Le thème de la responsabilité du banquier préteur est toujours d'une actualité brulante. Après les 4 arrêts rendus par la chambre civile le 12 juillet 2005, la chambre commerciale vient à son tour d'apporter une nouvelle pierre à l'édifice aux termes de trois arrêts rendus le 3 mai 2006.
En l'espèce, une société de crédit- bail a consenti un crédit-bail destiné au financement de l'acquisition d'un terrain et de la construction d'un bâtiment à usage commerciale d'une SCI dont le capital était réparti principalement entre MZ (dirigeant) et son épouse, ainsi que leur fille. L'opération était notamment garantie par le cautionnement de ces trois personnes. La SCI a été mise en liquidation judiciaire et la société de crédit-bail a actionné les cautions. Ils ont été déboutés de leur action par la Cour de Paris. Leur pourvoi est rejeté au motif qu'ils étaient engagés dans une opération commerciale importante à laquelle ils étaient directement impliqués et ils ne démontrent pas que la crédit bailleresse ait eu, sur leur situation et leurs facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération entreprise par la SCI, des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées, qu'en l'état de ces constatations, dont il se déduisait que les intéressés détenaient toutes les informations utiles pour leur permettre d'apprécier la portée des engagements qu'ils souscrivaient la Cour d'Appel a pu décider sans encourir les griefs du moyen que la crédit bailleresse n'était tenue d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de ces cautions. La fille Z a également intenté une action en responsabilité contre la société de crédit bail. Là encore elle a été déboutée de sa demande par la Cour de Paris. Mais au visa de l'article 1147 du Code Civil, la Cour de Cassation censure cette décision aux motifs qu'en se déterminant ainsi sans rechercher si, eu égard à son âge lors de l'engagement litigieux, à sa situation d'étudiante et à la modicité de son patrimoine, l'engagement souscrit par Melle Z qui n'exerçait aucune fonction de direction, ni aucune responsabilité au sein de la SCI, n'était pas hors de proportion avec ses facultés financières et si de ce fait la crédit bailleresse n'avait pas manqué à son devoir de mise en garde à l'égard de cette caution, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Il est admis de longue date que la caution poursuivie en paiement peut obtenir une décharge totale ou partielle si elle peut démontrer que le créancier à engager sa responsabilité civile. Les conditions de cette dernière ne sont donc pas sans incidence à l'égard du cautionnement. Ainsi la Cour de cassation avait été invitée ici à répondre à la question de savoir si les cautions peuvent invoquer le manquement de la banque à son devoir de mise en garde pour engager sa responsabilité ?
La chambre commerciale consacre le devoir de mise en garde du banquier à l'égard de l'emprunteur et de la caution (I) sans toutefois définir précisément le contenu de ce concept (II)
[...] La chambre mixte de la Cour de Cassation consacrant l'appréciation in concreto (Cass Mixte 29 juin 2007) Par deux arrêts rendus le 29 juin 2007 en chambre mixte, la Cour de cassation a confirmé l'existence d'une obligation de mise en garde pesant sur la banque à l'égard des cautions ou emprunteurs non avertis (Cass. mixte juin 2007, deux arrêts publiés, 05- Epoux X et 06- Mme Régine Y). Dans la première espèce, l'emprunteur était un agriculteur qui avait souscrit une quinzaine de prêts. [...]
[...] La qualité de la victime du préjudice est primordiale. La Cour invite les juges du fond, pour retenir un éventuel devoir de mise en garde à la charge du banquier à l'encontre non pas de l'emprunteur mais de la caution, à prendre en compte l'âge de l'intéressée à la date de l'engagement litigieux, son statut (en l'espèce elle était une étudiante et n'avait semble-t-il aucune expérience de la vie des affaires, n'exerçant aucune responsabilité dans la société débitrice principale) et l'étendue de son patrimoine. [...]
[...] La qualité des contractants joue un rôle non négligeable. Le statut de professionnel de l'établissement de crédit lui impose des obligations d'information, de conseil, dont l'intensité variera en fonction du degré de connaissance de l'autre partie. Pour savoir si le banquier dispensateur de crédit (banquier prêteur et non banquier teneur de compte) est tenu ou non à un devoir de conseil, il faut tenir compte de paramètres théoriques à savoir le degré de connaissance de l'emprunteur et l'incidence de l'opération projetée ainsi que la capacité financière de l'emprunteur. [...]
[...] En effet très schématiquement, elle paraissait par principe écarter toute responsabilité du banquier à l'égard de l'emprunteur pour manquement à son devoir de conseil, une faute ne pouvant être retenue à son encontre que dans l'hypothèse où le banquier a consenti un crédit en connaissance de la situation financière fragile de l'emprunteur, que ce dernier aurait de son côté ignorée (Cass, com 24 septembre 2003) Par trois arrêts (destinés à marquer fortement les esprits) non pas identiques mais qui se rattachent à des cas suffisamment variés quant à la nature des crédits consentis et quant au profil des emprunteurs, pour que la chambre commerciale fasse, si l'on peut s'exprimer ainsi, le tour de la question sur sa doctrine, sur les obligations qui pèsent sur le banquier dispensateur de crédit. L'existence d'un devoir de mise en garde expressément consacré. La chambre commerciale va clairement affirmer l'existence d'un devoir de mise en garde du banquier et non un simple devoir de conseil 1. La reconnaissance d'un devoir de mise en garde L'existence d'un devoir de mise en garde est expressément consacré pour la première fois dans cette série d'arrêts. [...]
[...] En l'espèce, une société de crédit- bail a consenti un crédit-bail destiné au financement de l'acquisition d'un terrain et de la construction d'un bâtiment à usage commerciale d'une SCI dont le capital était réparti principalement entre MZ (dirigeant) et son épouse, ainsi que leur fille. L'opération était notamment garantie par le cautionnement de ces trois personnes. La SCI a été mise en liquidation judiciaire et la société de crédit-bail a actionné les cautions. Ils ont été déboutés de leur action par la Cour de Paris. [...]
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