Sources d'obligation - engagement unilatéral- accord salarial collectif - dénonciation régulière - cassation - 15 septembre 2010
Par un arrêt en date du 15 septembre 2010, la chambre sociale de la cour de cassation a eut l'occasion de statuer sur un litige entre une retraité et son ex-employeur, concernant l'application de diverses mesures prises par l'entreprise par accord salarial collectif.
En l'espèce, Mme X, engagée en tant que secrétaire par la société SMJ qui est une filiale de la société COGEMA, a adhérée en novembre 2002 à un plan de départ à la retraite anticipée. Au 1er avril 2003, celle-ci a cessé son activité professionnelle afin de percevoir à cette date une pension de retraite anticipée évaluée à 70% de son salaire brut d'activité.
De plus, le 18 juin 2003, un accord salarial a été conclu au sein de la société COGEMA. Cette mesure prévoyait diverse mesures d'augmentations salariales applicables au 1er janvier 2003. Mais, la société SMJ a, par une note d'information du 21 aout 2003, réservé l'application de l'accord conclu précédemment aux agents présents dans l'effectif salarial au 2 septembre 2003.
Ainsi, la retraité a assigné son ex-employeur (la société SMJ) devant le conseil des prud'hommes en raison du fait qu'étant officiellement présente dans l'entreprise jusqu'au 31 mars 2003, cette dernière s'estime devoir bénéficier de l'accord du 18 juin 2003. La retraité de la SMJ a ainsi obtenue que la société attaquée, par application de l'accord salarial COGEMA du 18 juin 2003, lui verse une somme au titre de l'augmentation de salaire, ainsi qu'une autre somme à titre de dommages-intérêts et une indemnité pour frais irrépétibles.
De ce fait, la société SMJ se pourvoit en cassation au motif que l'ancienne salarié ne relève pas de l'accord salarial conclu au sein de l'entreprise, pour le simple fait que l'accord a été signé postérieurement au départ de l'ex-salariée ; et donc l'arrêt attaqué écarte par sa décision l'engagement unilatéral particulier du 21 aout 2003 qui s'applique au sein de la société. De plus, la société demanderesse invoque l'article 455 du code de procédure civile, dans la mesure où en réduisant la note d'information du 21 aout 2003 distribuée par la société SMJ à une simple mesure de l'application de l'accord COGEMA sans faire valoir qu'il s'agissait d'un engagement unilatéral autonome, la Conseil des prud'hommes a violé cet article.
En outre, la note d'information d'aout 2003 impliquait que celle-ci ne concernait en fait que les agents présents au 2 septembre de cette même année, et qu'elle n'était destinée qu'au personnel en activité. Par conséquent, le jugement rendu par le conseil des prud'hommes faisant bénéficier le mode de calcul rétroactif des augmentations aux ex-employés viole aussi l'article L.2254-1 du code du travail. Finalement, à supposer cet accord COGEMA applicable, il ne peut s'appliquer à des personnes ayant quitté l'entreprise au moment de la signature, de ce fait, la juridiction de première instance en statuant comme elle l'a fait, a violé les articles 1134 et 1165 du code civil et L.2254-1 du code du travail.
Le problème se pose donc de savoir si une note d'information peut modifier le champ d'application d'un accord collectif, la note intervenant postérieurement à la signature de l'accord ?
La cour de cassation dans son arrêt rendu le 15 septembre 2010 rejette le pourvoi formé par la société SMJ, au motif que la société s'étant elle-même prévalue de son engagement unilatéral devant les juges du fond ; la décision des juges du fond concernant le montant de la préretraite de Mme X équivalent à 70% de son salaire brut était donc fondée, mais cependant que la clause limitative du 21 aout 2003 était dépourvue d'effet dans ce cas.
Il en résulte donc que l'engagement unilatéral prime sur la clause rajoutée c'est-à-dire sur la note d'information (I). Par ailleurs, la dénonciation régulière dont l'engagement unilatéral de la SMJ fait l'objet entraine l'annulation de l'engagement (II).
[...] Autrement dit, il peut y avoir sanction importante voire même licenciement pour faute. C'est d'ailleurs la décision que la chambre sociale de la cour de cassation a prise dans un arrêt du 10 février 1998. L'arrêt rendu ici par la cour de cassation s'inscrit bien dans cette utilisation jurisprudentielle du principe de dénonciation régulière de l'engagement unilatéral dans la mesure ou la clause ajouté par la note d'information du 21 aout 2003 n'a pas eut d'effet sur l'application de l'accord salarial collectif et donc « en l'absence de dénonciation régulière de l'engagement précédent » la cour de cassation a rejeté la demande de la société SMJ qui ne voulait pas mettre à jour l'augmentation de salaire de Mme X. [...]
[...] De plus, l'engagement unilatéral pris par un employeur est transmis au nouvel employeur dans le cas ou une entité économique autonome est transférée ; sauf si l'employeur y a mis fin en prévenant les salariés et les institutions représentatives du personnel dans un délai qui permet les négociations. Ainsi il faut pour mettre fin à un engagement unilatéral que le nouvel employeur le dénonce. Cela amène donc à se demander si la clause ajoutée par la SMJ sous forme de « note d'information » est applicable ou non par rapport à l'accord COGEMA. Une note d'information rajoutée, et pourtant dépourvue d'effet. [...]
[...] En l'espèce, la société avance que le conseil des prud'hommes « en réduisant la note d'information du 21 aout 2003 distribuée par elle-même à une simple mesure d'application de l'accord COGEMA sans répondre à ses conclusions faisant valoir qu'il s'agissait d'un engagement unilatéral autonome » a violé l'article 455 du code de procédure civile qui prévoit que « Le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peut revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date. Le jugement doit être motivé. Il énonce la décision sous forme de dispositif. ». [...]
[...] La dénonciation n'est effective qu'à une date postérieure à ces formalités. Tant qu'il n'a pas été dénoncé, l'engagement unilatéral reste applicable et peut ne pas cesser du fait du non respect de l'employeur de ses engagements, ou de l'absence de réclamation de la part des employés. Les salariés ne peuvent pas prétendre au maintien des avantages découlant de l'engagement unilatéral après que celui-ci ait été dénoncé régulièrement. Lors de la conclusion d'un accord collectif ayant le même objet que l'engagement unilatéral, le premier se substitue au second. [...]
[...] C'est pour cette raison que la cour de cassation énonce que « nonobstant la clause de la note du 21 aout 2003 limitant ce bénéfice au seul personnel présent dans l'entreprise qui, en l'absence de dénonciation régulière de l'engagement précédent, était dépourvu d'effet ». C'est donc l « l'engagement unilatéral du 4 juin 2002 aux termes duquel elle (la société) s'était engagée à faire bénéficier son personnel à compter du 1er janvier 2003 » qui prime sur la clause ajoutée. L'engagement unilatéral peut cependant être annulé si il y a dénonciation régulière de l'engagement. [...]
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