Violation de l'acte de préférence, pacte de préférence, code civil, bien mobilier, donation partage
Certains pourvois en cassation permettent à la cour de cassation de donner son point de vue sur certaines notions de droit qui ne sont pas abordées par le code civil. Ainsi, ce cas d'espèce en pose une à la cour de cassation. En effet, une donation partage contenant un pacte de préférence sur un bien mobilier est effectué à Tahiti le 18 décembre 1957. Un des attributaires a transmis à son tour par une donation partage une partie de l'immeuble le 7 août 1985 à la société Emeraude sans pour autant prévenir le bénéficiaire du pacte de préférence, Madame X. Cette dernière décide alors de poursuivre l'acquéreur pour violation de l'acte de préférence, elle demande le paiement de dommages et intérêts et de lui permettre de se substituer à l'acquéreur.
[...] Cette solution qui a pour fondement juridique l'article 1142 du code civil a notamment été prononcé par la troisième chambre civile de la cour de cassation dans plusieurs arrêts dont celui du 30 avril 1997. Par ces décisions la Cour de cassation refuse alors de procéder à l'exécution forcée du pacte de préférence en cas de violation de ce dernier. C'est ainsi que la cour d'appel de Papeete a refuser d'accueillir la demande de substitution de Madame X en se référant à l'arrêt du 30 avril 1997. [...]
[...] Or cette publicité permet au tiers de connaître les droits personnels qui pèsent sur l'immeuble dont il souhaite devenir acquéreur. Ainsi, si le pacte de préférence avait fait l'objet d'une publicité au registre de la conservation des hypothèques, la Cour de cassation aurait dû considérer que l'acquéreur avait connaissance de l'existence du pacte et qu'il était donc de mauvaise foi. Enfin pour la preuve de l'intention du bénéficiaire d'utiliser son droit de préemption. Cette preuve portant sur l'état d'esprit du bénéficiaire peut être qualifié de diabolique. [...]
[...] La Cour de cassation opère ainsi avec cette solution un revirement de jurisprudence qui intervient après diverses controverses doctrinales survenu à la suite des arrêt du 15 décembre 1993 et 30 avril 1997. En effet, elle y reconnaît la possibilité pour le bénéficiaire d'un pacte de préférence de demander l'annulation de la vente et de se substituer au tiers, à l'acquéreur. Pour prononcer cette solution, la Cour de cassation s'est inspirée de l'avant projet Catala de réforme du droit de obligation qui comporte en son article 1154 une évolution importante: «l'exécution de faire s'exécute si possible en nature. [...]
[...] La troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt de principe du 26 mai 2006, décide de rejeter le pourvoi. En effet, la Cour de cassation estime que « si le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur, c'est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu'il a contracté, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir; qu'ayant retenu qu'il n'était pas démontré que la société Émeraude savait que Madame X avait l'intention de se prévaloir de son droit de préférence, la cour d'appel a exactement déduit de ce seul motif, que la réalisation de la vente ne pouvait être ordonnée au profit de la bénéficiaire du pacte.» Ce pourvoi contient donc une question complexe du droit. [...]
[...] Cette solution devrait s'appliquer à tous les pactes de préférences: « Si le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur, c'est à la condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu'il a contracté, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir.» Cet arrêt prononce deux conditions pour que le bénéficiaire puisse se substituer à l'acquéreur. En effet, le bénéficiaire doit établir que l'acquéreur avait connaissance de l'existence du pacte de préférence et que le bénéficiaire avait l'intention de s'en prévaloir. De plus, la Cour de cassation y apporte une condition temporelle c'est-à-dire que l'acquéreur devait avoir connaissance de ces éléments au moment où il achète le bien: «lorsqu'il a contracté». Enfin pour que la substitution intervienne il faut aussi que le bénéficiaire en fasse la demande. [...]
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