Commentaire d'arrêt, Première Chambre civile, Cour de cassation, 23 mars 2011, sanction de la fraude
Fraus omnia corrumpit. Autour de cet adage, la jurisprudence et la doctrine ont élaboré une théorie générale de la fraude, alliance d'une notion et d'un régime de sanction. En l'espce, la Première Chambre civile de la Cour de cassation en date du 23 mars 2011 vient affirmer implicitement la sanction de la fraude de l'un des époux en l'absence de dépassement de pouvoir.
Le 31 janvier 1998, un mari, commun en biens, utilise des deniers communs pour constituer, avec sa compagne une socièté civile immobiliére déstinée à acquérir un bien immobilier. L'époux n'en avertit pas son épouse. Le prononcé du divorce à lieu le 4 juin 2007.
Le 17 aout 2006, l'épouse engage une action en nullité de cet apport réalisé par son mari. Il semble que les premiers juges l'aient débouté. L'épouse, appelant, interjette appel devant la Cour d'appel de Lyon le 10 mars 2009. La Cour d'appel fait droit à sa demande en décideant que l'action en nullité de l'article 1427 du Code civil est certes prescrite mais le comportement du mari, l'intimé, est révélateur d'une fraude à l'égard de son épouse et que l'action fondée sur la fraude qui, elle, se prescrit par trente, ne se confont pas avec celle prévue par l'article 1427 du code civil qui est de deux ans. La Cour annule donc sur ce fondement, l'apport en numéraire fait par le mari mais aussi la société.
[...] L'action sur la fraude ne peut donc être exercée que dans un délai de cinq ans et non trente. C'est surement pour cette raison que la cour de cassation a pris une telle position. L'impact est donc ammoindrie, l'action est dorénavant proche de celle de la nullité. Et on savait que la cour n'etait pas réticente sur la sanction applicable mais plutot sur la prescription. La prescription de droit commun ayant diminué, elle n'avait plus à l'être. Cette décision reste donc affaiblie par la très large diminution de la prescription ( de droit commun ) concernant la fraude. [...]
[...] La première chambre civile de la cour de cassation en date du 23 mars 2011 explique dans son attendu de principe " qu'un époux, ne peut, à peine de nullité de l'apport, employer des biens communs pour faire un apport à une société sans en avertir son conjoint et sans qu'il en soit justifier dans l'acte". Lorsqu'un époux emploie des biens communs pour faire un apport à une société ou acquérir des parts sociales non négociables, l'article 1832 du code civil issu de la loi du 10 juillet 1982 n'exige pas le consentement de l'autre conjoint mais impose, sous peine de nullité, son information. [...]
[...] En outre, il s'agit d'une réaffirmation d'une solution déja acquise par la jurisprudence à l'instar de celle de la première chambre cilvil du 30 mars 1999 et du 4 décembre 2001. La solution peut être discuté, néanmoins, il est logique de traiter de la même façon la nullitépour défaut de consentement du conjoint et celle qui résulte de son défaut d'information. Dans les deux cas, l'époux à outrepassé ses pouvoirs sur les biens communs. Le présent arrêt s'inscrit de manière cohérente et logique dans la ligne de conduite de la jurisprudence antérieure. [...]
[...] Une affirmation regrettable de l'exclusivité de l'action en nullité. La cour de cassation vient en outre affirmer l'article 1427 du code civil " est exclusive de l'action en inopposabilité ouverte par l'article 1421 du code civile( . lequel ne trouve à s'appliquer qu'à défaut d'autre sanction". En tout évidence, la cour de cassation vient changer ses solutions antérieures par le changement des termes de son attendu. La haute cour abandonne la référence à la subsidiairité de la fraude où elle l'avait mentionné plusieurs fois comme dans l'arrêt sus cité de 1999 affirmant que " les textes sanctionnant les actes frauduleux ne trouvent à s'appliquer que subsidiairement, à défaut d'autre sanction". [...]
[...] A l'image de cette divergence, la cour de cassation dans ses décisions antérieures restait imprécise quand à la nature de la sanction applicable en cas de fraude. L'accroissement de la sécurité juiridique, ciment de la vie économique, passe par une distinction entre la nullité et l'inopposabilité afin de determiner leur champ d'application respectif. La premiére chambre civile de la cour de cassation en date du 23 mars 2011, vient mettre un terme à la controverse entourant la sanction des actes frauduleux. L'action fondée sur l'article 1427 du code civil esclut il l'exercice d'une action reposant sur la fraude de l'époux ? [...]
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