Codification à droit constant, chambre commerciale, article L.144-7, Code de commerce, abrogation, locataire gérant, article 954
L'arrêt rendu le 4 avril 2006 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation intéresse la codification à droit constant ainsi que le rôle du juge. À la suite d'un prêt consenti à un locataire-gérant, le prêteur a assigné, compte tenu de la défaillance de l'emprunteur, le propriétaire du fonds de commerce sur le fondement de « l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 » attribuant alors une responsabilité solidaire du propriétaire avec le locataire-gérant.
Alors que le prêteur avait vu sa demande rejetée en première instance, la cour d'appel le déboute de son appel. La juridiction énonce pour ce faire « qu'en application des dispositions de l'article 954 du nouveau code de procédure civile les conclusions d'appel doivent formuler expressément les moyens de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée. » Or, dans ses conclusions, le prêteur exprime sa demande selon les dispositions de « l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 ». Or ce texte n'existant plus depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n 2000-912 du 18 décembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce, la cour d'appel juge que ce texte ne peut être invoqué comme moyen de droit.
Le juge devait-il remplacer la disposition abrogée par une codification à droit constant par la norme du texte applicable ?
La Chambre commerciale de la Cour de cassation censure la décision de la cour d'appel, au visa de l'article L. 144-7 du Code de commerce. En effet, elle énonce que « l'abrogation d'une loi à la suite de sa codification à droit constant ne modifie ni la teneur des dispositions transférées ni leur portée ». Il faut désormais se référer à cet article L. 144-7 en ce qui concerne « l'action en paiement d'une dette contractée par le locataire-gérant à l'occasion de l'exploitation de son fonds. ».
La cour de cassation répond donc par l'affirmative. Sa décision permet d'éclairer d'une part les conséquences de la codification (I) et d'autre part le rôle du juge (II)
[...] En effet nous pouvons nous appuyer sur trois articles. Tout d'abord, l'article 954 du Code de Procédure Civil énonce Les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée. Elles comprennent en outre l'indication des pièces invoquées. À cet effet, un bordereau récapitulatif leur est annexé. C'est d'ailleurs sur cet article que l'arrêt rendu par la cour d'appel s'est fondé les conclusions d'appel doivent formuler expressément les moyens de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée Or nous pouvons constater qu'une loi abrogée ne peut constituer valablement un moyen de droit puisqu'une fois abrogée, la loi ne produit plus d'effet dans l'avenir. [...]
[...] Ainsi nous pouvons affirmer que la codification est complexe pour le requérant. Elle est, en effet, difficile d'accès. François Terré parle même d'un stakhanovisme législatif qui n'a nulle part au monde fait ses preuves et d'une incompréhension majeure du rôle du temps dans le droit et de la signification des existants. Nous pouvons tout d'abord souligner que cette codification à droit constant entraîne une multiplication de texte puisqu'ils sont retranscrits tels quels sans modification. Cette multiplication des sources entraîne donc des complications pour le requérant pour pouvoir trouver ce qui l'intéresse. [...]
[...] La cour de cassation répond donc par l'affirmative. Sa décision permet d'éclairer d'une part les conséquences de la codification et d'autre part le rôle du juge I. Une décision éclairant les conséquences de la codification La Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 4 avril 2006, met en avant les caractéristiques de la codification à droit constant ainsi que les inconvénients de cette codification A. Les caractéristiques de la codification à droit constant La codification à droit constant est une codification purement formelle. [...]
[...] Nous pouvons également remarquer que cette affirmation par la Cour de cassation n'était pas obligatoire. La chambre commerciale a voulu, de son propre chef, éclaircir les spécificités de cette codification ambiguë. Ainsi la Cour de cassation réaffirme que les dispositions doivent être retranscrites telles quelles dans les codes codifiés à droit constant, comme ici le Code de commerce, et que la valeur de ses textes , la portée doit restée inchangée. Nous pouvons alors en déduire par rapport à cet arrêt que l'article 8 de la loi du 20 mars 1956 invoquée par le requérant et retranscrit à l'identique dans le Code de commerce à l'article L.144-7 (faisant d'ailleurs expressément référence à cet article de loi) a la même valeur et portée que l'article 8 de cette loi abrogée. [...]
[...] Ce problème est d'autant plus important lorsque les avocats ne sont pas présents, ce qui est notamment le cas en matière civile, avec la procédure accusatoire. Les parties et elles seules ont alors la direction du procès. Elles lui donnent l'orientation qu'elles décident ensemble ou séparément. Le juge n'intervient pas pour corriger, compléter, rechercher les faits. On peut ainsi se demander quel est le rôle du juge explicité dans cette décision étant donné la complexité de la codification à droit constant. II. [...]
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