Commentaire d'arrêt, Première Chambre civile, Cour de cassation, 24 mars 1987, vices du consentement
Il s'agit d'un arrêt de rejet rendu par la Première Chambre civile de la Cour de cassation le 24 mars 1987 après le jugement de la Cour d'appel de Paris le 12 juin 1985.
Une œuvre qualifiée « d'attribuée à Fragonard » a été vendue aux enchères publiques. La mention « attribuée à » résulte de l'absence de certitude au moment de la vente, quant à l'authenticité de l'œuvre.
Les héritiers de l'ancien propriétaire de l'œuvre veulent annuler la vente, car elle résulterait d'une erreur, étant donné que le vendeur ne connaissait pas la valeur véritable de l'oeuvre.
Les demandeurs ont esté en justice les acheteurs de l'œuvre, les juges du fond ont refusé d'annuler la vente.
[...] En l'espèce, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi, l'aléa n'est pas un fondement de l'erreur, il incombait aux deux parties de supporter les conséquences de la levée de l'aléa. Il convient de voir dans un premier temps le vice du consentement que constitue l'erreur puis nous analyserons le fait que le juge n'ait pas considéré que le cas présent formait un élément constitutif de l'erreur. (II.) I. Une conception subjective de l'erreur Nous analyserons d'une part les deux conceptions de l'erreur puis, nous étudierons le fait que l'aléa devient la pierre angulaire du contrat présenté dans cet arrêt. [...]
[...] La Cour de cassation a rejeté les deux moyens. D'une part, il incombe aux demandeurs de prouver que la vente a été réalisée alors que le vendeur se trouvait sous l'empire d'une conviction erronée. Les contractants avaient donc accepté l'aléa sur l'authenticité de l'œuvre. D'autre part, cet aléa sur l'authenticité de l'œuvre ayant été dans le champ contractuel, aucune des parties ne peut alléguer l'erreur en cas de dissipation ultérieure de l'incertitude commune. Le caractère aléatoire d'un contrat, une fois intégré au champ contractuel, peut-il amener à alléguer une erreur une fois l'aléa levé ? [...]
[...] Dans ce cas, le juge se demande quelle est la qualité substantielle dans l'opinion commune de la chose-objet du contrat ? Quand on achète un tableau de grand maître, la qualité substantielle c'est évidemment l'authenticité et non une copie. Si le juge refuse de considérer l'authenticité comme qualité substantielle, il serait forcé de dire que c'est une erreur sur la valeur, et dans ce cas, l'erreur n'est pas admissible. (Pas d'erreur sur la valeur). L'introduction de l'aléa dans le champ contractuel. [...]
[...] En l'espèce, la Cour nous dit que l'aléa chasse l'erreur. En effet, l'accord s'est porté sur une éventualité d'aléa, donc le demandeur ne peut pas se plaindre que l'aléa se réalise, étant donné qu'il était d'accord sur le principe même, et qu'il avait accepté cet aléa. Donc il n'y a pas d'erreur, puisque par définition, l'aléa c'est un événement incertain, et il le savait dès la conclusion du contrat. Ici, le tableau était simplement attribué à Fragonard et non certifié authentique. [...]
[...] Si c'est le cas, alors il retient l'erreur. Mais ici, nous sommes plus loin que l'erreur simplement subjective, puisqu'il s'agit d'une erreur subjective in concreto par l'introduction de la condition d'aléa. C'est-à-dire que les parties ont introduit une condition qui n'est pas à première vue essentielle. Pour sa défense, l'errans doit donc, comme en droit commun (Art 1315cciv) apporter la preuve que l'aléa n'a pas été introduit dans le champ contractuel et non seulement qu'il a commis une erreur sur l'authenticité. [...]
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