Commentaire, arrêt, cour, cassation, première, chambre, civile, 12, novembre, 2009
Si nul n'est obligé de se nuire en faisant découvrir les désavantages de l'opération juridique proposée, il en va différemment du vendeur taisant des informations fondamentales pour l'acquéreur. Ainsi, même si des renseignements peuvent parfois être tus, la Cour de cassation réaffirme dans l'arrêt du 12 novembre 2009 la protection des personnes victimes de silence trompeur.
En l'espèce, par acte authentique en date du 19 novembre 1999, un couple acquiert un immeuble à usage d'habilitation. Une partie du prix de vente doit être payée dans les quatre semaines suivant la signature du contrat. Les acquéreurs découvrent que le vendeur leur a dissimulé sciemment l'absence de raccordement de l'immeuble acquis au réseau d'assainissement, alors même qu'il aurait dû l'être. Ils s'abstiennent de verser le supplément du prix prévu lors de la signature de l'acte authentique.
L'affaire est portée devant la cour d'appel de Colmar qui, dans un arrêt du 17 janvier 2008, retient la réticence dolosive du vendeur et le condamne à payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel et moral subi. Le vendeur se pourvoit en cassation. La question posée à la Cour de cassation est de savoir si le silence gardé par le vendeur sur l'absence de raccordement de l'immeuble au réseau d'assainissement est constitutif d'un dol par réticence pouvant, en conséquence, donner lieu à l'octroi de dommages et intérêts.
Dans un arrêt du 12 novembre 2009, la première chambre civile de la Cour de cassation répond logiquement par l'affirmative et rejette le pourvoi. Elle estime ainsi que le silence gardé volontairement en dépit de la connaissance d'une information déterminante, dont la preuve de la délivrance n'a pas été rapportée, est constitutif d'un dol par réticence.
Aussi convient il d'examiner successivement la caractérisation de la réticence dolosive (I) avant d'en constater les conséquences juridiques (III).
[...] Les acquéreurs, profanes de la vente immobilière, doivent recevoir toutes les informations propres à éclairer leur consentement. Ils ont pu légitimement croire que l'immeuble était raccordé au réseau d'assainissement. Le vendeur n'ayant pu démontrer que son obligation d'information a été respectée, son manquement est caractérisé. Par conséquent, sa condamnation au versement de dommages et intérêts en réparation du préjudice, matériel et moral, des acquéreurs est alors justifiée. Le choix par l'acquéreur du versement de dommages intérêts: Pour être sanctionné, le dol doit porter sur un élément déterminant du consentement. [...]
[...] Des constatations des juges du fond, la Cour de cassation a déduit en l'espèce le caractère volontaire de l'absence d'information. EN effet, elle indique que le vendeur a manqué à son obligation de contracter de bonne foi Les juges ont constaté, d'une part, que le vendeur connaissait l'information et, d'autre part, qu'il a sciemment gardé le silence afin de déterminer le consentement de son cocontractant profane. Aussi, tous les éléments constitutifs du dol par réticence sont réunis en l'espèce et le vendeur s'expose à d'inévitables sanctions. [...]
[...] Outre les sanctions fondées sur le vice du consentement, il convient de souligner que le dol constitue également un délit civil qui justifie le versement de dommages intérêts sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle, dès lors que la faute, le préjudice et le lien de causalité peuvent être prouvés. [...]
[...] En d'autres termes, pour que le comportement du contractant soit condamnable, il est nécessaire qu'il ait l'intention de tromper l'autre partie dans le but de l'amener à conclure le contrat. L'intention de tromper est aisément identifiable lorsqu'il exerce des manœuvres afin de pousser son cocontractant à conclure le contrat. La mise en évidence de l'élément intentionnel s'avère plus délicate lorsque le dol résulte du silence du vendeur. Certes, dans un arrêt de principe, la Cour de cassation a décidé que le simple fait de garder le silence sur un fait qui, s'il avait été connu, aurait dissuadé de contracter, est constitutif d'un dol. [...]
[...] La prise en compte de la réticence dolosive par la jurisprudence oblige désormais les vendeurs à satisfaire à leur obligation de renseignement sur toutes les qualités essentielles de l'immeuble. La Cour de cassation ne distingue plus selon que el dol est par commission ou par omission dès lors qu'il induit l'acquéreur en erreur. La réticence dolosive de l'espèce caractérise l'élément matériel du dol. Il est nécessaire, mais non suffisant afin de caractériser ce vice de consentement. Encore faut il mettre en évidence, cumulativement, l'élément intentionnel du dol. [...]
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