Clientèle, civile, 7 novembre 2000, chose, commerce, fonds, libéral, licéité, cession, choix, patient, arret, commentaire
Selon Fouillée, célèbre philosophe français du XIXe siècle, « Qui dit contractuel, dit juste ». Cette affirmation parait au premier abord être d'une simplicité éclatante car il est vrai que deux parties à un contrat s'engagent dans la mesure où elles y ont un intérêt. (...) Pourtant certains contrats conclus ne produisent malgré tout aucun effet à cause de la licéité de la chose objet du contrat. En effet la chose doit être dans le commerce pour que le contrat soit licite. Ainsi le corps humain, les choses impures tels les stupéfiants, les armes dangereuses, les marchandises contrefaites, mais encore les attributs de la souveraineté sont des choses hors commerce. La question s'est posée à l'égard de la notion de clientèle civile médicale dans le cadre d'une cession.
C'est de cette notion de licéité de la chose dont traite l'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 7 novembre 2000.
Dans cette affaire M. Y a cédé la moitié de sa clientèle à M. X en contrepartie d'une somme d'argent. Les parties ont également conclu une convention de garantie d'honoraires par laquelle le cédant s'engageait à assurer au cessionnaire un chiffre d'affaire minimum. M. X ayant versé une partie de la somme et estimant les engagements non respectés par son confrère a demandé l'annulation de la convention non exécutée par M. Y, ce dernier demandant quant à lui le paiement de la somme restant due.
[...] Les deux parties au contrat doivent conclure de bonne foi. Le contrat est par essence l'acte juridique visant à produire des effets de droit entre les parties contractantes. De ce fait comme tout contrat il faut respecter les conditions de validité fixées par l'article 1108 du Code civil : le consentement, la capacité, un objet certain et une cause licite. Outre ces conditions il faut que le prix et la chose soit déterminée ou au moins déterminable pour que le contrat de vente puisse produire ses effets. [...]
[...] La cession c'est la transmission entre vifs, du cédant au cessionnaire, d'un droit réel ou personnel, à titre onéreux ou gratuit. Quant à la clientèle c'est l'ensemble des relations d'affaires habituelles ou occasionnelles qui existent et seront susceptibles d'exister entre le public et un poste professionnel dont ils constituent l'élément essentiel et qui généralement trouvent leurs sources dans des facteurs personnels et matériels conjugués. C'est de cette notion de licéité de la chose dont traite l'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 7 novembre 2000. [...]
[...] Il leur revient donc de juger si le patient conserve sa liberté de choix ou non. En l'espèce les juges ont estimé que la liberté de choix n'était pas respectée. Ainsi la sanction n'est pas comme le demandait le cessionnaire une annulation de la convention pour inexécution mais bien la nullité pour illicéité de la convention. De part cette sanction la Cour pose le principe du tout ou rien, soit la condition est remplie et le contrat produit ses effets, soit la condition fait défaut et la convention subit les foudres souveraines des juges par la nullité absolue pour illicéité de l'objet. [...]
[...] L'atteinte indirecte à la liberté qu'a le client de choisir son prestataire constitue donc une modalité importante de réalisation de ce processus. Il est évident que le contrat porte sur la supputation que la clientèle doit s'orienter vers le cessionnaire, mais en réalité ce n'est pas une obligation car le patient doit garder son entière liberté de choix. Il s'agit par cette solution de favoriser la sécurité juridique en vertu de l'article 1134 selon lequel les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites Ainsi la convention passée entre les praticiens doivent être appliqué à moins que le patient soit privé de sa liberté de choix, auquel cas la convention serait nulle de nullité absolue pour illicéité de l'objet. [...]
[...] D'ailleurs en 1997 le conseiller de la Cour de cassation M. Chartier estimait que parce que le client est libre de son choix la clientèle civile ne peut être cédée La jurisprudence antérieure affirmait l'illicéité de principe d'une telle cession, les exemples en sont nombreux. Le 27 novembre 1984 la Cour énonçait dans son arrêt que la clientèle médicale est personnelle, de ce fait incessible et hors du commerce De même elle a jugé le 3 juillet 1996 que les malades jouissant d'une liberté absolue de choix de leur médecin, la clientèle qu'ils constituent, attachée exclusivement et de façon toujours précaire à la personne de ce praticien, est hors du commerce et ne peut faire l'objet d'une convention C'était par conséquent tout l'inverse de ce qu'affirme aujourd'hui la Cour de cassation dans cet arrêt, il s'agit d'un véritable revirement de jurisprudence. [...]
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