à l'aide d'un prêt consenti par une banque en 1981. L'homme s'est vu réclamer une somme d'argent par une société en exécution d'un engagement de caution. Cette société l'a ensuite assigné en justice le 4 novembre 1983. Le tribunal a alors condamné le débiteur au paiement le 30 octobre 1984. La société, suite à la vente effectuée, a attrait en justice la concubine pour la faire annuler. La cour d'appel a rejeté la demande en retenant qu'à la date de la condamnation, le 30 octobre 1984, la vente avait déjà été effectuée et que donc la société ne disposait pas d'un principe certain de créance. Le préjudice de la société n'était donc pas établi. Enfin, la cour a considéré que la vente était un moyen d'apurer la dette du débiteur envers la banque et que le fait qu'elle ait été conclue à un prix inférieur au marché ne suffisait pas à prouver la fraude au préjudice de la société créancière. La société s'est alors pourvue en cassation. Elle voulait que la vente consentie en fraude de ses droits lui soit reconnue inopposable.
[...] « Les conditions favorables [de la vente] ne suffisent pas à démontrer la fraude au préjudice » de la société. Le fait de vendre à un prix inférieur au marché n'est pas caractéristique d'une volonté de nuire à son créancier et donc d'une fraude mettant en péril les droits du créanciers. La Cour de cassation va cependant refuser cette conception de l'action paulienne en réaffirmant des caractéristiques précises nécessaires à sa mise en œuvre et présentes, selon elle, en l'espèce. [...]
[...] La Cour de cassation dans cet arrêt va également définir la notion de fraude paulienne permettant l'annulation d'un acte litigieux. II La clarification appréciable de la notion de fraude paulienne L'arrêt va de plus affirmer que l'acte frauduleux n'a pas nécessairement besoin d'avoir été accompli dans le but de nuire aux intérêts du créancier Les définitions précisées de l'action et de la fraude paulienne vont ainsi avoir d'autres applications ultérieures La simple connaissance du préjudice causé au créancier, caractéristique suffisante de détermination de la fraude L'arrêt va relever que selon l'article 1167 du Code civil la fraude « résulte de la seule connaissance qu'a le débiteur du préjudice qu'il cause au créancier en se rendant insolvable ou en augmentant son insolvabilité ». [...]
[...] Le premier a été rendu en janvier 1987 par la même chambre de la Cour. Il énonce que la dette de la communauté résultant d'engagements de caution donnés par le mari à une banque pendant le cours de la communauté et antérieurement à une donation-partage que les époux ont consentie à leurs enfants, est née, quelle que soit la date de son exigibilité, antérieurement à cette donation. Par suite, les créanciers antérieurs à l'acte frauduleux pouvant exercer l'action paulienne, l'arrêt qui relève que cette donation-partage portait sur des biens communs, en déduit à bon droit et sans avoir à rechercher si la femme était complice de la fraude, que cette donation était inopposable à la banque créancière de la communauté. [...]
[...] Cet arrêt permet donc de rappeler les conditions nécessaires à la mise en œuvre d'une action paulienne et met fin au flou existant autour de la notion de fraude paulienne (II). I L'utile rappel de la double condition de mise en application de l'action paulienne La Cour de cassation va dans cet arrêt relever l'erreur de la juridiction de second degré afin de la corriger en reprécisant au passage les conditions requises pour que le créancier puisse exercer l'action paulienne Les erreurs manifestes de la cour d'appel corrigées Selon l'art 1167 du Code civil, les créanciers « peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits. [...]
[...] Tout d'abord le créancier n'aurait pas bénéficié « à la date de la vente d'un principe certain de créance ». Ce principe certain signifie qu'au 22 septembre 1984 il aurait fallu que le débiteur ait déjà été condamné à payer, alors que ce ne fut le cas qu'au 30 octobre 1984. En affirmant ce principe la cour d'appel se base sur un arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation du 2 mai 1989 qui énonçait que « l'action révocatrice ne peut être exercée efficacement que si les droits du créancier sont antérieurs à l'acte critiqué ». [...]
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