Commentaire d'arrêt, Cour de cassation, 29 juillet 2009, responsabilité délictuelle, lien de causalité
« Le hasard est le purgatoire de la causalité ». C'est en ses termes que Jean Baudrillard résume l'inextricable lien qui unit la responsabilité civile et le raisonnement scientifique. S'il est parfois loisible de constater la proximité de la responsabilité civile et du raisonnement mathématique tant celle-ci semble parfois se borner à une simple équation à travers une application stricte des critères cumulatifs que sont le lien de causalité, le fait générateur et le dommage comme le rappelle E. Vergès dans son article « Les liens entre la connaissance scientifique et la responsabilité civile » il demeurerait toutefois très dangereux de se contenter d'une vision aussi restrictive notamment en matière médicale. En effet le droit de la responsabilité civile semble de plus en plus ouvert à accepter une interprétation large des textes pour permettre une meilleure indemnisation des victimes et notamment en matière médicale ou longtemps à régner la toute-puissance de la preuve scientifique. Du déclin de la connaissance scientifique à la faveur d'un syllogisme juridique favorable aux victimes, la justice admet désormais la réparation des dommages causés en l'absence de lien de causalité certain.
[...] Une volonté toujours plus présente de faciliter la tâche des victimes. II- Les présomptions graves, précises et concordantes: une probabilité du lien de causalité suffisante pour induire une réparation. Scission entre preuve scientifique et responsabilité médicale: le syllogisme juridique des présomptions graves, précises et concordantes au service des victimes. Un refus de prise de prise de position de la Haute Juridiction qui conduit à une véritable hétérogénéité sur le contentieux de l'hépatite B. Introduction: "Le hasard est le purgatoire de la causalité". [...]
[...] On pourrait donc presque assimiler le raisonnement des juges à un simple raisonnement mathématique ou l'addition de la faute, du dommage et du lien de causalité entraînerait l'indemnisation. C'est ainsi que le résume parfaitement E. Vergès dans son ouvrage "Les liens entre la connaissance scientifique et la responsabilité civile : preuve et conditions de la responsabilité civile ou il rappelle: "Une première tentation serait donc d'établir une équation de la responsabilité civile sous la forme d'une somme: Fait Générateur +Dommage+ Lien de causalité =responsabilité " Cet automatisme aussi tentant soit-il peut s'avérer dangereux car il ne prend guère en considération la volonté de plus en plus présente des juridictions de faciliter la tâche des victimes. [...]
[...] De plus, notre arrêt marque une confirmation d'un procédé visant à favoriser toujours plus les victimes. Il s'agit du renversement de la charge de la preuve. L'idée étant en matière médicale d'imposer aux laboratoires de démonter l'innocuité de leurs produits. En l'espèce ce serait donc aux laboratoires Sanofi Pasteur MSD de prouver la non dangerosité de son vaccin. Cependant il est nécessaire de remarquer que ce renversement bien que positif dans une politique d'indemnisation des dommages sanitaires, n'en demeure pas moins contraire au code civil et notamment à son article 1315 qui dispose: "Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver." Cet article dispose clairement que c'est au demandeur de rapporter la preuve de son préjudice. [...]
[...] Pour favoriser la charge de la preuve qui incombe aux victimes, la cour de cassation a donc décidé d'atténuer la conception très stricte qu'elle a longtemps adopté en subordonnant la preuve du lien de causalité à la preuve scientifique absolue. C'est notamment le cas dans notre arrêt ou la cour d'appel reconnait l'existence de présomptions graves, précises et concordantes pour ouvrir doit à la réparation de Madame X. Celle-ci pourraient être définie comme un mécanisme logique qui a partir d'un fait prouvé et donc incontestable va permettre à la juridiction d'en déduire qu'un autre fait à certainement du avoir lieu tant bien même que ce second fait n'aurait pas été prouvé. [...]
[...] L'arrêt du 22 mai 2008 confirmé par l'arrêt du 9 juillet 2009 marque le tournant décisif de la Haute juridiction au profit des victimes. L'attendu de principe déclare: "Attendu, cependant, que si l'action en responsabilité du fait d'un produit défectueux exige la preuve du dommage, du défaut et du lien de causalité entre le défaut et le dommage, une telle preuve peut résulter de présomptions, pourvu qu'elles soient graves, précises et concordantes; D'où il suit qu'en se déterminant ainsi, en référence à une approche probabiliste déduite exclusivement de l'absence de lien scientifique et statistique entre vaccination et développement de la maladie, sans rechercher si les éléments de preuve qui lui étaient soumis constituaient, ou non, des présomptions graves, précises et concordantes du caractère défectueux du vaccin litigieux, comme du lien de causalité entre un éventuel défaut et le dommage subi par M. [...]
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