Pacte de préférence - prix imposé - droit de propriété - atteinte - article 544 du Code civil - caractère absolu du droit de propriété - dérogation au droit de propriété - droit de priorité - droit de préemption - droit civil des biens
La propriété est considérée comme un droit fondamentalement sacré en sorte que dès qu'une personne le possède, nulle restriction ne peut y être admise par principe ; il y aurait en effet matière à une atteinte, en soi intolérable. Toutefois, il semble que la question du caractère éminemment absolu du droit de propriété doive s'accompagner immédiatement de celle de l'éventuelle restriction, pour cause de nécessité publique impérieuse, posée par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC). Dans cette même perspective, et en élargissant quelque peu le champ de la mesure, la question se pose de savoir si l'intérêt général peut repousser l'étendue démesurée de la propriété et si encore le propriétaire peut lui-même déroger à « l'absoluité » de son droit. Telle semble être, en substance, le contenu d'un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 23 septembre 2009, en matière de contrat de vente et de pacte de préférence.
En l'espèce, une municipalité a consenti à l'achat d'un terrain par un couple marié, par contrat de vente incluant un pacte de préférence, lequel stipulait que pendant une durée de vingt ans, la commune disposait d'un droit de préemption sur l'achat du bien en cas de revente. La municipalité a exercé son droit de priorité. Les conjoints ont alors assigné le bénéficiaire du pacte pour faire annuler la clause instituant son droit de priorité sur le moyen qu'elle portait atteinte à leur droit de propriété.
[...] La municipalité a exercé son droit de priorité. Les conjoints ont alors assigné le bénéficiaire du pacte pour faire annuler la clause instituant son droit de priorité sur le moyen qu'elle portait atteinte à leur droit de propriété. Les juges du fond rejettent la demande au motif que les modalités attachées à la clause n'étaient, au regard de la durée, de la nature et de l'objet de l'opération, pas constitutives d'une atteinte au droit de propriété. Les promettants se pourvoient en cassation. [...]
[...] La commune se réservait, en cas de revente, le droit de préempter pour acquérir le bien à la place d'un tiers et ce, en vertu d'une priorité. Jusque là rien n'apparaît choquant puisque, si le pacte de préférence constitue un acte juridique par lequel un promettant s'engage, en cas de revente d'un bien, à le proposer aux mêmes conditions qu'aux tiers, à un bénéficiaire et qu'il confère à ce dernier un droit de priorité, il n'en demeure pas moins que la volonté du promettant de vendre le bien constitue un préalable indispensable. [...]
[...] La commune avait soustrait au marché le bien litigieux afin de le protéger de la spéculation et le proposer à la vente à des ménages qui, si tel n'avait pas été le cas, n'aurait pu accéder à sa propriété. Il y a donc de ce point de vue une difficulté à ne pas regarder le comportement des propriétaires comme étant manifestement de mauvaise foi, dans la mesure où, en plus de pouvoir disposer d'un bien normalement hors d'accès par le fait de la commune, il faudrait encore que ceux-ci puissent s'en attribuer une plus-value à laquelle la commune avait elle-même renoncée ! [...]
[...] Toutefois, il semble que la question du caractère éminemment absolu du droit de propriété doive s'accompagner immédiatement de celle de l'éventuelle restriction, pour cause de nécessité publique impérieuse, posée par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC). Dans cette même perspective, et en élargissant quelque peu le champ de la mesure, la question se pose de savoir si l'intérêt général peut repousser l'étendue démesurée de la propriété et si encore le propriétaire peut lui-même déroger à l'absoluité de son droit. Telle semble être, en substance, le contenu d'un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 23 septembre 2009, en matière de contrat de vente et de pacte de préférence. [...]
[...] Force est donc de constater qu'il existe bien une contraction, ici palpable, entre le droit et le fait. A ce titre, il est intéressant de constater, qu'abstraction faite des motifs de la décision, celle-ci recule devant la caractérisation d'une atteinte au droit de propriété, signe que celui-ci ne revêt plus la même force qu'autrefois. Sur la question de la portée d'un tel arrêt, il est difficile de trancher. En tout état de cause il faut se féliciter de ce que les juges du fond, confirmés par la Cour de cassation, soumettent les motifs de restriction au droit fondamental de propriété à un contrôle de validité dans une perspective de protection des contractants les plus faibles, notamment les consommateurs face aux professionnels ou à l'administration avec lesquels les contrats ne sont le plus souvent pas négociés mais sont plus facilement qualifiables d'actes-conditions ou de contrats d'adhésion. [...]
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