Il s'agit de s'intéresser à la responsabilité contractuelle et délictuelle.
La Cour de Cassation, dans un arrêt du 18 juillet 2000 a rendu une décision concernant la possibilité d‘intenter à la fois une action en responsabilité contractuelle et une action en responsabilité délictuelle.
Brigitte X, souffrant d‘une psychose maniaco-dépressive, a été hospitalisée dans un établissement de santé privé, dans lequel elle a fait une première tentative de suicide. Un médecin a par la suite estimé qu‘elle était dans un état susceptible de l‘entrainer au suicide et demandé à ce qu‘on l‘attache, par des sangles au poignets et aux chevilles, à son lit. Elle a ensuite été laissé sans surveillance et découverte une heure plus tard, grâce à une malade voisine qui a donné l‘alerte, brûlée au troisième degré. Elle avait tenté de se suicider avec un briquet. Ses avant-bras ont été amputés. Elle est ensuite décédée noyée dans un établissement pour grands brûlés quelques mois plus tard.
Son mari a engagé une action contre l‘établissement de santé privé en invoquant les fautes commises par celui-ci. Il demandait sur un plan contractuel ,en sa qualité et celle de sa fille d‘héritiers de la défunte, la réparation des dommages subis par celle-ci et sur un plan délictuel la réparation de son propre préjudice et de celui de sa fille, préjudice par ricochet, à la fois moral causé par la perte de la défunte et matériel du fait de l‘argent dépensé à la suite de l‘hospitalisation puis du décès. Il a été débouté de toutes ses demandes par le tribunal, ainsi que par la Cour d‘appel, il a de ce fait, formé un pourvoi en cassation.
La Cour d‘appel a estimé que la responsabilité contractuelle de la clinique devait être écartée au moyen qu‘ aucune faute de surveillance ne pouvait lui être reprochée dans la nuit où Brigitte X fut brûlée. La Cour d‘appel a déclaré que la responsabilité délictuelle de la clinique devait aussi être écartée au moyen que M X n‘était pas un tiers à son égard. Elle a également retenue qu‘une ordonnance de non-lieu rendue à la suite d‘une plainte avec constitution de partie civile de M.X. constituait un obstacle à la recherche de la responsabilité délictuelle de la clinique.
Le fait, pour un établissement de santé privé, de laisser un malade à tendance suicidaire sans surveillance constitue-t-il une faute susceptible d‘entrainer la responsabilité contractuelle de celle-ci ? Cette responsabilité peut-elle être engagée par un ayant cause au contrat ? Les tiers à un contrat peuvent-ils invoquer l‘exécution défectueuse de celui-ci lorsqu‘elle leur a causé un dommage, et ce , sans aucune autre preuve que celle du manquement contractuel ?
[...] Elle a également retenue qu'une ordonnance de non-lieu rendue à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile de M.X. constituait un obstacle à la recherche de la responsabilité délictuelle de la clinique. Le fait, pour un établissement de santé privé, de laisser un malade à tendance suicidaire sans surveillance constitue-t-il une faute susceptible d'entrainer la responsabilité contractuelle de celle-ci ? Cette responsabilité peut-elle être engagée par un ayant cause au contrat ? Les tiers à un contrat peuvent-ils invoquer l'exécution défectueuse de celui-ci lorsqu'elle leur a causé un dommage, et ce , sans aucune autre preuve que celle du manquement contractuel ? [...]
[...] On peut d'ailleurs rapprocher cette obligation de surveillance, selon M. Jourdain, des devoirs de diligence et de prudence sanctionnées par les articles 1382 et 1383 du Code Civil. Ainsi, en l'espèce, l'inexécution de l' obligation de surveillance de la clinique a conduit à la mort de Brigitte, et donc à la perte pour M.X et sa fille de celle-ci. Ils ont donc subi un préjudice à la fois moral et matériel, préjudice par ricochet puisque découlant du préjudice lui-même subi par Brigitte X :c'est-à-dire les brûlures, puis la mort. [...]
[...] I-L'engagement de la responsabilité contractuelle d'une partie à un contrat En vertu de l'article 1134 du Code Civil, les parties sont liées par leurs obligations, le contrat a pour elles une force obligatoire. De ce fait, la responsabilité d'une partie à un contrat peut être engagée par un autre contractant ou par un tiers bénéficiaire, c'est-à-dire un ayant-cause ou un créancier, dès lors que la partie au contrat n'a pas exécuté correctement son obligation A-Une possibilité ouverte aux ayant causes Il est admis qu'une partie à un contrat peut engager la responsabilité contractuelle de l' autre partie sur le fondement de l'article 1137 ou de l'article 1147 du Code Civil, lorsque celle-ci n'a pas remplie son obligation. [...]
[...] Cette solution semble dictée par le bon sens, en effet dès lors que la clinique connaissait l'état suicidaire de la patiente, il lui incombait une obligation de surveillance particulièrement stricte. La solution de la Cour de Cassation apparait donc plus équitable et plus réaliste que celle de la Cour d'appel, en effet le bon sens interdit de laisser seule une personne encline au suicide. L'arrêt précise que Brigitte X a été laissée sans surveillance, aucun membre du personnel de la clinique ne se trouvant à l'étage où se situait sa chambre et que seul l'appel d'une autre malade avait permis de lui venir en aide l'énoncé de ses faits prouvent bien que la clinique n'a pas respecté son obligation de surveillance. [...]
[...] B-L'assimilation de la faute contractuelle à la faute délictuelle La Cour de cassation, dans cet arrêt, précise que M.X en tant que tiers au contrat, est bien fondé à invoquer l'exécution défectueuse de celui-ci dès lors qu'elle lui a causé un dommage, une solution qui n'est pas nouvelle. Cependant elle y a ajoute une précision de taille : M.X n'aurait pas à rapporter d'autre preuve que celle de l'inexécution contractuelle. Ainsi, dans cet arrêt, la Cour de cassation semble considérer que la faute contractuelle de la clinique établissait nécessairement, sans qu'il y ait besoin d'autres preuves, une faute délictuelle de la clinique envers les tiers. La Cour s'oppose ici à un courant jurisprudentiel conférant une certaine relativité à la faute contractuelle. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture